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Quand Samuel Laurent des Décodeurs du Monde ment comme un arracheur de dents

4 août 2019

Temps de lecture : 7 minutes
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Quand Samuel Laurent des Décodeurs du Monde ment comme un arracheur de dents

Temps de lecture : 7 minutes

Pre­mière dif­fu­sion le 12/12/2018

Vous connaissez le slogan des arracheurs de dents ? « ça ne vous fera pas mal ». Vous connaissez Les Décodeurs que nous avons analysés fin 2014 ici et en vidéo mi 2017 là. Ils sont comme les arracheurs de dents qui vous emportent la moitié de la mâchoire sous prétexte d’un début de carie. Un exemple de gencive abimée dans Le Monde du 7 décembre 2018 sous la signature de Samuel Laurent sur le « Pacte migratoire de l’ONU ; itinéraire d’une intox ». On désosse avec précaution.

Précisions méthodologiques

Il ne vien­dra jamais à un esprit sen­sé de croire la total­ité de ce qui se peut s’écrire ou se représen­ter sur inter­net. Depuis la présence des rep­tiliens par­mi nous, l’existence de l’amant caché du pape ou l’influence des infox des lapons sur le Brex­it. Il va de soi que sur le pacte migra­toire voulu par l’ONU, de nom­breuses inex­ac­ti­tudes ont été avancées sur les réseaux soci­aux. Non, Emmanuel Macron – qui a déjà bien des soucis – ne démis­sion­nera pas le lende­main de la sig­na­ture du pacte pour laiss­er les pleins pou­voirs à l’ONU. Non, l’ONU « ne prévoit pas l’arrivée de 480 mil­lions de migrants pour détru­ire l’Europe », elle se con­tente d’en pré­par­er les con­di­tions morales et sym­bol­iques ain­si que de pro­pos­er les cadres néces­saires pour élim­in­er morale­ment et poli­tique­ment ceux et celles qui auraient l’idée odieuse de ne pas envis­ager cette per­spec­tive avec ravisse­ment. Mais ren­trons dans le vif du sujet.

Théorie conspirationniste

Vous pensez autrement que Les Décodeurs ? Mal­heureux, vous tombez dans la con­spir­a­tion comme l’annonce le sous-titre de l’article « Le pacte mon­di­al pour des migra­tions sûres est à la base d’une théorie con­spir­a­tionniste très pop­u­laire chez les gilets jaunes ». Fichtre !

Pré­cisons que le pacte n’est pas un traité, il a été « adop­té » les 10 et 11 décem­bre lors d’une grand messe onusi­enne à Mar­rakech à laque­lle Emmanuel Macron et Édouard philippe se sont bien gardés de se ren­dre, y dépêchant le très obscur Secré­taire d’État aux Affaires Étrangères Jean-Bap­tiste Lemoyne. Le texte sera sans doute voté défini­tive­ment et sans de nom­breux pays (le dernier réfrac­taire étant le Brésil) le 19 décem­bre 2018 à New-York, siège de l’ONU. Mais que con­tient ce fameux pacte ?

Com­mençons par son inti­t­ulé « Le pacte mon­di­al des Nations-Unies pour des migra­tions sûres, ordon­nées et régulières ». Le doux Samuel pré­cise « une déc­la­ra­tion de portée sym­bol­ique, réaf­fir­mant un cer­tain nom­bre de stan­dards, mais ne com­por­tant aucune oblig­a­tion en matière d’accueil ». Reprenons le titre et le dernier adjec­tif, régulières. Réguli­er dit notre Lit­tré (édi­tion 1874) « con­forme aux règles naturelles, con­forme aux règles naturelles, con­forme aux règles de la morale ». Réguli­er dans le sens com­mun c’est aus­si ce qui revient régulière­ment, ce qui est habituel, ce qui est inéluctable. Gen­til Samuel souligne le car­ac­tère non con­traig­nant sur le plan juridique mais ajoute tout de suite que le texte « ajoute quelques déc­la­ra­tions de principe affir­mant que les migra­tions sont un phénomène inévitable et qui a des aspects posi­tifs ». Inévitable, le mot est lancé. Cela ne vous rap­pelle rien ? Mar­garet Thatch­er TINA There is no alter­na­tive (il n’y a pas d’alternative – au néo libéral­isme thatch­érien — voulait-elle dire). Une portée « sym­bol­ique » qui devient en rai­son pra­tique nor­ma­tive. Les Européens sont con­damnés aux migra­tions comme le forçat était con­damné au bagne de Cayenne.

Reprenons le mot « stan­dard » et le Robert d’Alain Rey, dic­tio­n­naire his­torique de la langue française (édi­tion de 1992) « Stan­dard… par analo­gie a pris le sens de ren­dre con­forme à un mod­èle social stan­dard ». Il s’agit bien de ren­dre con­formes les nations subis­sant l’invasion migra­toire, de les stan­dard­is­er. Reprenons aus­si le mot « principe » et notre Lit­tré, « principe… orig­ine, cause pre­mière… ce qui opère comme un principe, propo­si­tion que l’esprit admet comme un point de départ, règle de con­duite ». Même orig­ine que prin­ceps, prince, ce qui vient en pre­mier. Ces principes sont donc un point de départ, des règles, qui doivent déter­min­er la con­duite pra­tique des sig­nataires et être suiv­is d’effet.

