Dossier. De plus en plus documenté par les révélations récentes de sites tels que Wikileaks ou DCleaks, le soutien financier de George Soros à tout ce qui affaiblit les notions d’État et de souveraineté est régulièrement dénoncé par les médias conservateurs américains. Dans son activisme protéiforme, le multi-milliardaire a investi massivement le champ des médias depuis longtemps, injectant dans ce seul secteur plus de 103 millions de dollars depuis les années 2000 afin de promouvoir son agenda et sa vision du monde. Cela n’a cependant pas empêché la victoire de Donald Trump, l’ennemi des médias.
Le journalisme comme levier métapolitique
Georges Soros se considérant lui-même comme un « chef d’État sans État », son intérêt pour les médias comme outil métapolitique n’est pas nouveau, il remonte même à sa prime jeunesse. Selon l’un de ses biographes, le journaliste du New York Times Michael T. Kaufman, auteur de « Soros: The Life and Times of a Messianic Billionaire », Georges Soros a toujours été fasciné par le journalisme et les médias. Jeune homme, ses centres d’intérêts principaux étaient principalement « l’histoire, le journalisme et certaines formes d’écriture ». Encore étudiant, il a ainsi été le rédacteur en chef, l’éditeur et le vendeur de son propre journal le « Lupa News » dans sa Hongrie natale.
Jamais il ne se départira de cet intérêt pour le journalisme et sa capacité d’influence sur les sociétés. Dans les années 80, il appuiera ainsi les libéraux d’Europe de l’Est en faisant parvenir des photocopieuses aux cercles d’étudiants dissidents grâce à son « Open Society Foundations » (à l’époque « Open Society Institute »). Matériel leur permettant la publication de journaux clandestins et de samizdats grâce auxquels ils purent influer sur l’opinion publique des régimes communistes finissants. Il financera ainsi des fondations et des associations dans toute l’Europe centrale dans le but de former des étudiants et de leur permettre de faire de l’agitation idéologique dans les universités comme dans la société civile afin de diffuser une autre information que celle de l’État et du parti communiste. En leur distribuant des bourses pour leur formation il s’assurera une influence majeure auprès des élites libérales une fois ces étudiants en poste après la chute du communisme.
À l’heure du numérique et de l’information en temps réel, sa méthodologie est restée la même mais adaptée aux outils de communication contemporains. Cela à une échelle bien plus vaste qu’au temps des régimes communistes. Régimes qui étaient devenus après 1945 des régimes nationaux-communistes et donc des adversaires de l’idéal politique de George Soros : une société planétaire intégrée, régie par la finance et par une société civile mondiale sans États.
Pour appréhender l’influence que Georges Soros exerce sur le paysage médiatique américain, il faut sonder autant le champ des médias de masse que celui d’internet et des médias réticulaires qui foisonnent sur la toile mondiale. L’un des objectifs de la stratégie média de l’Open Society étant justement la formation et le soutien d’une myriade de journalistes présentés comme indépendants et aptes à créer un réseau d’influence médiatique informel partout où cela est nécessaire politiquement. À un niveau local certains journalistes de ces groupes étant même inconscients de leur rôle réel en tant que maillon d’une vaste chaîne transnational de relais d’influence.
Les millions de Soros : manne infinie des médias globalistes
Non content d’avoir appuyé le parti démocrate puis la candidate Hillary Clinton pour au moins 25 millions de dollars au cours des dernières années, George Soros a surtout injecté plus de 100 millions de dollars entre 2000 et 2014 dans des groupes médiatiques proches du parti démocrate, de son agenda et de ses objectifs politiques. Ces sommes sont à mettre en perspective avec la fortune personnelle de Soros estimée à 24 milliards de dollars selon le classement Forbes.
Le seul budget officiel de l’Open Society Foundation pour l’année 2016 est de plus de 930 millions de dollars. Ses dépenses totales depuis sa création sont estimées à plus de 13 milliards de dollars pour ses 33 années d’activité. George Soros a aussi directement aidé des centaines de médias, d’associations, d’écoles de journalisme aux États-Unis et à l’étranger avec des dons allant de 5000 $ à 32 millions de dollars. Comme nous le verrons plus bas, certains de ces groupes comme « New America Media » ou le « Media Development Investment Fund » sont ainsi eux-mêmes constitués de centaines d’autres médias plus petits qui n’existeraient pas sans Soros.
