[Première diffusion le 16 juin 2016] Rediffusions estivales 2016
Un musulman commet un épouvantable massacre au nom d’Allah aux États-Unis ; en France, c’est la droite catholique qui est attaquée… L’aveuglement est à son comble. La plupart des médias ne peuvent pas voir la séquence historique que nous vivons, et ne la verront jamais. Leur monde s’écroulerait dans la seconde.
Après la tuerie d’Orlando, qui a vu un musulman abattre 50 personnes dans un club gay, il fallait bien trouver un coupable idéologiquement plus proche de l’ennemi que désignent sans relâche la plupart des médias. Si beaucoup de médias ont parlé d’acte terroriste, car c’en est évidemment un, certains s’indignent de voir la dimension « homophobe » de cette attaque occultée… au point de désigner la Manif pour tous et « l’extrême-droite » comme les véritables coupables !
Que n’aurait-on pas entendu si cette tuerie avait été commise par un extrémiste blanc. Partout les tribunes auraient fleuri pour dénoncer la violence de l’« extrême-droite », la résurgence des heures les plus sombres, etc. Seulement voilà, l’attentat est l’œuvre d’Omar Mateen, un musulman d’origine afghane ayant prêté allégeance à l’État islamique. Si le profil n’est pas très « bankable », les médias n’ont pu globalement que constater le caractère terroriste de l’attaque.
Mais cela n’était pas suffisant. Pour beaucoup de militants LGBT, repris par de nombreux médias, le mot « gay » était le grand absent des unes de quotidiens. Voyez-vous, insister sur l’acte conduit inévitablement à se tourner vers son auteur : un islamiste. Alors que s’intéresser à la cible permet de se concentrer uniquement sur l’homophobie, au sens le plus large possible, quitte à amalgamer quelqu’un qui hait les gays au point de les massacrer et quelqu’un qui souhaite simplement que cette homosexualité ne vienne pas chambouler les institutions au point de « changer de civilisation », comme le disait Christiane Taubira elle-même…
« La violence dont nous sommes les témoins, démontre que la haine homophobe et transphobe peut être aussi un prélude aux massacres de masse », explique ainsi Nicolas Rividi, militant LGBT, dans une tribune sur le site du Huffington Post. Pour lui, qui s’est fait un devoir de remonter aux « racines de la haine », cette haine n’est pas le moins du monde motivée par l’idéologie coranique mais plutôt par « l’idéologie prônée par l’état islamique », lequel semble être sorti de nulle part. En effet, l’auteur de la tuerie a, semble-t-il, été inspiré par « une vision fantasmée de la religion ». Pire, celle-ci : « touche toutes les religions sans distinction ».
Le lien avec l’islam étant incontournable, il fallait bien élargir… « Les trois religions structurent la société depuis des siècles, et depuis des siècles leurs dogmes appellent au meurtre des homosexuels », explique-t-il. Aussi appelle-t-il les « institutions religieuses » à « prendre la mesure de la responsabilité qu’elles portent ». Question : dans quelle mesure l’Église catholique, au hasard, a‑t-elle un quelconque lien avec un islamiste américain lié à l’État islamiste ? Vous avez quatre heures…
Toujours dans le Huffington Post, la journaliste Marine Le Breton prenait le même chemin. « Même s’il s’agit d’une attaque revendiquée par Daech, la tuerie d’Orlando, la plus meurtrière de l’histoire des États-Unis, restera pourtant certainement dans les esprits comme un acte terroriste homophobe plutôt qu’islamiste », a‑t-elle estimé. La raison ? Il s’agissait d’un club gay emblématique et nous étions au mois de juin, mois de toutes les gay pride… Cachez cet islamisme que je ne saurais voir…
Aussi, concernant le tueur, il semblerait que « ses liens avec le terrorisme islamique organisé sont, eux, encore flous ». Et Le Monde de renchérir : « Dans le cas d’Orlando, le débat est donc de savoir si la revendication de l’attaque par Daech suffit à parler de “terrorisme”, ou s’il faut attendre les avancées de l’enquête sur le profil d’Omar Mateen et ses motivations pour se prononcer. » On ne savait pas les médias aussi méticuleux concernant les liens à faire entre les événements et les personnes. En revanche, pour faire le lien délirant entre cette attaque et la Manif pour tous, ces derniers ont semble-t-il pris beaucoup moins de précautions !