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Les principes et les standards contre la liberté d’expression

L’ami Samuel con­state que cer­tains aspects du pacte sont mis en avant par les « détracteurs du doc­u­ment, sou­vent défor­més, et décon­tex­tu­al­isés, car­i­cat­u­rant ce pacte … (qui inclu­rait) l’obligation pour les médias de dire du bien de l’immigration etc ». Lisons l’avis de l’historien du droit Jean-Louis Harouel (Le Figaro du 11 décem­bre 2018) :

Le pacte con­sid­ère que le débat pub­lic doit néces­saire­ment « amen­er le pub­lic à con­sid­ér­er les effets posi­tifs qu’ont des migra­tions sûres, ordon­nées et régulières »… Par con­séquent, le débat pub­lic auquel le pacte se dit attaché n’est pas libre. D’ailleurs ce doc­u­ment pré­conise aux Etats de couper les sub­ven­tions aux médias dif­fu­sant des dis­cours jugés xéno­phobes et intolérants. Or, un jour­nal qui pub­lierait des faits con­tre­dis­ant le dogme du car­ac­tère néces­saire­ment bien­faisant des phénomènes migra­toires serait aus­sitôt accusé d’être xéno­phobe et intolérant. Le pacte con­tribue donc à restrein­dre la lib­erté d’expression et de pen­sée, déjà men­acée dans les pays occi­den­taux. Il veut instau­r­er une vérité offi­cielle. (les mots soulignés sont de la rédaction).

Ce que le cama­rade Samuel appelle « encour­ager une cou­ver­ture médi­a­tique objec­tive de ces ques­tions », c’est la cen­sure sous toutes ses formes, finan­cière incluse. Anas­tasie aux longs ciseaux, l’opprobre moral suivi de la con­damna­tion par les tri­bunaux, et enfin la sanc­tion économique. Resteraient en lice les médias offi­ciels sub­ven­tion­nés par vos impôts (aide directe au Monde en 2016 : plus de 5M€) ou par le secteur privé (le Decodex a été financé par Google). Samuel Lau­rent sait tout cela, nous lui accor­dons bien volon­tiers les béné­fices de l’intelligence et des sources d’information. C’est pourquoi nous pou­vons affirmer sa par­en­té avec nos anciens arracheurs de dents.

Le pacte agi­ra par effet de cli­quet, voyons com­ment. Comme le sig­nale un peu plus loin dans son entre­tien Jean-Louis Harouel, les recom­man­da­tions du pacte vont con­stituer un moyen de pres­sion sur les poli­tiques gou­verne­men­tales, des mil­i­tants favor­ables à l’immigration vont s’en empar­er, des avo­cats se réclameront du texte auprès des tri­bunaux. Ajou­tons que cer­tains jour­nal­istes bien inten­tion­nés (ceux qui sont financés par Google ?) dénon­ceront leurs con­frères, alert­eront les réseaux soci­aux sur les con­trevenants, deman­deront l’asphyxie finan­cière de leurs adver­saires. Au nom des bonnes inten­tions, en se référant à un texte inter­na­tion­al : ce n’est pas moi qui le demande Mon­sieur le Juge, c’est le pacte de l’ONU, un principe moral et mon­di­al. Le tout comme l’écrit (sans rire) le pacte en soulig­nant son attache­ment à la lib­erté d’expression.

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Complotisme, censure, autocensure

Tor­dons le cou à quelques canards hiver­naux : non, l’ONU n’a pas téléphoné à Samuel Lau­rent pour lui com­man­der son arti­cle. Non, Xavier Niel ou Math­ieu Pigasse ne lui ont pas envoyé un cour­riel pour lui en indi­quer le ton. Ce serait ridicule de le penser et surtout ces démarch­es sont par­faite­ment inutiles, Samuel Lau­rent n’a besoin de per­son­ne pour men­tir. Il le fait de lui-même, spon­tané­ment. Il con­naît les « valeurs » et la soci­olo­gie du Monde et de ses pro­prié­taires : la mon­di­al­i­sa­tion heureuse, le char­mant monde libéral lib­er­taire, l’entre soi cul­turel, économique et social. L’immigration « cool » dans les beaux quartiers et les immi­grés pour les gilets jaunes. Il y adhère sans doute sincère­ment, il y trou­ve un intérêt moral comme pro­fes­sion­nel. Irait-il à l’encontre, il ris­querait la décon­sid­éra­tion des ses pairs et peut-être plus.

Ajou­tons que Samuel Lau­rent ou Les Décodeurs ne mentent pas tout le temps, pour une sim­ple rai­son d’efficacité. La pra­tique du men­songe exige de la mesure, des pré­cau­tions, du doigté, pour ven­dre le pacte pour les migra­tions par exem­ple. Le men­songe pour pro­duire un effet doit se trou­ver noyé dans d’autres nou­velles, celles là véri­fiées. Dans la société du spec­ta­cle le vrai devient un moment du faux, dis­ait le regret­té Guy Debord. Amen.

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