Journaliste, expert et… repenti du libéralisme
« Ma bible, ce sont les chiffres de l’OCDE »
Né en novembre 1961 à Antony, dans les Hauts de Seine, d’une mère professeure de français et latin et d’un père directeur d’une petite entreprise dans l’industrie chimique, tous deux venus du nord de la France, François Lenglet est un journaliste économique français qui a longtemps dirigé le service France-Economie de France 2 avant d’occuper les mêmes fonctions à TF1 depuis 2018.
Il est marié depuis 1989 avec Sabine Argenti, directrice de la communication de la Fondation de France, avec laquelle il a eu quatre enfants. Il vit actuellement dans une maison de la forêt de Sénart, au sud de Paris, non loin de là où il a grandi. Discret et effacé de nature, il met un point d’honneur à ne pas tutoyer les politiques, ni à accepter de dîner en face-à-face avec eux, contrairement à nombre de ses confrères. Il est un spécialiste de la statistique macro-économique. Même s’il se situe résolument dans le camp des libéraux, François Lenglet se défend cependant de tout dogmatisme, ne jurant que sur les chiffres de l’OCDE qu’il considère comme la référence ultime en économie. Cependant, lors d’un entretien avec Benoît Aragon pour PureMédias en 2016, Lenglet reconnaît aussi utiliser d’autres sources, notamment « le site de l’INSEE allemand […], le “Financial Times” qui est le meilleur journal du monde, et les études de quelques économistes comme Patrick Artus ». Il s’est même lancé depuis 2012 dans une critique raisonnée de la mondialisation, se faisant l’avocat de la « démondialisation », thèse macro-économique initiée par le penseur philippin Walden Bello et reprise en 2012 par Arnaud Montebourg lors de la campagne des présidentielles, et se prononce désormais en faveur d’un retour au protectionnisme. François Lenglet est l’incarnation d’un certain journalisme d’expertise s’appuyant exclusivement sur les chiffres.
Formation
Contrairement aux apparences, François Lenglet est de formation littéraire et ne dispose d’aucun diplôme en économie. Scolarisé au collège Saint-Aspais de Melun puis au lycée de Montgeron, il obtiendra par la suite une double maîtrise en lettres modernes et en philosophie à l’université Paris IV-Sorbonne. L’intéressé raconte même que son sujet de mémoire à la Sorbonne portait sur l’interprétation existentialiste de la philosophie de Blaise Pascal, ce qui ne l’empêchera pas d’être considéré comme une référence médiatique dans le domaine économique. Sur le plan politique, il admet s’être réjoui à l’époque de l’élection de François Mitterrand : « C’était un moment d’enthousiasme et d’espérance incontestable, un vent de fraîcheur sur la vie politique. […] La gauche réformiste pensait pouvoir réconcilier la justice et le marché, et sublimer tout ça dans la perspective européenne. J’ai cru à ça. »
Parcours professionnel
Après avoir passé son enfance en Ile-de-France, François Lenglet débute sa carrière comme journaliste à l’Agence de presse A Jour où il travaille de 1983 à 1985. Par la suite, il devient rédacteur en chef de Minitel Magazine, organe de presse dédié à l’actualité du minitel. En 1986, il part s’installer à Shanghai, en Chine, où il exerce les activités de professeur de littérature française dans une université jésuite de Shanghai jusqu’en 1987, même s’il confesse avoir été plus attiré par la découverte de la Chine que par la perspective d’enseigner, puis de correspondant en Asie pour la presse française, notamment L’Express, de 1987 à 1989.
Contrairement à beaucoup de gens issus de sa génération, Lenglet n’a jamais manifesté aucune forme de tendresse pour le maoïsme, que ce soit lors de sa période étudiante ou au cours de son séjour en Chine.
Depuis cette époque, il parle couramment le chinois. C’est aussi de cette période que date sa passion pour l’économie. En effet, l’Asie connaissant alors un décollage économique fulgurant, il fut donc naturellement amené à couvrir les sujets économiques pour le compte des journaux qui l’employaient. De retour à Paris, il est recruté comme journaliste chargé de l’international au magazine Science et Vie Economie où il travaille de 1989 à 1991.
