Un journaliste d’Orléans, employé dans un média on ne peut mieux pensant, nous a rapporté une petite anecdote qui en dit long sur la santé du journalisme français.
Cela se passe le 6 mars peu après 18 heures 30. À la nouvelle permanence du FN, rue de Gaucourt, Marine le Pen répond depuis une demi-heure aux questions des journalistes avant d’aller animer une réunion privée avec 300 militants et sympathisants des environs. Il y a dans la salle presque toute la presse du cru et les correspondants de plusieurs médias nationaux dont RTL et l’AFP. Soit une quinzaine de journalistes.
Il y a aussi un jeune journaliste indépendant, qui après plusieurs questions d’ordre général posées par plusieurs journalistes, parvient à caser une question sur la position du FN quant aux dépenses de fonctionnement des collectivités, puis une autre sur la réforme des régions. Ses confrères embrayent sur les propos anti FN de Manuel Valls et demandent son opinion à Marine Le Pen.
Rebondissant sur une phrase de la présidente du FN brocardant la politique menée par l’Europe au détriment des nations, le journaliste indépendant lui demande son avis sur deux sujets où la politique européenne ne correspond pas, selon lui, à l’intérêt de l’économie française : les sanctions russes et le futur traité de partenariat avec les États-Unis (TTIP) dont la principale conséquence sera de lever les barrières douanières qui empêchent les produits américains d’inonder le marché français. Le journaliste indique que le sujet inquiète beaucoup les agriculteurs, notamment dans la région Centre Val de Loire, qui est une grande région agricole et l’un des greniers à blé de la France.
Marine le Pen répond en évoquant les conditions anti-démocratiques dans lesquelles le TTIP est négocié et le journaliste s’apprête alors à poser une troisième et dernière question sur le sujet mais c‘est alors que l’ensemble des journalistes présents dans la salle lui coupent la parole… le plus déchaîné étant le correspondant de RTL, qui ferme sans façon le bec à ce journaliste sans carte de presse !
C’est vrai que l’heure tourne et que les journalistes présents veulent interroger Marine le Pen sur des sujets de la plus haute importance. Lesquels ? Madonna, et ses propos sur le chef de file du FN. Cukierman, qui la trouve personnellement irréprochable. Ou encore les relations entre le FN et la Ligue du Nord…
Moralité : entre le sauvetage de l’agriculture française et Madonna, les journalistes français choisissent comme un seul homme et sans douter un seul instant… Madonna. À se demander si un tel sens des priorités nécessite vraiment d’avoir une carte de presse…
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