Dr Yves et Mister Kerdrel
Yves de Kerdrel, ancien du Figaro, ancien directeur du groupe Valmonde a quitté ce dernier en mai 2018 remplacé par Erik Monjalous. Éditorialiste à Sud Radio, il vend son groupe médias financier WanSquare (WanSquare, La Lettre de l’expansion) au groupe de Bernard Arnault en novembre 2021.
@ydekerdrel (@Valeurs), aurait-il pour rôle de ramener les brebis égarées au sarkozysme ? http://t.co/rBJh5SsP23 pic.twitter.com/RXlnNVjefg
— Ojim (@ojim_france) 30 Janvier 2015
Famille et études
Le Vicomte Yves Audren de Kerdrel est né en 1961 à Paris, dans le XVIIème arrondissement. Il est le fils d’Henri Audren de Kerdrel, directeur de banque, et de Madame, née Colette Chenain.
En 1988, il épouse Anne Augier de Crémiers, artiste-peintre et fille du Capitaine de Vaisseau Charles Augier de Crémiers.
Les Kerdrel ont deux enfants et résident dans le 15ème arrondissement de Paris. Le château de Tarnac (XVIIème siècle, inscrit aux Monuments historiques), jolie propriété située sur le plateau des Millevaches en Corrèze, étant leur résidence secondaire.
Yves de Kerdrel a fait son lycée au Collège Stanislas et à l’Institution Frilley, à Paris. Titulaire d’une maîtrise de Droit obtenue à l’Université Paris II-Panthéon Assas, il est également diplômé de l’Institut Supérieur de Gestion (ISG) et de la Société française des analystes financiers (Sfaf), et Lieutenant de réserve.
Parcours professionnel
Yves de Kerdrel commence sa carrière de journaliste en 1983, à 22 ans, au Journal des Finances, une filiale du Figaro. Quelques années plus tard, en 1988 il est nommé chef de service, puis grand reporter en 1991, et rédacteur en chef en 1993.
Il quitte la rédaction du Journal des Finances en 1999 pour Les Échos où il est éditorialiste, créateur et animateur de la rubrique “Crible” avec Renaud Belleville.
En 2005 il devient éditorialiste au Figaro où il tient encore chaque semaine une chronique au ton résolument libéral.
En parallèle, il est directeur de la rédaction du Journal des Finances de 2006 à 2008, directeur du Figaro Patrimoine de 2007 à 2009, chroniqueur sur BFM, LCI et i>Télé de 2005 à 2010.
En 2009, il fonde le site d’intelligence économique WanSquare, avec Hilaire de Laage, ingénieur, créateur de l’agence de communication IDE Edition, passionné d’infographie animée sur le web, et Dominique Leblanc, diplômé d’HEC, énarque, spécialisé en finances des marché et évaluation d’entreprises, président de la Fédération française des clubs d’investissement. Le Figaro en est le principal actionnaire. Wansquare, dont Yves de Kerdrel prend la direction de la rédaction, est un média numérique innovant et réactif, consacré aux coulisses et l’analyse de la finance et de l’économie.
En septembre 2012, il est désigné pour remplacer Guillaume Roquette devenu directeur de la rédaction du Figaro Magazine, et prend la direction du groupe Valmonde (Valeurs actuelles, Spectacle du Monde, Jours de Chasse), évinçant Ivan Rioufol ou Éric Branca, dont les noms avaient été évoqués pour le poste.
La ligne éditoriale qu’il fixe à Valeurs actuelles, offensive et insolente, rencontre un vif succès auprès des lecteurs. Les abonnés augmentent, les ventes au numéro triplent (par rapport à 2008) et le chiffre d’affaires publicitaire bondit de 17%… En quelques mois, Yves de Kerdrel et son équipe réussissent à mener l’hebdomadaire à l’équilibre après 23 ans de pertes. Un exploit dans une presse profondément en crise.
En août 2013 il affirme avoir été mis sous écoute, que le site de Valeurs Actuelles a été attaqué à plusieurs reprises et que son compte Twitter a été piraté trois fois, en accusant Manuel Valls : « Compte Twitter piraté pour la troisième fois en une semaine + écoutes téléphoniques : voilà ce qui arrive quand on critique Manuel Valls. »
Au lendemain des attentats des 7 et 9 janvier 2015, Yves de Kerdrel participe à la marche républicaine du dimanche 11 janvier et se dit sur Twitter « fier d’avoir participé à la marche républicaine contre l’islamisation aux côtés de [ses] amis du Crif ». Mais ces derniers le renverront froidement dans les cordes en précisant que le Crif avait marché « en hommage aux victimes, pour la république attaquée, contre le djihadisme, rien d’autre ».
