Le joker du week-end
« Ce métier est une chance. Je suis payée pour me cultiver et rencontrer des personnalités exceptionnelles. À moi de les comprendre et de les faire découvrir aux téléspectateurs. » Audrey Crespo-Mara, à l’Association des diplômés de Sciences Po Toulouse, le 7 mars 2013.
Auparavant journaliste de seconde main, Audrey Crespo-Mara est devenue progressivement, par la force des choses, une « femme de », celle de Thierry Ardisson, avant de toucher le grand public en devenant le joker de Claire Chazal aux journaux du week-end sur TF1.
Née en juillet 1976 à Meaux et issue d’un milieu modeste, elle est l’une des figures de LCI, où elle mène de nombreux entretiens, exercice qu’elle apprécie particulièrement. À l’antenne, elle désire « transmettre une impression de tranquillité, de bienveillance », ce qui n’est cependant pas toujours confirmé par ses interlocuteurs…
Formation
En 1997, elle sort diplômée de l’Institut d’études politiques (IEP) de Toulouse, où elle apprécie particulièrement les cours de l’historien Jean Rives et ceux de l’économiste Bernard Maris. Elle se dirige alors vers le Centre de Formation des Journalistes (CFJ) de Paris. Pour réussir, elle confie « dévorer » Le Monde trois heures par jour. Elle obtient son diplôme en 1999. Durant ses études, elle effectue des stages, notamment à Radio France Toulouse, France Inter, TF1 et France 2.
Parcours
TF1 la cueille dès sa sortie du CFJ, en mai 1999. Elle intègre alors la rédaction de la première chaîne d’Europe et, pendant 8 ans, réalise des reportages sur des sujets sociétaux et économiques pour les journaux télévisés de 13h00 et de 20h00. En septembre 2007, après avoir passé un casting interne pour remplacer Claire Chazal au 20 heures, et « tapé dans l’œil » de Robert Namias, elle est transférée sur LCI, filiale de TF1, où Jean-Claude Dassier lui confie la présentation de « LCI Matin » aux côtés de Jean-François Rabilloud. « Il (Namias, NDLR) a décroché son téléphone, et a appelé son ennemi intime, Jean-Claude Dassier, pour lui demander de me recevoir. Dassier a regardé les vingt premières secondes de mon essai, et m’a engagée », confiera-t-elle plus tard.
En parallèle, elle assure à partir de janvier 2007 des directs sur TF1 lors d’événements importants, comme par exemple les obsèques de l’abbé Pierre en 2007 ou les 20 ans de la chute du mur de Berlin en 2009. En septembre 2009, elle anime « Demain à la une » sur LCI, tout en conservant « LCI Matin ». Cette émission hebdomadaire, qu’elle animera durant 4 ans, lui permettra de recevoir des personnalités pour de longs entretiens.
Elle arrête, non sans émotion, la présentation de « LCI Matin » en juillet 2011. Dès la rentrée, elle anime « L’interview d’Audrey Crespo-Mara » du lundi au jeudi à 11 heures, dont le principe consiste à faire hiérarchiser les titres de l’actualité par l’invité du jour. Ses entrevues avec des politiques (exercice qu’elle n’apprécie guère) donneront parfois lieu à des tensions, comme par exemple avec Rachida Dati, interrogée sur ses chaussures, où Éric Zemmour, questionné sur les commentateurs de son livre.
Toujours dans le domaine des entretiens, elle présente « Parlons-en ! » à partir de septembre 2013, puis « Vue sur la planète », une émission sur l’écologie diffusée chaque mercredi, ainsi que « Dans nos quartiers », une émission visant à porter un « autre regard » sur les banlieues, chaque jeudi.
En 2014, elle anime les soirées électorales de LCI en compagnie de Michel Field. Enfin, à l’été 2015, préférée à Bénédicte Le Chatelier et Frédérique Agnès, elle devient le « joker » de Claire Chazal pour les journaux du week-end sur TF1 en remplacement d’Anne-Claire Coudray, partie en congé maternité.
Après le départ de Claire Chazal, elle reste le joker du JT du week-end, désormais assuré par Anne-Claire Coudray.
