Placé en liquidation judiciaire le 17 novembre, l’hebdomadaire Le Nouvel économiste (DSH 2013–2014 : 12 901 exemplaires) continue néanmoins à paraître. La société a obtenu une poursuite d’activité. Henri Nijdam, le directeur de la publication, a trois mois pour trouver un repreneur. Il discute avec plusieurs acteurs des médias, dont le copropriétaire de Libération, Bruno Ledoux, pour céder le journal.
Avec quatre millions d’euros de passif, Les publications du Nouvel économiste SA ont été contraintes de mettre un genou à terre. Il s’agit pour les deux tiers (trois millions) de dettes sociales, Urssaf et TVA essentiellement, que la société est incapable de rembourser sur trois ans, faute de cash-flow. Le Nouvel économiste subirait aussi les coûts liés à la restructuration de son modèle économique à partir de 2012. Le titre a mis en place une organisation privilégiant le numérique. Ce qui lui a permis de supprimer la moitié de ses effectifs en deux ans, soit une quinzaine de poste sur 30. La réorganisation porterait plutôt ses fruits, puisque les pertes, qui étaient d’1,1 million d’euros en 2012, auraient été ramenées à 200 000 euros en 2014. Le chiffre d’affaire aurait lui progressé de 10% en 2014 à 4,1 millions d’euros.
Pour autant, la situation du Nouvel économiste reste précaire. D’une part, son positionnement éditorial, exclusivement tourné vers les décideurs, n’a pas prouvé son efficience sur un créneau très concurrentiel. La diffusion papier a encore perdu 7,6% sur l’exercice 2013–2014. En son sein, les abonnements ont reculé de près de 25%, compensés seulement en partie par les versions numériques. Ces derniers ont augmenté de 4,6%. Dans les faits, c’est surtout l’explosion (+36,4%) des ventes par tiers (Compagnies aériennes, hôtels, taxis, etc). qui a permis de limiter la casse. Le site lenouveleconomiste.fr (284 000 VU en octobre, selon l’éditeur) est désormais au centre du dispositif de reconquête de lectorat du Nouvel économiste. Son espace freemium, réservé aux abonnés, cohabite avec une large partie gratuite.
C’est dans ce contexte que le co-actionnaire d’Henri Nijdam depuis 2004, Jacques Abergel, l’ex patron de la société d’affichage Giraudy, ne semble plus décidé à mettre au pot. Car si la dette sera apurée grâce à la mise en liquidation, des investissements conséquents sont nécessaires pour relancer Le Nouvel économiste. Bruno Ledoux, qui détient la majorité du capital de Libération, aux côtés de Patrick Drahi, pourrait être ainsi le nouveau chevalier blanc du journal. Depuis sa création en 1976, le titre est passé de mains en mains. Lagardère l’a vendu en 1992 à Henri Nijdam, qui l’a ensuite cédé. Georges Ghosn puis Paul Dubrulle et Gérard Pelisson l’ont détenu avant que Jacob Abbou (Le Journal de l’automobile) ne le reprenne. Ce dernier a lui-même vendu Le Nouvel économiste en 2004 au trio Abergel / Fetoux/ Nijdam. Ces changements d’actionnaires à répétition ne donnent manifestement pas le tournis à Bruno Ledoux qui ajouterait ainsi une seconde brique à l’empire de médias dont le millionnaire rêve. Même déclinant, Le Nouvel économiste, et son Prix du manager de l’année, reste de surcroît, une très belle marque de presse.