Après l’annonce erronée de la mort de Martin Bouygues, l’Agence France Presse s’est confondue en excuses et a annoncé qu’une enquête interne serait ouverte pour que cette « erreur inacceptable » ne se reproduise plus.
Samedi après-midi, à 14h27 précisément, l’agence publiait une alerte stipulant : « Martin Bouygues est décédé samedi matin dans sa résidence de l’Orne (mairie). » Et l’AFP d’ajouter que le décès était survenu « à l’âge de 62 ans, dans sa résidence de La Roche Mabile, près d’Alençon (Orne), a‑t-on appris auprès du maire de la commune voisine de Saint-Denis-sur-Sarthon ». Aussitôt, les réseaux sociaux se sont emballés et de nombreux médias, dont TF1, propriété de Bouygues, ont repris l’information.
Exemple parmi d’autres, l’éditorialiste Jean-Michel Apathie faisait état du décès sur son compte Twitter, vantant au passage les mérites d’un « grand industriel ». Seulement voilà… À peine une trentaine de minutes plus tard, les groupes TF1 et LCI démentaient l’information. « URGENT INFO @LCI @TF1 : La direction de @TF1 dément la mort de Martin Bouygues », ont-ils publié sur Twitter. « J’ai eu Martin Bouygues il y a dix minutes. Il va bien et est surpris par cette annonce », ajoutait Catherine Nayl, directrice générale adjointe à l’information du groupe.
URGENT INFO @LCI @TF1 : La direction de @TF1 dément la mort de Martin Bouygues @GroupeBouygues @Bouygues_C @bouyguestelecom
— LCI (@LCI) 28 Février 2015
Que s’est-il passé ? En réalité, il s’agirait d’un terrible malentendu. Les pompiers sont bien intervenus à La Roche Mabile pour un décès ce samedi, mais pas pour celui de l’industriel, qui ne s’y trouvait même pas. Contacté par l’AFP, le maire de la commune voisine a alors confirmé le décès mais a expliqué ensuite avoir été piégé. « Il y a bien un monsieur Martin qui est mort ce matin, mais ce n’est pas Martin Bouygues. Le journaliste m’a parlé de cette mort et j’ai confirmé que Monsieur Martin était décédé. Il y a une erreur phénoménale car on ne m’a pas parlé de Martin Bouygues. C’est une surprise totale, en réalité je me suis fait piéger. (…) Je suis navré d’une telle confusion. (…) Confusion de nom quoi », a expliqué l’élu à francetv info. Quoi qu’il en soit, l’AFP aura attendu 57 minutes (à 15h24) pour démentir sa propre information. « La direction de TF1 dément la mort de Martin Bouygues », a annoncé l’agence. À 15h39, une nouvelle dépêche de l’agence Reuters publiait également le démenti. Par la suite, l’AFP a présenté ses excuses en publiant sur Twitter : « Martin Bouygues : toutes les excuses de l’AFP pour cette terrible erreur. » Le PDG lui-même, Emmanuel Hogg, s’est fendu d’un message : « Nous présentons à Martin Bouygues et à sa famille nos plus sincères excuses pour cette faute inacceptable. »
Martin Bouygues : toutes les excuses de l’AFP pour cette terrible erreur
— Agence France-Presse (@afpfr) 28 Février 2015
« Sur la base d’une première alerte obtenue par un journaliste de l’agence, l’AFP avait tenté d’obtenir des confirmations. L’information erronée a ensuite été diffusée sur la base d’un malentendu avec un élu local », a expliqué l’agence. Un malentendu qui n’aurait pas pu avoir lieu sans « une série de dysfonctionnements qui sont à l’origine de l’erreur », et c’est pourquoi la direction ne compte pas en rester là.
Le jour-même, celle-ci annonçait l’ouverture d’une enquête interne dans le but de « comprendre comment une telle faute a pu être commise ». « Nous sommes habitués à la pression, nous pesons chaque mot et recoupons toujours nos infos sachant que nous sommes repris partout », a rappelé un journaliste AFP, une agence mondialement sollicitée qui publie 5.000 dépêches par jour.
Outre les dysfonctionnements éventuels de l’entreprise, c’est surtout la réelle dépendance des médias d’information à l’égard de l’AFP qu’il convient de relever. À l’heure de l’internet et de l’information en continu, les sites des grands médias se retrouvent dans l’obligation d’alimenter leurs colonnes en permanence, au risque de se retrouver parfois à annoncer des morts qui n’ont pas eu lieu…
Voir également notre dossier « L’affaire Gourevitch, ou le pouvoir sans partage de l’AFP »
Crédit photo : DR
L’incroyable boulette de l’@afpfr sur la fausse mort de #martinbouygues http://t.co/5OX6ClQtUz via @ojim_france pic.twitter.com/QEtfpRUb8h
— Claude Chollet (@ClaudeChollet) 3 Mars 2015