C’est au cours de cette dernière année qu’il entre au journal L’Expansion créé par Jean Boissonnat et Jean-Louis Servan Schreiber où il va gravir rapidement les échelons tout en se formant au contact de ceux qu’il qualifie de mentors : Gérard Moati, Henri Gibier et Bernard Guetta. C’est au sein de cette rédaction qu’il fait la connaissance d’un autre jeune journaliste économique comme lui, Emmanuel Lechypre, qu’il retrouvera plus tard sur les plateaux de BFMTV. Il se lie également d’amitié avec Vincent Giret, entré dans la rédaction en 1994, qui deviendra en 2017 le directeur de la radio publique France Info. Il devient ainsi chef du service économie en 1994 puis rédacteur en chef en 1997 et enfin directeur-adjoint de la rédaction en 1998.
En 2000, il devient directeur de la rédaction du mensuel Enjeux-Les Echos. En 2007, il publie son premier ouvrage, La crise des années 30 est devant nous (Perrin), dans lequel il porte un regard catastrophiste sur l’avenir économique de l’Occident. En 2008, il claque la porte du mensuel après suite à un désaccord avec Nicolas Beytout concernant la reprise en main du journal par Bernard Arnault (en raison d’éventuels conflits d’intérêts qui auraient pu en résulter) et rejoint le quotidien économique La Tribune, où il est recruté par son ancien collègue aux Echos Érik Izraelewicz avec qu’il s’était lié d’amitié à l’occasion des dissensions internes liées au rachat du journal. Il devient rédacteur en chef puis directeur de la rédaction de La Tribune de 2010 à 2011.
En 2010, il publie un deuxième ouvrage, La guerre des empires. Chine contre États-Unis (Fayard), tout aussi pessimiste.
En 2011, La Tribune rencontre de graves difficultés financières et il est licencié par l’actionnaire et présidente Valérie Decamp (qui avait racheté le titre à Alain Weill) après avoir opposé son véto à un nouveau plan de licenciements. Après une brève période de chômage, il devient directeur de la rédaction de BFM Business et éditorialiste économique sur la chaîne d’information en continu BFMTV. C’est à ce moment que le journaliste de presse écrite chevronné devient un habitué des plateaux et que sa visibilité médiatique s’accroît.
Dans le même temps, il officie également comme éditorialiste sur la radio RMC. Il faut dire que ces trois canaux (BFM Business, BFM TV et RMC) appartiennent à un seul et même groupe, NextRadioTV, créé en 2000 par Alain Weill, ancien directeur général de NRJ Group et actionnaire majoritaire de la Tribune avant que Lenglet n’y soit employé.
La même année, il défend sur BFM Business la sortie de l’Euro, pilier du programme de Marine Le Pen, ce qui lui avait valu d’être relayé par le site d’information frontiste NationPresseInfo. En juin 2011, il participe également à sa première édition de Des Paroles et des Actes où il apporte la contradiction à Marine le Pen (« C’était un peu comme commencer par la piste noire » selon ses termes) sur des questions monétaires, alors même qu’il avait souligné les défauts structurels de l’euro quelques mois plutôt.
Par la suite, en 2012, il plaidera également en faveur de la sortie de la Grèce de la zone Euro et critiquera les politiques d’austérité. Le 29 janvier 2012, il est invité à l’Élysée en compagnie de trois autres journalistes (Claire Chazal, Laurent Delahousse et Jean-Marc Sylvestre) pour mener un entretien avec le président de la république Nicolas Sarkozy au sujet de son programme économique alors que ce dernier est candidat à sa réélection. Le 12 avril de la même année, il interpelle dans l’émission politique de France 2 « Des paroles et des actes » le leader du Front de Gauche Jean-Luc Mélenchon sur son programme en le confrontant à des graphiques et à des chiffres censés contredire ses thèses économiques. À cette occasion, il est accusé par le journal de gauche Fakir d’utiliser des chiffres mensongers.
Le 26 janvier 2012, il reçoit dans la même émission, François Hollande, alors candidat à la présidence. En mai 2012, il devient éditorialiste occasionnel dans l’hebdomadaire Le Point. En juin 2012, il quitte ses fonctions au sein de BFM Business et de BFMTV pour devenir rédacteur en chef du service France au sein de la rédaction de France 2. En septembre 2012, il publie un nouveau livre, Qui va payer la crise ? (Fayard) dans lequel il fait notamment le constat d’un choc générationnel entre jeunes et vieux du fait de la crise. L’année suivante, en septembre 2013, il publie un nouvel ouvrage, La fin de la mondialisation, dans lequel il dresse notamment le constat de l’échec du libre-échange globalisé et prône le retour à un protectionnisme raisonné.