En janvier toujours, paraît un article soulignant les contradictions d’un homme se disant patriote et conservateur à Valeurs actuelles pour flatter son public mais étant profondément pro-immigrationniste, ultralibéral et atlantiste par ailleurs. Kerdrel, qui ne croit probablement pas un mot de ce qu’il fait écrire dans Valeurs, aurait-il pour rôle de ramener les brebis égarées au sarkozysme ? C’est ce que pensent certains.
Quand @ydekerdrel se fait remballer par @Le_CRIF http://t.co/hwg2zKHqjw #medias pic.twitter.com/yzgyKwgvrq
— Ojim (@ojim_france) 16 Janvier 2015
En tant que directeur de publication de Valeurs Actuelles, il est condamné le 3 février 2015 par la 17e chambre du TGI de paris à 2000 € d’amende pour provocation à la haine raciale après la plainte de plusieurs associations – celles-ci visaient la couverture du 22 décembre 2013 à la Marianne voilée, avec le sous-titre « Naturalisés : l’invasion qu’on cache ». Néanmoins il fait appel et la Cour de Cassation casse et annule la condamnation en 2017, sans renvoi : « Même si leur formulation peut légitimement heurter les personnes de confession musulmane » [les propos visés] « ne contiennent néanmoins pas d’appel ou d’exhortation à la discrimination, à la haine ou à la violence à leur égard ».
En 2015 encore, la 17e chambre correctionnelle de Paris le condamne à 3 000 € d’amendes pour diffamation, provocation à la discrimination et à la haine ou à violence envers les Roms, pour sa Une du 22 août 2013 intitulée Roms : l’overdose ; avec Valmonde ils doivent en outre verser 2000 € à la Licra et 1€ à la voix des Roms.
En décembre 2017 une affaire de détournement d’argent depuis près de dix ans à Valeurs actuelles éclate. Révél ée en interne en février 2016, elle a privé le journal de 5 à 7 millions d’euros par an, à raison de 600.000 € de surfacturations annuelles aux fournisseurs. Cette affaire fragilise la direction d’Yves de Kerdrel – bien que le mécanisme ait commencé bien avant lui.
En mai 2018, il quitte la direction générale de Valeurs actuelles remplacé par Érik Monjalous mais reste éditorialiste. En septembre 2018 il devient éditorialiste politique à Sud Radio. En août 2018 il est aussi devenu directeur des rédactions du groupe Wansquare (Wansquare, la Lettre de l’Expansion), groupe qu’il revend à 95% à Bernard Arnault en novembre 2021 tout en restant à sa tête pour un an.
Ils l’ont dit
« Dans le dernier numéro de Valeurs actuelles, Tartuffe de Kerdrel a fait très fort en la matière. “Merci Très-Saint-Père”, psalmodie-t-il huit ou neuf fois dans un éditorial dégoulinant comme du miel (…) Yves de Kerdrel passe son temps, et ses chroniques du Figaro, à défendre les requins du capitalisme qui ne sont pas précisément le genre à se jeter à genoux devant le Christ humilié. Son seul dieu, c’est Mammon. S’il faut faire exploser la Création ou la recouvrir d’une dalle de béton pour créer de la richesse, vous pouvez compter sur lui. Et n’allez pas lui parler du “principe de précaution” qui n’est que le terme bureaucratique de la prudence ancestrale des hommes, c’est une « insulte aux savants » ! Quand une centrale nucléaire se fissure, comme à Tricastin en 2008, il considère que ceux qui en parlent sont des « marchands de peur collective ». Son seul souci évangélique, c’est de défendre les riches et les puissants contre les faibles et les pauvres, qu’il n’est pas loin de considérer comme des parasites (…) Monsieur le vicomte fait partie de ces aristos vaincus qui ont épousé l’idéologie de leurs vainqueurs bourgeois. Avec l’instinct du seigneur en sus, malheureusement employé à glorifier la guerre économique et à justifier un darwinisme social qui ne dit pas son nom, au lieu de combattre les oppresseurs avec le petit peuple à ses côtés. Et à présent, si vous voulez en savoir plus, lisez Léon Bloy. C’est précisément d’Yves de Kerdrel que le grand écrivain catholique a parlé dans chacun de ses livres », Minute, 20 février 2013.