Sur ces 103 millions investis dans les médias libéraux-libertaires, 61 millions financent neuf groupes médiatiques qui ont soutenu directement la candidate Hillary Clinton. Voyons de plus près certains médias du camp démocrate que finance George Soros.
Le Centre pour les rapports d’enquête — Center for Investigative Reporting (CIR)
Une ONG californienne qui promeut depuis 1977 le journalisme d’investigation et la formation au journalisme aux États-Unis, le CIR, rassemble tout un ensemble de micro-médias qui diffusent leur contenu en ligne, à la radio ou par écrit. Présentée comme une ONG à but non lucratif, elle a perçu de la part de Soros plus de 3 millions de dollars. Le CIR s’est notamment illustré en 2016 par ses attaques répétées contre Donald Trump, publiant par exemple une série d’articles et de portraits sur les donateurs et supporters de Trump présentés comme incultes et inconscients du danger de leur vote. Il a aussi une antenne en Bosnie-Herzégovine — Centar za istraživačko novinarstvo (CIN) – qui s’insère dans le vaste éventail des relais Est-européens et balkaniques des activités de Soros, du département d’État américain et de l’USAID (United States Agency for International Development).
Site internet : cironline.org
New America Media
Il s’agit ici d’un vaste réseau de médias en ligne et de journaux se présentant comme le rassemblement de « 3000 agences d’informations ethniques (sic) à travers le pays ». Cet impressionnant réseau médiatique multiculturaliste s’est spécialisé dans le lobbying visant à libéraliser la politique d’immigration aux États-Unis notamment à l’égard des latinos. Il a perçu quant à lui plus de 3 millions de dollars. Leur site est à visiter pour comprendre le projet multiculturaliste aux États-Unis, sa finalité et ses méthodes de propagation.
Site internet : newamericamedia.org
The American prospect — Perspective Américaine
Revue située à gauche du camp démocrate qui présente par exemple les conventions républicaines de la campagne de Trump comme étant des rassemblements exclusivement composés de « white-nationalists ». Elle a perçu quant à elle 1 380 000 dollars.
Site internet : prospect.org
Media Development Investment Fund (MDIF)
Comme le précise son objet social, le MDIF — fond d’investissement pour le développement des medias — est une société enregistrée à New-York comme une « not-for-profit corporation » qui investit dans « les médias indépendants à travers le monde ». Principalement dans des pays où le MDIF pense que « l’accès à des médias libres et indépendants est menacé ». Le MDIF a ainsi investi « plus de 153 millions de dollars dans plus de 100 entreprises d’information indépendantes dans 39 pays depuis 1996 ». Entre 2002 et 2014, c’est à hauteur de 32 millions de dollars que George Soros a ainsi investi dans le MDIF. Une corporation à but non lucratif qui sait manifestement où trouver ses financements.
Site internet : mdif.org
Link TV
Une chaîne télé spécialisée dans les questions sociales qu’elle traite dans une perspective libérale-libertaire. Georges Soros y a contribué à hauteur de 1 376 000 dollars.
Site internet : linktv.org
Un maillage médiatique total
Au-delà du soutien aux médias liés au parti démocrate, George Soros finance et appuie depuis des années toute une série d’associations et d’ONG médiatiques créatrices d’outils de communication contemporains aptes à propager son influence à tous les niveaux de journalisme dans toute la société : blogs, sites internet, journaux etc…
Project Syndicate
Project Syndicate est un réseau international de journaux diffusés dans le monde entier. Il est financé par l’Open Society Foundations de George Soros, la fondation Politiken, basée en Suède, et la Fondation Die Zeit — Ebelin und Gerd Bucerius, basée en Allemagne. Sur son site il se présente comme un réseau qui « produit et livre des commentaires originaux et de haute qualité à un public mondial… Nous fournissons aux médias d’information et à leurs lecteurs des analyses et des idées de pointe, indépendamment de leur capacité de paiement. Nos membres comprennent maintenant près de 500 médias — dont plus de la moitié reçoivent nos commentaires gratuitement ou à des tarifs subventionnés — dans plus de 150 pays. » Project Syndicate est pour Soros un outil particulièrement précieux pour diffuser les idées et points de vues mondialistes dans les pays où internet n’est pas encore très diffusé ainsi que pour toucher les générations plus âgées habituées à la presse papier.