Elle prend ses quartiers à Europe 1 en 2018. Pendant un an, elle est en charge de l’interview politique de la matinale à 8h25, cinq jours par semaine. Elle est licenciée à l’issue de cette première année et manifeste une certaine amertume à l’endroit de la direction de la radio : « Ils veulent tout changer apparemment, comme chaque année. »
La journaliste obtient gain de cause face à Isadora Duncan, pseudonyme de Marc Rylewski, l’autoproclamé « journaliste gilet jaune » qui interpellait des personnalités sur la voie publique en les filmant avec son smartphone. Laurent Ruquier ou Éric Zemmour étaient sortis de leurs gonds dans des vidéos qui ont totalisé plusieurs centaines de milliers de vues. Celui-ci est interpellé le 7 mai, puis condamné le 4 décembre 2019 à dix mois de prison avec sursis, 5 000 euros d’amende, ainsi qu’à deux ans de mise à l’épreuve et une interdiction d’entrer en contact avec la journaliste. La femme de Thierry Ardisson avait auparavant laisser éclater sa colère dans un des nombreux entretiens pirates de l’ancien paparazzi : « Vous êtes épuisant, ça fait trois semaines que vous me harcelez en bas de chaque endroit où je suis ».
Vie privée
Mère de deux enfants, Lamine et Sékou, elle est, depuis novembre 2009, la compagne de Thierry Ardisson, qu’elle a épousé en juin 2014. La journaliste avait tapé dans l’œil de l’animateur lorsqu’elle officiait à LCI. Lors de l’annonce de ce mariage, la presse féminine s’était réjouie de voir les deux tourtereaux abandonner leur famille respective pour vivre leur « coup de foudre ». Public par exemple écrivait : « Par amour pour elle, l’homme de télé de 64 ans a quitté sa femme Béatrice, la mère de ses trois enfants, avec qui il était mariée depuis 22 ans. Et de son côté, Audrey a elle aussi divorcé de l’homme avec qui elle a eu deux enfants, afin de pouvoir vivre pleinement cette passion dévorante. »
Début septembre 2015, Le Canard enchainé ironise sur Jean-Marc Morandini qui a passé l’été à flatter la présentatrice, tout en sachant qu’il lui fallait l’autorisation de son mari pour relancer une émission sur NRJ 12 dont celui-ci détenait les droits…
Ce qu’elle gagne
Non renseigné.
Elle l’a dit
« Je viens d’un milieu modeste. Mon père a été moniteur d’auto-école, ma mère coiffeuse. Ils se sont sacrifiés pour nous permettre de partir en vacances, de faire de longues études. Mon frère est aujourd’hui médecin, moi journaliste après avoir fait Science-Po Toulouse et le CFJ. Je leur dois beaucoup », Elle, juillet 2015.
« Il faut accepter les règles du jeu. Quand vous passez à la télé et que vous êtes une femme, ça compte. Ils n’achètent pas des mannequins, on est loin d’être des mannequins, mais ça compte, surtout quand vous réveillez les gens. Les gens ont envie de se réveiller avec des gens agréables à regarder », L’Express, 18 avril 2013.
« Franchement, les politiques c’est pas ma came. Je n’y prends aucun plaisir. Des émissions où je fais des politiques, je n’en sors pas nourrie. J’ai même l’impression d’en ressortir appauvrie. Les questions qu’on leur pose, ils n’y répondent jamais. Ils n’ont pas un discours vrai, c’est ce qui leur porte préjudice aujourd’hui », L’Express, 18 avril 2013.
« Depuis trois ans, il (Thierry Ardisson, NDLR) m’apporte beaucoup, même si je me suis construite sans lui », L’Express, 18 avril 2013.
« Une chose qu’il (Thierry Ardisson, NDLR) m’a apprise ? Intéresse-toi à l’enfance de tes invités ! Et, j’aime apprendre tout sur la vie de ceux que j’interviewe, c’est la même démarche qu’ils soient au Canal St-Martin ou à l’Académie Française. Connaître les ressorts de leur passé pour comprendre ce qu’ils sont aujourd’hui », Gala, 9 juillet 2014.
« J’ai été en stage de notoriété avec lui! (Rires.) Sincèrement, si ce qui peut m’arriver cet été ressemble à ce que vit Thierry, je n’ai aucune raison de m’angoisser… Les gens sont tellement bienveillants avec lui. Et puis, si on ne veut pas être reconnu dans la rue, il ne faut pas faire ce métier », Le Figaro, 25 juillet 2015.
« Il a fallu qu’une amie journaliste me pousse pour que je m’inscrive au casting (de TF1, NDLR) », Association des diplômés, Sciences Po Toulouse, 7 mars 2013.
« Pendant quatre ans, je me suis levée à 2 heures du matin… Loin de moi l’idée de me plaindre, mais je voulais voir grandir mes deux enfants, âgés à l’époque de 2 et 5 ans. Au bout de quatre ans, entre la matinale et une émission le week-end, j’étais épuisée », Association des diplômés, Sciences Po Toulouse, 7 mars 2013.
« Ce métier est une chance. Je suis payée pour me cultiver et rencontrer des personnalités exceptionnelles. À moi de les comprendre et de les faire découvrir aux téléspectateurs », Association des diplômés, Sciences Po Toulouse, 7 mars 2013.