« Kerdrel ? «Manipulateur», «menteur», «méprisant», disent les anciens les plus feutrés. «Humainement épouvantable», résume l’un. «Il est abrupt», concède Geoffroy Lejeune, 27 ans, chef du service politique placé là par le boss. «C’est plus facile de bosser avec lui quand on a mon âge et moins d’orgueil qu’à 60 ans», ajoute-t-il. «C’est un homme autoritaire et c’est pour ça qu’il a réussi», tente Etienne Mougeotte, qui assure vouloir le maintenir en poste », Libération, 07/02/2016.
« Le grand paradoxe de Kerdrel, qui détient un château à Tarnac et se vante de connaître Julien Coupat, est qu’il se présente en libéral à l’anglo-saxonne, ardent défenseur de la responsabilité individuelle. Admirateur de Blair et Cameron, ami intime d’Emmanuel Macron depuis qu’ils ont travaillé tous les deux à la commission Attali en 2007, l’homme n’est pas aussi conservateur, catho tradi, anti-mariage gay et souverainiste que son journal peut le laisser penser », ibid.
« Artisan de la renaissance et de l’ultra-droitisation de l’hebdomadaire, Yves de Kerdrel était arrivé à la tête du journal fin 2012. […]. Les relations de Kerdrel avec les actionnaires, Iskandar Safa (majoritaire) et le duo Etienne Mougeotte et Charles Villeneuve (minoritaires), n’étaient plus au beau fixe, surtout depuis qu’une affaire d’escroquerie, révélée par Libération, avait éclaté à l’intérieur de l’entreprise », Libération, 25/05/2018.
« Arrivé en 2012 pour reprendre un journal déficitaire et à l’audience relativement confidentielle, Yves de Kerdrel quitte un titre qui a connu une forte croissance commerciale et a soulevé de nombreuses polémiques, avec son positionnement « buissonnien », du nom de Patrick Buisson, l’ancien conseiller de Nicolas Sarkozy, situé aux confins de la droite et de l’extrême droite », Le Monde, 25/05/2018.
« Yves de Kerdrel a certes été l’artisan des couvertures les plus provocatrices de Valeurs actuelles – ce qui lui a même valu une condamnation pour incitation à la haine après des « unes » sur les Roms et les musulmans –, mais, ces derniers temps, il représentait plutôt un facteur de modération au sein de l’hebdomadaire. Il a d’ailleurs salué, dans son dernier éditorial, l’action « réformatrice » d’Emmanuel Macron, qu’il a bien connu quand tous deux siégeaient à la commission Attali sur « la libération de la croissance française », ibid.
Il l’a dit
Depuis 2005, Yves de Kerdrel tient dans le Figaro une chronique au ton libéral et sans complexes.
En 2008, il prend résolument position pour le travail du dimanche et n’hésite pas à s’en prendre aux évêques sur un ton piquant :
« Les évêques de France sont des gens admirables. D’abord plus de deux siècles après la Révolution, ils se font toujours sacrer, sans avoir besoin d’aller à Reims, comme les premiers secrétaires du Parti socialiste. Ensuite, malgré la séparation de l’Église de l’État, ils ne peuvent toujours pas être nommés à la tête d’un diocèse sans que le ministre de l’Intérieur leur accorde sa bénédiction. Enfin, ils ont toujours un avis sur tout, et ils ont un certain talent pour le faire partager (…)
Il n’y a pas si longtemps, ils ont renouvelé leurs exploits rhétoriques en prenant le parti, à de multiples reprises, de la régularisation des sans-papiers, voire d’une immigration non choisie, alors même que certains à gauche expliquent depuis longtemps que «la France ne peut accueillir toute la misère du monde ».
