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Les revendications des gilets jaunes croisées avec les programmes politiques

6 décembre 2018

Temps de lecture : 4 minutes
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Les revendications des gilets jaunes croisées avec les programmes politiques

Temps de lecture : 4 minutes

L’Observatoire du journalisme ne publie pas d’articles qui ne soient pas en relation avec les médias. Mais la situation consécutive au mouvement des gilets jaunes est tellement exceptionnelle que nous publions volontiers une lettre d’un de nos lecteurs croisant les programmes officiels des candidats à l’élection présidentielle de 2017 avec les revendications des gilets. Le titre est de notre lecteur mais les intertitres sont de la rédaction.

Gilets Jaunes : Vers une solution « à l’italienne » ?

On reprochait aux Gilets Jaunes, depuis le début du mou­ve­ment, un manque de coor­di­na­tion, l’absence de cen­tral­i­sa­tion et surtout — hand­i­cap médi­a­tique majeur — l’absence de représen­tants désignés pour porter leur parole sur les plateaux TV. Ajou­tons à cela l’incapacité de la caste politi­co-médi­a­tique à saisir la sub­stan­tifique moelle de ce que l’on nom­mera pudique­ment « la grogne sociale », et on com­prend mieux son désar­roi face à ce qu’il faut désor­mais bien accepter d’appeler une révolte.

Un programme Insoumis ?

Jean-Luc Mélen­chon, le soir du dimanche 2 décem­bre, affichait une con­fi­ance toute élec­torale en affir­mant que les reven­di­ca­tions des Gilets Jaunes, pub­liées notam­ment ici, same­di 1er décem­bre, cor­re­spondraient en tout point au pro­gramme porté par LFI.

Jean-Luc Mélen­chon n’a pas tout à fait tort. Il n’a néan­moins pas tout à fait rai­son non plus. En effet, à y regarder d’un peu plus près, et en croisant l’ensemble des pro­grammes offi­ciels des can­di­dats à la dernière élec­tion prési­den­tielle, on voit se dessin­er en clair-obscur une ten­dance fort intéres­sante et, qui plus est, déjà vue et déjà testée. Non pas certes celle des HLPSDNH, au grand dam des chroniqueurs mondains, mais bien l’improbable sit­u­a­tion poli­tique qui a vu le jour en Ital­ie : l’alliance d’un par­ti d’extrême-droite respectable, la Ligue, et d’un par­ti d’extrême-gauche rel­a­tive­ment mod­éré, le Mou­ve­ment 5 Étoiles. Explications.

Croisement des programmes

Si on fait l’exercice de crois­er stricte­ment les reven­di­ca­tions et le con­tenu des pro­grammes des can­di­dats, c’est-à-dire sans entr­er dans le jeu des inter­pré­ta­tions et de l’exégèse, on con­state que par­mi les 42 propo­si­tions des Gilets Jaunes :

- 7 fig­urent au pro­gramme de François Fillon
— 9 fig­urent au pro­gramme d’Em­manuel Macron
— 10 fig­urent au pro­gramme de Benoît Hamon
— 8 fig­urent au pro­gramme de Nico­las Dupont-Aig­nant (dont 1 que Marine Le Pen ne pro­po­sait pas)
— 10 fig­urent au pro­gramme de Philippe Poutou
— 8 fig­urent au pro­gramme de Nathalie Arthaud
— 6 fig­urent au pro­gramme de Jean Lassalle
— 14 fig­urent au pro­gramme de Jacques Cheminade
— 9 fig­urent au pro­gramme de François Asse­lin­eauÀ côté de cela, 20 de ces reven­di­ca­tions fig­urent au pro­gramme de Marine Le Pen (21 si on intè­gre le pro­gramme de Nico­las Dupont-Aig­nant, ce qui n’est pas illogique au vu de leur rap­proche­ment en cours de cam­pagne), et 22 au pro­gramme de Jean-Luc Mélenchon.

29 revendications des gilets jaunes préemptées

Ce qui est encore plus intéres­sant, c’est que ces deux pro­grammes, mis en super­po­si­tion, représen­tent 29 reven­di­ca­tions des Gilets Jaunes.

Ce qui devient ensuite extrême­ment intéres­sant, c’est que les 13 reven­di­ca­tions qui ne fig­urent pas dans ces deux pro­grammes, une seule (le « zéro SDF ») fig­ure dans le pro­gramme d’un autre can­di­dat (Jean Las­salle)… Les autres ne sont inscrites dans aucun programme.

En dehors du fait qu’une seule reven­di­ca­tion, qui n’apparaît que dans le pro­gramme de LFI (l’accueil digne des migrants) pour­rait laiss­er à penser à une forme de « noy­au­tage » du mou­ve­ment par des mil­i­tants LFI, le con­stat est pour­tant lumineux. L’avenir poli­tique de ce mou­ve­ment, soutenu par plus de 80% des Français, dont « on » con­sid­ère qu’il est une impasse par manque de struc­tura­tion pour­rait bien trou­ver une sor­tie par le haut.

Cette sor­tie néces­sit­erait que deux for­ma­tions, le RN et LFI, que tout sem­ble oppos­er sur les plateaux TV, mais qui en réal­ité por­tent des reven­di­ca­tions très proches, à la fois l’une de l’autre et de celles des Français « d’en bas », con­vi­en­nent d’un rap­proche­ment sous une ban­nière commune.

Alliance populiste ?

Mélen­chon est un pop­uliste. Il le sait et s’assume par­faite­ment dans ce rôle de tri­bun de la plèbe urbaine auquel ses Human­ités clas­siques le des­ti­naient évidemment.

Marine Le Pen, mal­gré tout ce que l’on peut lui reprocher, est issu d’un par­ti qui, depuis plus de 40 ans, porte les reven­di­ca­tions de la France pop­u­laire et rurale, comme l’ont encore démon­tré les dernières élections.

Le pop­ulisme des villes et le pop­ulisme des champs peu­vent-ils se ren­con­tr­er et s’allier sur un pro­gramme com­mun, déjà écrit, pour faire émerg­er un pop­ulisme Français ? La réponse devra être apportée avant les élec­tions européennes, et peut-être même avant, en cas de dis­so­lu­tion de l’Assemblée Nationale (réclamée par les deux partis…).

Une alliance pré-élec­torale pour­rait, de ce point de vue, et sans fusion des listes, con­stituer un moyen de con­tourn­er les obsta­cles posés par un mode de scrutin con­sid­éré (par les deux par­tis) comme confiscatoire.

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