Le sociologue canadien Mathieu Bock-Côté signait en juillet de cette année, peu de temps après l’attentat de Nice, une tribune dans le Figaro, dans laquelle il dénonçait le fait qu’« une bonne partie du système médiatique active le logiciel du déni d’islamisme après chaque attentat ».
Il expliquait que d’autres pistes que le fanatisme religieux sont souvent mises en avant comme une excuse ou comme un paravent par le « système médiatique » : la piste psychiatrique, la piste de l’exclusion sociale, la théorie de la guerre révolutionnaire.
La moindre importance donnée aux motivations religieuses des auteurs des attentats concerne aussi certains intellectuels français, comme l’a démontré Eugénie Bastié dans un article intitulé « comment les islamistes ont fracturé la vie intellectuelle ». Le journaliste Brice Couturier de son côté relatait lors d’un colloque à l’Assemblée nationale le 5 novembre dernier quelques exemples de ce déni de certains médias dans une intervention intitulée « Les médias malades de la bien-pensance ». Il cite ainsi un de ses collègues d’une radio publique qui y lit son billet chaque jour, et qui s’est vu refuser l’emploi du terme « islamiste » par l’animatrice de l’émission qu’il préparait, le mot « intégriste » semblant plus politiquement correct.
La piste psychiatrique a été largement développée par les médias, puisque maintenant nous n’ignorons rien des orientations sexuelles, apparemment contrariées, des auteurs des attentats de Nice et d’Orlando. Il suffit de faire une requête sur un moteur de recherche pour accéder aux informations dispensées sur ce sujet par de nombreux journaux et chaines de radios et de télévision.
Ainsi, le 19 juillet, une journaliste du site Slate s’interroge : « Pourquoi la sexualité de l’auteur de l’attentat de Nice n’est pas anodine ». Le même jour, BFMTV consacre un reportage à l’ « Attentat à Nice : la personnalité trouble de Mohamed Lahouaiej Bouhlel ». Après avoir certes indiqué la soudaine radicalisation du terroriste, le premier chapeau de l’article mentionne cependant « une sexualité débridée ». Le 18 juillet, le site Atlantico consacre un article à l’ « Attentat de Nice : la sexualité hors norme de Mohamed Lahouaiej-Bouhlel ». On pourrait multiplier les exemples.
La piste de l’exclusion sociale a quant à elle été souvent mise en avant dans les médias au travers notamment du récit de vie des frères Kouachi. Le site Reporterre enquête le 15 janvier 2015 sur « L’enfance misérable des frères Kouachi ». Un reportage qui semble avoir été coréalisé par Reporterre et Arrêts sur image, et repris par L’Obs. Un thème proche a été traité par Arrêts sur image dans une vidéo mise en ligne le 18 janvier 2016 intitulée « L’insurrection, si elle était là ? ».