Site internet : project-syndicate.org
Avaaz
La célèbre association internationale de lanceurs d’alerte peut être incluse dans les outils médiatiques des réseaux George Soros dans la mesure où elle exerce une pression médiatique dans le sens de ses intérêts. Que ce soit par exemple en lançant des campagnes internationales contre son alter-ego et concurrent : le milliardaire « conservateur » Ruppert Murdoch, propriétaire de Fox News et d’autres mass-médias réputés de droite ou bien en attaquant Donald Trump au niveau international. Notamment par ses appels répétés aux citoyens américains expatriés pour les appeler à voter depuis l’étranger pour barrer la route de Trump. On notera que Murdoch et Fox-News sont régulièrement dénoncés par la droite alternative américaine (alternative right) comme étant l’aile droite du même mondialisme que celui de Soros avec une façade néoconservatrice.
Si actuellement l’ONG Avaaz — mot qui signifie « voix » — affirme ne plus être directement financée par Soros, elle n’aurait pas pu prendre l’ampleur qu’elle a ensuite connue sans son appui dès son lancement.
Citons ici un article du journaliste américain John Hanrahan concernant Avaaz intitulé : « Duper les progressistes vers la guerre ».
« Sur une période de trois ans débutant en 2007, les fondations de Soros – soit directement soit par Res publica – ont donné à Avaaz $1.2 million au total. En 2007, l’Open Society Institute a donné $150,000 à Res Publica pour le soutien général à Avaaz et $100,000 pour son travail sur le changement climatique.
En 2008, l’Open Society Institute a encore donné un total de $250,000 à Res Publica — dont $150,000 de nouveau pour le soutien général à Avaaz et les $100,000 restants pour son travail sur le changement climatique. L’année suivante, Soros a même été plus généreux. Dans le Form 990 qu’il a rempli pour 2009, sa Fondation pour promouvoir une société ouverte (Foundation to Promote Open Society) indique (page 87) avoir donné au total $600 000 à Res Publica à l’usage d’Aavaz – $300 000 pour le soutien général et $300 000 pour sa campagne sur le climat. (…) Avaaz elle-même dit que le lien financier avec Soros a pris fin en 2009.
Site internet : avaaz.org
Free Press et la « conférence nationale pour la réforme des médias » National Conference for Media Reform – NCRM
La NCRM est un évènement important du monde médiatique américain qui a lieu environ tous les deux ou trois ans depuis 2003. Elle se revendique comme le plus grand rassemblement consacré aux médias et aux technologies de l’information aux États-Unis. Moment capital de la stratégie d’influence médiatique du parti démocrate, la session de 2011 avait réuni plus de 2500 personnes parmi les plus importantes du secteur. La conférence nationale des médias a été parrainée par un groupe appelé Free Press qui a reçu 1,4 millions de dollars de la part de Soros. Free Press a un grand objectif à l’ordre du jour : promouvoir la « neutralité du web » en préconisant paradoxalement une aide du gouvernement de 35 milliards de dollars par an pour les médias. De nombreuses personnes qui assistent ou interviennent à cette conférence ont été affiliées aux opérations financées par Soros. Free Press est l’un des outils des groupes de Soros les mieux financés car il est relié au « Centre pour le progrès américain » Center for American Progress (CAP), un influent think-tank de gauche soutenu à hauteur de 7,3 millions de dollars par George Soros.
Site Internet : freepress.net
L’université Columbia : une pouponnière d’agents d’influence
Comme résume l’un de ses biographes : George Soros est l’homme d’une mission. Et cette mission a constamment besoin de cadres et d’hommes d’influence formés à ses vues. Pour ce faire, il faut pouvoir les approcher et les orienter dès leur formation. Quoi de mieux pour cela que de nouer des liens durables avec l’une des plus prestigieuses universités américaine : l’université Columbia de New-York — « Columbia University in the City of New York ».
Fondée en 1754, elle est l’un des plus anciens établissements d’enseignement supérieur aux États-Unis. La « Columbia » comme on l’appelle, est considérée comme l’une des universités les plus sélectives et prestigieuses dans le monde. Elle est l’université comptant le plus de Prix Nobel (101) parmi ses élèves et son corps enseignant. Vingt-neuf chefs d’État, dont Obama, vingt milliardaires vivants ou encore vingt-neuf récompensés aux Oscars sont sortis de ses rangs.
L’école de journalisme de l’Université de Columbia est l’une des écoles supérieures professionnelles de l’Université de Columbia. Elle est la seule école de journalisme faisant parti de l’« Ivy League » qui regroupe les huit universités les plus prestigieuses des États-Unis. Elle est l’une des plus anciennes des États-Unis et du monde. L’école a été fondée par Joseph Pulitzer en 1912 et remet chaque année le Prix Pulitzer. Elle publie son journal, le « Columbia Journalism Review ».
