C’est un moment particulièrement abject, qui s’est déroulé sur le plateau de BFMTV le 29 août 2023. Interrogée sur la disparition du jeune Émile survenue au Haut-Vernet il y a près d’un mois, la « journaliste » de Libération Bernadette Sauvaget a accablé encore un peu plus la famille, dont elle a fait le procès en “catholicisme-extrême droitier”.
Sur le plateau de BFMTV, Olivier Truchot revient sur l’entretien que la famille du jeune garçon disparu a donné à Famille chrétienne. Qualifiant les parents de celui-ci de couple « très pieux », le présentateur souligne comment celui-ci a « choisi la presse catholique car [il] avait peur d’être moqué, ridiculisé ». Et d’interroger Bernadette Sauvaget, journaliste de Libération pour analyser ledit entretien.
Une analyse volontairement politique
« Ils ont choisi un titre catholique, […] plutôt proche de leurs convictions », dira d’abord Sauvaget. Apparemment attachée au rite traditionnel de l’Église catholique, la famille aurait donc souhaité s’exprimer dans un journal « proches de leurs convictions », et non relatif à leur foi ? C’est parce qu’ils voulaient parler de cette épreuve en qualité de couple, de famille catholique que les parents d’Émile se sont rapprochés du média dirigé par Samuel Pruvot, comme ce dernier l’a raconté. Évoquer des « convictions » revenait dès les premiers mots de son discours à orienter la suite de son analyse vers un biais politique, alors même que le journal Famille chrétienne se situe plutôt dans la droite modérée sur l’échiquier politique et ne figure pas parmi les média catholique attachés à la liturgie traditionnelle.
« Ils disent que leur foi a été caricaturée. […] J’ai pas eu ce sentiment. »
Bernadette Sauvaget a ensuite regretté que les parents du jeune garçon aient déploré que leur « foi [ait] été caricaturée ». Et la « journaliste » d’affirmer qu’à la lecture de plusieurs articles, elle n’en « a[vait] pas eu le sentiment ».
Prenons un bref échantillon des articles parus à la suite de la disparition : une glorieuse (sic) presse féminine relaie ici la thèse (elle-même relayée par Ouest-France), selon laquelle le jeune garçon, qui, on cite : « aurait pu disparaître lors d’une messe noire. [Une théorie] dans la droite lignée des rumeurs persistantes sur la famille du petit garçon », se dédouane le torchon. Pas plus amicaux, les propos rapportés dans Paris Match (repris par Gala), qui évoque la famille d’Émile comme des personnes « trop calmes […] trop maîtres de leurs émotions » et « sectaires ». Guère plus sympathiques, les témoignages visant à fustiger l’attitude du père de famille lors des battues, tout en rappelant au détour de l’article les engagements politiques passés de celui-ci. L’échantillon n’est hélas, pas exhaustif…
Politique et religieux : une liaison exaltée
« Il y a un certain malaise autour de leurs convictions catholiques car ce ne sont pas des catholiques ordinaires malgré tout, d’ailleurs ils le reconnaissent », a ensuite déballé la journaliste d’un âge avancé, et d’ajouter « Ils sont liés à des organisations catholiques que l’on peut qualifier d’extrême-droite. »
Liant opportunément deux éléments pourtant distincts (l’attachement de la famille à une forme liturgique traditionnelle et les convictions politiques de celle-ci), cette assertion témoigne d’abord de la méconnaissance crasse des journalistes sur les questions ayant trait aux subtilités des liturgies chrétiennes. La journaliste évoquera la figure de « Bernard Antony », qualifié de « grande figure de l’extrême-droite catholique ». Se référer au président de l’Alliance générale contre le racisme et pour le respect de l’identité française et chrétienne (AGRIF), âgé de 79 ans, semble par ailleurs indiquer les archives assez anciennes dont dispose Mme Sauvaget (Bernard Antony a quitté le Front National au début des années 2000).
À la recherche du sensationnel
Cette assertion témoigne par ailleurs de l’absence de limites de certains journalistes lorsque sont évoquées des personnes appartenant à une famille de pensée — en l’occurrence, la droite nationaliste ou identitaire – systématiquement caricaturée pour sa ligne en faveur de la préférence française. En l’occurrence, le « Bastion social » (association pointée du doigt parce qu’elle a fait l’objet d’une dissolution politique) auquel aurait appartenu le père du jeune garçon, avait pour objet dans ses statuts « de venir en aide aux seuls démunis de nationalité française »…L’appartenance passée du père de famille au mouvement de l’Action française il y a plusieurs décennies n’apportait en outre pas grand-chose à l’affaire.
Qui est Bernadette Sauvaget ?
Bernadette Sauvaget fut un contributeur de Réforme, journal protestant d’actualité. Dirigé depuis 2022 par Jean-Marie de Bourqueney, pasteur appartenant à une frange libérale des Églises réformées, Réforme semble incarner une frange du protestantisme qui par définition constitue un « courant contestateur de la tradition dont le but est de formuler une pensée adaptée à la modernité. » Si la ligne éditoriale de cet hebdomadaire semble donc assez peu compatible avec un catholicisme traditionnel, la contribution régulière de Bernadette Sauvaget au quotidien Libération laisse par ailleurs peu de doutes pour l’affection qu’elle porte à ces mouvements. Tirant à boulets rouges sur toute figure diocésaine vaguement conservatrice (voir les articles : Messe en latin et évangélisation : Dominique Rey, l’évêque réac qui embarrasse le Vatican ou Quand l’évêque de Nanterre Matthieu Rougé participe à une université d’été d’extrême droite), elle aborde l’Église catholique presque exclusivement sous l’angle des scandales, à l’exception des articles qu’elle rédige sur le pape François dont elle semble saluer l’action.
Il est des épisodes de mauvaise foi qui prêtent, au sein d’une caste médiatique sujette à la versatilité de l’information continue, à sourire. La gravité des propos de Mme Sauvaget, qui semble oublier l’épreuve à laquelle est soumise une famille qui a vu son enfant disparaître depuis plus d’un mois et qui trouve judicieux, en bon « expert » de plateaux autoproclamé, d’en faire le procès, n’en fait pas partie.