Sans doute désinhibés par un président de la République qui parle avec facilité de religion, voici nos apôtres d’aujourd’hui démangés à nouveau par la volonté de donner leur opinion sur la crise financière, la précarité de l’emploi et sur un sujet par lequel ils se sentent particulièrement concernés : le travail dominical. Mgr Vingt-Trois, le cardinal-archevêque de Paris et président de la conférence des évêques de France, a récemment affirmé lors d’un discours solennel : « Si des dispositions législatives généralisaient le champ du travail dominical, les dommages humains et sociaux qui en découleraient seraient sans commune mesure avec le profit économique qui peut en résulter. Ce serait une mesure supplémentaire dans la déstructuration de notre vie collective qui ne toucherait pas seulement les chrétiens…
Le problème, c’est que le sujet du travail dominical n’est pas une question de rendement maximal, de gain optimal, ou d’un néostakhanovisme, voire d’une société rongée par le matérialisme. Non, cette question, c’est justement celle qui constitue le fil rouge des Écritures, c’est celle de l’homme et de sa liberté. Est-il normal que la France soit l’un des derniers pays qui réglemente de manière drastique le travail le dimanche, interdisant ceux qui souhaitent ouvrir leurs échoppes, petites ou grandes, de le faire ? Est-il normal que la liberté de travailler, donc de s’épanouir et de s’émanciper, se trouve ainsi entravée ? Est-il normal en 2008, qu’à un être humain qui veuille de son libre choix travailler le dimanche, on oppose une réglementation obsolète ? »
En avril 2010, l’une de ses chroniques intitulée “Arrêtez de tirer sur les riches !” suscite quelques remous :
« Jules Michelet avait tout compris, à force d’étudier l’histoire de France par tous les bouts. Il affirmait : « La politique, c’est l’art d’obtenir de l’argent des riches et des suffrages des pauvres, sous prétexte de les protéger les uns des autres. »
Le 12 mars 2012, il titre sa chronique du jour : « Paris n’est pas Wall Street, hélas ! »
« (…) La bourse américaine qui vient de progresser pendant cinq semaines consécutives, devrait poursuivre sur sa lancée. Tout concourt pour motiver l’enthousiasme des investisseurs. D’abord les bons indicateurs économiques, avec notamment la baisse spectaculaire du taux de chômage. Ensuite le niveau très élevé du cash détenu par les fonds mutuels américains qui avaient fait preuve d’un excès de prudence, ces dernières semaines. Enfin, il y a un climat général qui a changé.
La crise de 2008 a certes laissé des traces et modifié les comportements, voire les textes. Mais la page est tournée. Et l’on parle à nouveau d’introductions en bourse records et d’opérations spectaculaires. Bref les États-Unis ont fini par terrasser la peur qu’ils s’étaient faits à la suite de la crise financière. Ils ont réalisé qu’ils avaient repris la maîtrise de leur destin et de leur croissance. Et même mieux, puisqu’ils viennent de devenir exportateurs de pétrole au moment où l’or noir bat des records !
À côté de cela, la situation des marchés européens, et notamment de notre pauvre marché boursier français fait un peu pitié. Bien sûr le début d’année n’est pas si mauvais que cela. Bien sûr les résultats des grands groupes du CAC 40 sont à la hauteur des espérances et leurs perspectives pour 2012, bien plus élevées que prévu. Bien sûr, le collapsus grec n’a pas eu lieu, et la longue page de la crise hellène finit de se tourner, levant ainsi une lourde hypothèque. »
« La France des invisibles gronde, le pays se droitise. Je laboure un terrain plus important qu’en 2012 », Libération, 07/02/2016, op.cit.
« Pour l’heure le score estimé d’Emmanuel Macron est de 65,7 %. Ce qui lui confère en théorie 20 millions de voix. Ce qui représente à peine deux millions de voix de plus que François Hollande en 2012 et quelques centaines de milliers de voix de plus que Nicolas Sarkozy en 2007. On est donc bien loin d’une victoire triomphale », Valeurs Actuelles, 07/05/2017
« Seulement 40 % des électeurs d’Emmanuel Macron adhèrent à son projet. Voici donc un Président élu avec un score officiel de 65,7 %, mais avec le soutien effectif de seulement 8 millions d’électeurs, soit 17 % des inscrits. Rarement un Président a paru si bien élu, avec le soutien de 90 % des médias. Mais rarement aussi il a disposé de si peu de soutiens pour appliquer sa politique », ibid.
Sa nébuleuse
Yves de Kerdrel a ses entrées dans de nombreux cercles d’influences et d’affaires.
En 2005 il rejoint la Commission du dialogue économique du Medef, ce qui lui vaut d’être nommé à la Commission Attali pour le redressement de la Croissance en 2007. Membre du Conseil franco-Britannique et du Comité d’éthique du Medef, il est également délégué général du Cercle de l’audace créatrice, professeur à Dauphine jusqu’en 2010, et administrateur du groupe Vitry frères.
Il est membre du prestigieux Jockey Club de Paris et du Cercle de La Revue des deux-Mondes (dont il est président), mais ne fréquente pas les dîners du Siècle.
Il est également proche de Marc Ladreit de la Charrière propriétaire du groupe Fimalac (l’agence de notation Fitch Ratings entre autres), ancien propriétaire du Groupe Valmonde (revendu à Dassault qui le revendra au groupe Fabre), qui est à l’origine de la Fondation Agir contre l’exclusion avec Martine Aubry, fondation qu’il soutient financièrement, et qui s’est présenté comme un des fondateurs de SOS Racisme.
Voir aussi : Le blog d’Yves de Kerdrel sur Yahoo! Finance / Yves de Kerdrel sur Twitter
Crédit photo : WansquareTV via Youtube