En octobre 2013, un article du Monde diplomatique, reproduit sur le site web d’analyse des médias Acrimed, met en cause François Lenglet, le dépeignant comme un imposteur, qui manie les chiffres de manière partisane. Par ailleurs, depuis septembre 2013, il anime une chronique économique quotidienne à 8h15 sur RTL au cours de laquelle il s’est notamment déclaré en faveur de l’assouplissement de la législation sur le travail dominical et de la réforme du régime d’indemnisation des intermittents du spectacle.
Au cours de l’émission « Des Paroles et des Actes » du 26 mai 2016 où il est opposé à Jean-Luc Mélenchon, François Lenglet tente de mettre en difficulté le leader de la France Insoumise en rappelant la tendresse dont il fait preuve pour les dirigeants bolivariens d’Amérique du Sud. Il enchaîne en pointant du doigt, à titre d’exemple, la corruption et le népotisme dont a fait preuve le président bolivien Evo Morales :
« Evo Morales, président de la Bolivie, est aujourd’hui empêtré dans des scandales de corruption considérables. […] C’est un corrompu. […] La petite amie de M. Morales, qui est la mère de son fils, a bénéficié de 500 millions de dollars de commandes publiques, allez m’expliquer que tout cela est normal ! ».
Cette déclaration ne manque pas de déclencher une légère tension diplomatique entre la France et la Bolivie. À la suite d’une lettre de protestation de l’ambassadeur de Bolivie en France, il reconnaît s’être emporté et regrette avoir utilisé « les termes que j’ai utilisés pour qualifier le président Morales, lors de ce débat télévisé pour le moins animé, n’étaient pas appropriés ».
En 2018, après six ans de bons et loyaux services, il quitte la rédaction de France Télévisions pour TF1 et s’en va rejoindre son ami et mentor, David Pujadas, victime du management expéditif et idéologique de Delphine Ernotte l’année précédente, sur le plateau de l’émission quotidienne qu’il anime sur LCI, 24h Pujadas, l’info en question.
En 2019, il publie son septième ouvrage, Tout va Basculer, dans lequel il prédit l’imminence d’une crise financière et politique qui devrait sonner le glas du cycle libéral actuel amorcé par l’ère Reagan-Thatcher, tout en insistant sur le fait que les populismes, en tant que traduction d’une demande de protection au sein des populations, sont là pour durer.
À partir de septembre 2019, il anime le nouveau magazine Lenglet Déchiffre diffusé tous les dimanches sur LCI.
Parcours militant
Non renseigné
Ce qu’il gagne
Non renseigné
Sa nébuleuse
François Lenglet est membre du Cercle des économistes, think tank réunissant une trentaine d’économistes et fondé en 1992 à l’initiative de Jean Hervé Lorenzi, qui est par ailleurs conseiller du directoire de la Compagnie financière Edmond de Rothschild depuis 2000, et membre depuis 2011 du conseil d’orientation de la Fondation Ecologie d’avenir, conseil présidé par Claude Allègre. Ce dernier a aussi été membre du Conseil d’analyse économique de 1997 à 2012. Le cercle des économistes compte dans ses rangs des personnalités aussi diverses que Dominique Roux, économiste, chef d’entreprise et père de Valérie Pécresse, Patrick Artus, directeur des études et de la recherche de Natixis ou Christian de Boissieu, économiste, membre de la commission pour la libération de la croissance française, dite « commission Attali ». François Lenglet intervient la plupart du temps en tant que journaliste modérateur lors des débats organisés par le cercle des économistes.