Un centre de veille et d’analyse des médias américains, le « Media Research Center – MRC », a étudié en profondeur les liens existants entre George Soros et l’université de Columbia. Actif depuis 1987, ce centre a publié il y a quelques années une étude détaillée sur ces liens : « Le milliardaire George Soros a de solides liens financiers, honorifiques et personnels avec Columbia. Les fondations Open Society de Soros ont donné 9 708 486 $ à l’Université Columbia depuis 2000. 1 250 000 $ de cet argent ont été versés directement à son journal, la “Columbia Journalism Review”.
L’école a également reçu un montant supplémentaire de 1,63 millions de dollars de la très libérale “Tides Foundation”, que Soros finance aussi. Soros a également prononcé le discours d’ouverture de 2004 pour l’École des affaires internationales et publiques de Columbia. Cela fait de la Columbia la troisième école la plus financée par Soros au monde et la deuxième en importance aux États-Unis.
Soros a contribué pour plus de 400 millions de dollars au financement de collèges et d’universités dans le monde entier, incluant de l’argent alimentant la plupart des institutions importantes aux États-Unis. Ici aux États-Unis, l’argent de Soros offre les moyens aux organisations libérales (au sens américain du mot) promouvant le mariage gay, la légalisation des drogues ou les stratégies de lutte contre la peine de mort. »
L’enquête du MRC développe les autres initiatives liées à l’université que Soros alimente :
« Le “Project for Excellence in Journalism (PEJ)” est un institut de recherche affilié à la Columbia University Graduate School of Journalism jusqu’en 2006. Le PEJ est financé par les “Pew Charitable Trusts” — l’une des plus anciennes ONG américaines — qui a elle-même reçu au moins 500 000 $ en financement de Soros. »
La longue étude du MRC expose aussi comment les journalistes issus de la Columbia vont ensuite prendre place dans les médias les plus influents du pays.
« En 2012 seulement, les diplômés sont allés travailler à ABC, CBS, NBC, le New York Times, CNN, CNN Money et The Wall Street Journal. Ou bien encore Al Jazeera, Al Jazeera anglais, le Huffington Post, NPR, ProPublica, Slate et The Nation.
Les anciens élèves célèbres de l’École de journalisme incluent des vedettes de l’information comme Steve Kroft de CBS, Josh Elliot de “Good Morning America”, ainsi que des rédacteurs du Washington Post, du New York Times et du Huffington Post ainsi qu’un producteur de CNN et les anciens PDG de Newsweek et Associated Press. Avec son influence considérable, la Columbia est devenue une force pour façonner l’avenir du journalisme. Les anciens ont participé à de nombreuses organisations d’information de premier plan, mais ont souvent conservé un parti pris qui reflète celui de l’université et des donateurs de l’école. »
Une emprise de plus en plus visible et contestée
La liste des entités médiatiques soutenues financièrement par George Soros est encore longue, mais on entrevoit ici la force de frappe financière et organisationnelle de George Soros dans ce domaine. Une influence et des moyens qui donnent le vertige par les sommes investies.
Pourtant les dernières élections américaines ont montré que cette influence réussit de moins en moins à cacher certaines réalités politiques occultées. Le travail de contre influence réalisé par ce que l’on dénomme aux États-Unis la droite alternative (alternative right ou «alt-right») ou bien encore les révélations de Wikileaks et DCleaks entament la narration médiatique dominante aux États-Unis. C’est ainsi une véritable guérilla médiatique que livrent les médias alternatifs aux médias de masse libéraux. Dans cet affrontement, les médias de la droite alternative pointent régulièrement du doigt les agissements en coulisses du plus grand argentier des médias : George Soros. Et cela porte ses fruits, l’impact populaire des médias alternatifs est devenu si grand qu’Hillary Clinton l’a dénoncé publiquement cet été lors de l’un de ses discours de campagne. Proposant elle-même une théorie du complot autour d’une triangulation Trump, « alt-right » et influence du Kremlin, vision complotiste qui a pris récemment la forme d’un site internet : putintrump.org.
Un site soutenu et financé par George Soros bien sûr… mais qui n’a pas empêché la victoire de Trump.
Crédit photo : H. Boell-Stiftung via Flickr (cc)