« LCI a une belle image, ce qui nous permet de recevoir des invités prestigieux comme Simone Veil ou Salman Rushdie », Association des diplômés, Sciences Po Toulouse, 7 mars 2013.
« Tout savoir de l’invité me permet ensuite d’avoir la liberté de lui poser toutes les questions que je veux ! », Association des diplômés, Sciences Po Toulouse, 7 mars 2013.
« Passer du temps avec les exclus m’a donné l’illusion d’être utile. Je suis restée en contact plusieurs années avec certains d’entre eux (SDF du canal Saint-Martin, NDLR), des gens brisés dès l’enfance la plupart du temps. Ma passion de l’interview date de là… », Association des diplômés, Sciences Po Toulouse, 7 mars 2013.
« L’antenne ne m’intéressait pas du tout, je voulais vraiment être sur le terrain. Vers la fin, j’ai notamment passé un temps infini, pendant l’hiver 2006, avec les Sans-abris dans leurs tentes rouges sur les bords du Canal Saint-Martin », Gala, 9 juillet 2014
« Je travaille beaucoup avec la rigueur que m’ont apprise quinze ans de danse classique », Gala, 9 juillet 2014
« À la fin de l’entrevue, il m’a serrée dans ses bras en pleurant et en me remerciant, il n’avait pas été touché comme ça depuis longtemps, un très beau moment » (à propos de Michel Houellebecq), Gala, 9 juillet 2014
« Je suis tellement exigeante avec moi-même que je suis rarement satisfaite. S’il m’arrive de ne pas rebondir comme je l’aurais aimé sur une réponse, je ne vais retenir que ça, ça va me miner », Gala, 9 juillet 2014
« TF1 m’a choisie à la sortie de l’école, puis m’a aidée à évoluer. Pourquoi la trahirais-je? Chaque fois que j’ai eu des propositions externes, la direction m’a demandé de lui faire confiance. Aujourd’hui, je constate que j’ai eu raison de l’écouter », Le Figaro, 25 juillet 2015
Ils l’ont dit
« En 2007, elle s’est retrouvée à animer la matinale sur LCI grâce à Jean-Claude Dassier, alors vice-président de la chaine. Et c’est avec une remarque (très) sexiste que l’homme lui a proposé le poste de présentatrice. « Selon lui, une fille fraîche qui sentait le savon était faite pour le matin tandis qu’une fille plus sensuelle sentant le sexe avait davantage sa place le soir. C’était dit avec plus d’élégance, je caricature évidemment », Voici, 28 décembre 2019.
« Vous êtes une femme, mais je ne comprends pas que vous puissiez être complice de ces bassesses. D’abord, ce ne sont pas les marques que vous avez indiquées. (…) Pourquoi vous ne faîtes pas ça avec Madame Lagarde, Michèle Alliot-Marie ou avec Roselyne Bachelot ? Ne vous abaissez pas à ça. J’ai fait un discours sur le travail et sur le mérite. J’ai travaillé toute ma vie. Tout ce que j’ai, je l’ai gagné par mon travail. Ni plus, ni moins. Donc ce genre de procès d’intention, ça va ! » Dati, après une question sur les chaussures qu’elle portait, 6 mars 2012
« Vous me posez la même question qu’on me pose depuis deux mois (…) Vous êtes tous formatés pour ça. Vous n’avez qu’une seule question: le Front national. On vous donne un livre de 540 pages. Vous faites semblant de le lire », Éric Zemmour, LCI, 4 novembre 2015
« Vous me faites de la peine. On m’avait dit que vous étiez plus futée que les autres, mais vous êtes comme les autres. C’est assez lamentable pour vous. Vous posez des questions stupides et banales ! », Éric Zemmour, LCI, 4 novembre 2015
« Elle regrette de voir certaines journalistes réduites à lire des prompteurs. “Sois belle et tais-toi”, très peu pour elle », Association des diplômés, Sciences Po Toulouse, 7 mars 2013
« La journaliste serait, par ailleurs, à l’origine de la récente réconciliation entre son mari et Marc-Olivier Fogiel », Le Figaro, 24 avril 2015
« Quand on est en face de vous, on a l’impression d’être la personne la plus importante au monde », Jean d’Ormesson
« Je suis très fan d’Audrey Crespo-Mara et de Jean-François Rabilloud, le duo qui présente la Matinale de LCI. Pros, bronzés, et toujours souriants… Il doit y avoir un truc entre eux ! », José Garcia, Elle, 3 février 2012
Crédit photo : capture d’écran vidéo L’Express via Youtube (DR)