Par ailleurs, l’épouse de François Lenglet, Sabine Argenti, est diplômée de l’Ecole Supérieure de Commerce de Paris est a été directrice associée de l’agence de communication TBWA Corporate, 3ème groupe de communication français après Publicis et Havas depuis 2009 jusqu’en 2015, date à laquelle elle rejoint l’organisme philanthropique créé par le Général de Gaulle en 1969, la Fondation de France. Avant de rejoindre TBWA, elle avait occupé divers postes dans la communication, a été pigiste pour la presse féminine (Prima, Parents et Femina Hebdo) et a même travaillé comme directrice de la communication du syndicat CFDT en 2005. En octobre 2010, à l’occasion d’une contre-manifestation organisée par Pierre Carles devant l’Automobile Club de France, François Lenglet est filmé par des journalistes indépendants alors qu’il se rend au dîner du Siècle. Il a également été convié à l’édition 2017 du forum annuel de Bilderberg qui s’est déroulé à Chantilly, dans l’état américain de Virginie, où les membres ont abordé, entre autres les thèmes des fake news, de la montée des populismes ainsi que du virage effectué par la nouveau gouvernement Trump.
Publications
- La crise des années 30 est devant nous, Perrin, 2007
- La guerre des empires : Chine contre Etats Unis, Fayard (collection « Documents »), 2010
- Qui va payer la crise ?, Fayard (collection « Documents »), 2012
- La fin de la mondialisation, Editions Fayard (collection « Documents »), 2013
- Tant pis ! Nos enfants paieront, Albin Michel, 2016
- Tordez le cou aux idées reçues, Stock (collections «Essais-Document »), 2018
- Tout va basculer, Albin Michel, 2019.
- Quoi qu’il en coûte, qui va vraiment payer, Albin Michel, 2020
Il l’a dit
« On nous dit que c’est impossible de sortir de l’Euro, c’est évidemment des bêtises, c’est des problèmes techniques, rappelons qu’il n’y a pas si longtemps, il y a des pays comme la Tchécoslovaquie qui se sont séparés, chacun des pays a préparé une nouvelle monnaie, l’histoire monétaire est jonchée d’unions monétaires qui se font et qui se défont et c’est probablement ce que l’on va voir dans les années qui viennent ! », BFM Business, 1er novembre 2011.
« Je dirais que je pratique une forme un peu primitive de Data Journalism. Depuis que les données sont accessibles sur Internet, ça change la vie. Ma bible, ce sont les chiffres de l’OCDE que je peux avoir en ligne au lieu d’aller fouiller dans des volumes poussiéreux au château de la Muette! Le chiffre, c’est une question implicite. Mais bien sûr, le Data Journalism m’intéresse et j’ai pour ambition de faire un grand site d’Open Data économique avec BFM Business. C’est un projet en cours et j’ai d’ailleurs recruté quelqu’un pour le mener », 20 minutes.fr, 31 janvier 2012
« Si on rétablit, notamment vis à vis de la Chine, un certain nombre de protections, notre industrie pourrait redevenir compétitive. On peut imaginer que l’Industrie cesse de détruire des emplois et même qu’elle en crée », Atlantico.fr, 7 octobre 2013
« Si on rétablit, notamment vis à vis de la Chine, un certain nombre de protections, notre industrie pourrait redevenir compétitive. On peut imaginer que l’Industrie cesse de détruire des emplois et même qu’elle en crée », Atlantico.fr, 7 octobre 2013
« Sur ce sujet, il y a un décalage croissant entre la société française et ceux qui la représentent, les syndicats et les politiques. Du côté des Français, tant chez les salariés que chez les consommateurs, on souhaite plus de souplesse dans les horaires de travail des magasins, pourvu que cette souplesse soit encadrée et rémunérée. La société a changé. Et l’essor du commerce en ligne, qui évidemment ne connaît pas d’horaire, a sans doute fait bouger les mentalités. Et puis à l’inverse, dans les syndicats et les partis politiques, on s’accroche au symbole, au totem et au tabou. Et on ne veut rien changer, sinon avec des lois tellement complexes qu’elles en deviennent inapplicables », France 2, 29 septembre 2013, à propos du débat sur le travail dominical.
« Ces inégalités ont été décuplées par l’ouverture des frontières, en particulier la mondialisation financière. Pour les réduire, comme semblent le souhaiter aujourd’hui les citoyens, il faudra réhabiliter les frontières.» La Fin de la Mondialisation, 2013.
« Exactement comme au théâtre, l’actualité facétieuse prend de temps à autre la liberté de rassembler sur une même scène tous les personnages d’un drame, qui convergent pour le dénouement de l’intrigue. Ainsi, la comédie des intermittents du spectacle, refusant depuis des mois la pseudo-réforme de leur régime d’indemnisation chômage, représente à merveille le dévoiement du modèle social français. Dévoiement, ou confiscation. Ou dénaturation, au profit d’un petit nombre de personnes et d’entreprises, vivant au crochet du “cochon de payeur”, le salarié de base, muette victime d’excès honteux dissimulés sous l’apparence trompeuse du soutien à la culture. », Le Point ‚19 juin 2014.