Après le tweet d’indignation de la Manif pour Tous ainsi que ceux de Christine Boutin et de Robert Ménard, certains militants LGBT ont dénoncé ces condamnations sur les réseaux sociaux. Aussitôt, en se cachant derrière ces réactions, de nombreux sites s’en sont donnés à cœur joie en compilant les « meilleures » réactions. Partout, il était question d’insister sur la nature inappropriée de ces réactions officielles. Pourquoi ? Concernant la Manif pour Tous, « certains de ses membres s’étaient montrés particulièrement violents lors des manifestations contre le mariage pour tous » (BFMTV). Christine Boutin, n’avait-elle qualifié l’homosexualité d’« abomination » ? (en ajoutant, mais cela n’a que trop peu été rappelé : « Mais pas la personne. Le péché n’est jamais acceptable, mais le pécheur est toujours pardonné »). Croire que l’homosexualité est un péché ne relèverait donc plus d’une conviction acceptable mais d’une incitation au massacre…
Ainsi les personnes qui étaient opposés au mariage pour tous, bannis du genre humain, n’ont-ils pas droit d’avoir de la compassion pour les 50 victimes d’Orlando, étant entendu que leur position politique a armé le bras du tueur.… Yvan Rioufol, lui aussi, a été sommé par L’Obs de se garder de tout commentaire car « en mai 2013, Rioufol avait publié sur son blog un billet… sobrement intitulé “Après le mariage gay, la polygamie ?” ». La chape de plomb autour de la question islamique étant si épaisse, les boucs-émissaires d’« extrême-droite » habituels étaient des défouloirs tout trouvés. Pour Nicolas Rividi (Huffington Post), « bouffis d’hypocrisie, ces dangereux pyromanes semblent marquer une distance avec les assassins qu’ils contribuent à créer ». Oui, on a bien lu : qu’ils contribuent à créer… Car en effet, les Ménard, Boutin et autres cadres de la Manif pour Tous « fournissent le terreau idéologique dans lequel les auteurs d’actes LGBT-phobes puisent leur haine ». Alors, évidemment, « il faut comprendre que certains messages ne passent pas » (Les Inrocks).
Et quand on se s’attaque pas directement à ces personnes, c’est aux « religions monothéistes » qu’on s’en prend, quand bien même aucun catholique ni aucun juif n’a été condamné pour acte homophobe en France, et que les seuls cas de meurtres d’homosexuels impliquent des musulmans, ou des pays musulmans, où l’homosexualité est toujours punie par la loi. Pour l’avocat Gilles-William Goldnadel, « lorsqu’on pratique un amalgame aussi grossier, c’est bien évidemment, encore une fois, pour tenter de disculper les criminels ».
Pendant qu’aux États-Unis la presse accuse Donald Trump de récupération, alors qu’Hillary Clinton fait un lien hors-sujet entre le massacre et le port d’arme (les tueurs du Bataclan n’avaient pas de port d’arme), la presse française préfère quant à elle éviter autant que possible de faire l’« amalgame » entre ce nouvel attentat islamiste et l’islam. En revanche, lorsqu’il en question de mouiller l’« extrême-droite » qui n’a strictement rien à voir là-dedans, la déontologie méticuleuse utilisée pour qualifier l’acte d’Omar Mateen s’évapore soudainement, comme dissoute dans la vase puante du politiquement correcte qui inonde les rédactions à chaque attentat.
Photo : Ojim (cc)