« Je le serais plutôt maintenant (marxiste, ndlr). En tout cas, les clés d’explication marxistes me semblent reprendre une certaine actualité, que ce soit dans l’analyse de la propriété du capital ou le retour d’une certaine lutte des classes. », Charles n°24, Hiver 2018.
« Je ne suis probablement pas tout à fait homogène au plan idéologique. Je peux être libéral pour l’analyse du marché des biens et des services, où je considère qu’il faut de la concurrence. Je peux l’être aussi sur certains aspects du marché du travail. À l’inverse, sur tout un tas de sujets, je ne serai pas du tout libéral. Notamment sur le commerce international ou sur la monnaie. Le libre-échange n’est pas la meilleure des solutions à tous les problèmes et à toutes les situations. Je pense qu’il faut être pragmatique. Quand on a intérêt à être libre-échangiste, il faut l’être. Et quand on n’a pas intérêt à l’être, notamment quand on commerce avec la Chine, qui tient les deux bouts de la ficelle − puisqu’elle fait à la fois des t‑shirts et des avions −, il faut être vigilant. », Charles, Hiver 2018.
« Sa politique (Macron, ndlr) est effectivement tout à fait à contretemps des attentes dominantes. J’en veux pour preuve son évolution spectaculaire sur l’Union Européenne : entre le discours de la Sorbonne, qui s’inspirait de la vision des seconds pères fondateurs des années 80–90 (intégration, fédéralisme) et la Lettre aux Européens dix-huit mois plus tard, où il insiste sur la dimension des frontières extérieures de l’Europe, le ton est complètement différent et semble plus en phase avec ce qu’attendent les Européens », entretien filmé avec Nicolas Beytout sur le site de l’Opinion, le 2 avril 2019.
« L’idée même de marché fait de vous un être calculant et solitaire. Tous les rapprochements, toutes les interactions sociales sont aujourd’hui arbitrées par le marché, par le jeu de l’offre et de la demande. Cela conduit mécaniquement à un sentiment de solitude très profond, qui n’est pas seulement physique, mais aussi philosophique et politique. Le succès des mouvements populistes vient du fait qu’ils se battent contre cela. Il y’a évidemment quantité de régimes populistes, mais qui ont tous, me semble-t-il un point commun : ils entendent mettre des limites au libre jeu du marché et récusent l’idée d’une société où l’homme est seul face au capital. », Eléments n°179, juillet 2019.
« Au fond, la demande politique a changé de manière subreptice et les élites ne s’en sont pas rendu compte, pour de bonnes et de mauvaises raisons. La mauvaise raison, c’est évidemment que l’ordre actuel leur convient très bien. Et, tandis que la demande de protection monte, les seuls qui répondent à cette demande sont les populistes. Mécaniquement, les forces populistes doivent donc progresser davantage et faire bouger le jeu politique traditionnel. À un moment, les partis politiques traditionnels vont bien être obligés de s’adapter. », Éléments n°179, juillet 2019.
« En principe, l’inflation redistribue toujours les revenus, la plupart du temps en pénalisant ceux qui vivent de la rente, retraités ou épargnants, ou encore détenteurs du capital, parce qu’elle érode la valeur de la richesse accumulée. À l’inverse, elle favorise plutôt ceux qui se sont endettés, parce qu’elle fait fondre la valeur du stock de dette accumulé. L’inflation atténue le poids du passé, qu’il soit positif ou négatif. Un monde sans inflation est donc favorable au capital, alors qu’un monde inflationniste ne l’est pas. » Le Figaro, Un monde sans inflation favorise le capital, 1er novembre 2021.
Ils l’ont dit
« En réalité, ce choix d’introduire dans le panel des interviewers un journaliste spécialisé est une illustration supplémentaire de l’importance prise par l’économie et la finance dans la politique. Du coup, les princes du métier découvrent effarés que l’économie peut être abordée sous un angle plus technique que politique. Car Lenglet est un technicien. Il a piloté le magazine Enjeux-Les Échos, avant de diriger La Tribune pour finalement prendre la tête de BFM Business. Il appartient donc à l’univers de la presse spécialisée située légèrement en dessous, dans l’aristocratie médiatique, des figures des quotidiens et hebdomadaires dits généralistes (Le Figaro, Le Monde, Libé, L’Obs, Le Point, L’Express, Marianne, etc.) et des pointures de la radio et de la télévision », Aliocha, Marianne.net, 1er février 2012
« Si deux et deux font toujours quatre, il existe en effet plusieurs façons de manier l’arithmétique. La première relève d’une démarche scientifique : on avance une hypothèse, on rassemble des données, et on parvient soit à la validation de l’hypothèse, soit à une indétermination — auquel cas la réflexion doit être affinée. L’autre méthode consiste à partir d’une idée préconçue, et à organiser les données de façon à en suggérer la confirmation par les « faits ». Ce type d’acrobatie statistique a désormais un expert : François Lenglet, directeur du service « France » de France 2. Sous ses airs de Monsieur Loyal, l’ancien professeur de littérature, passé par plusieurs rédactions de médias économiques (L’Expansion, La Tribune, Les Echos, BFM) avant de devenir le chroniqueur-vedette de l’émission « Des paroles et des actes », sur France 2, durant la campagne présidentielle de 2012, incarne la capacité du pouvoir à se régénérer en donnant l’illusion du changement », Jean Gadrey et Mathias Reymond, Le Monde diplomatique, mars 2013.
« Spécialiste des questions économiques, il a donc décidé de se mettre au service d’une initiative du « monde de l’entreprise » et de répondre à cette épineuse question : « Faut-il à tout prix réindustrialiser la France (si jamais elle s’est désindustrialisée !) ou faut-il tout miser sur les services de plus en plus qualitatifs et laisser d’autres pays produire compte tenu de leurs coûts plus bas ? » (sic) [1]. Coût de la prestation : 8 500 euros hors taxes, financés en partie par de l’argent public.On peut donc s’interroger sur le respect de la déontologie par un journaliste-essayiste qui met à profit sa réputation acquise grâce au service public pour engranger plusieurs milliers d’euros de bonus, le tout en prodiguant ses conseils au secteur privé… », Henri Maler et Julien Salinge, Acrimed, 21/10/2014.
« Dans ce sens, Monsieur Lenglet se permet d’aller trop loin et signale clairement sans aucun fondement ou preuve, que le Gouvernement bolivien et son président sont soumis à la corruption. En aucun cas, nous ne pouvons accepter que la liberté de parole soit utilisée pour dénigrer un président, ce qui constitue une agression à tout son peuple », Lettre de S.E.M Jean Paul Guerrera Avila, Ambassadeur de Bolivie en France, adressée à France Télévision le 27 mai 2016.
« François est un peu hanté par l’idée de la crise, il est toujours à la recherche de la prochaine, c’est son côté un peu sombre et anxieux », Vincent Giret, directeur de France Info, cité dans Charles n°24, Hiver 2018.
« Je ne l’avais jamais rencontré, mais je le lisais dans La Tribune. Quelque chose m’avait frappé dans sa capacité à rendre comestibles des choses complexes. Dans notre jargon, on appelle ça le “TCI”, le Taux de crédibilité immédiat à l’antenne. C’est injuste, mais certains l’ont et d’autres pas. François avait ça. En plus, c’était un synthétiseur, un vulgarisateur de génie doté d’une grande culture. […] Il me manque, parce que nous avions des échanges plusieurs fois par semaine. On fait quand même ce métier pour la stimulation intellectuelle. J’ai une grande reconnaissance pour lui. On ne rencontre pas trente-six fois des personnes comme ça dans ce métier, qui nous enrichissent. » David Pujadas, cité dans Charles n°24, Hiver 2018.
« Il a su prendre la succession de Jean Boissonnat, qui était le pape du journalisme économique à son époque, et de François de Closets. François a réussi à être le continuateur de tout ça. » Nicolas Beytout, cité dans Charles n°24, Hiver 2018.
« Les journalistes qui ont une formation économique ont tendance à se transformer en économistes. Ça, Lenglet ne le fait pas. Il ne sort pas de son couloir.», Éric Heyer, directeur du département Analyse et prévision de l’OFCE (Observatoire français des conjonctures économiques), cité dans Charles n°24, Hiver 2018.