Dossier. Les médias allemands face au succès du parti Alternative für Deutschland (AfD) aux élections régionales en Mecklembourg-Poméranie Occidentale.
L’État fédéral de Mecklembourg-Poméranie Occidentale est sans doute l’une des régions les plus méconnues de la République Fédérale d’Allemagne. Peuplée initialement par des tribus slaves elle a été progressivement germanisée dans le sillage du fameux Drang nach Osten (« Poussée vers l’est ») du XIème siècle jusqu’à la défaite des Chevaliers Teutoniques à Tannenberg (1410). Elle a également subi une forte influence scandinave : les Vikings suédois tout proches ont souvent ravagé ses côtes du VIIIème au XIème siècle; Gustave-Adolphe Vasa en a conquis une bonne partie pour le compte de la Suède pendant la Guerre de Trente ans (Traité de Westphalie, 1648) jusqu’à ce que le « Grand Électeur » de Brandebourg, Frédéric-Guillaume von Hohenzollern la leur reprenne en infligeant aux Suédois la mémorable défaite de Fehrbellin (1675). Mais cette région se distingue également par une côte sableuse aux contours tourmentés d’estuaires d’un romantisme à couper le souffle, des îles touristiques (Rügen, Usedom) et un arrière-pays bosselé (relief postglaciaire) pittoresque où alternent prairies, lacs et forêts d’une nature souvent intacte. Exception faite de quelques grandes villes anciennes, c’est une région largement rurale qui n’a pas été défigurée par la révolution industrielle, par ailleurs très ouverte sur l’est de l’Europe en l’absence d’obstacles topographiques dans cette direction jusqu’à l’Oural.
Cette belle endormie vient d’être le théâtre d’un événement historique : la spectaculaire percée du parti AfD avec 20% de suffrages lors des élections régionales.
Le parti Alternative für Deutschland (AfD) est un parti de droite conservateur, démocrate et libéral anti-islam. La presse et les médias français n’ont cessé, dans leurs commentaires, de parler de « percée de l’extrême-droite » lors des élections brandebourgeoises et poméraniennes. L’article en français dans Wikipédia est infiniment plus nuancé dans sa description :
« Considéré comme un parti “anti-establishment” et classé plutôt du côté de la droite conservatrice, son appartenance à la tendance populiste est discutée — l’AfD rejette cette classification, tout en déclarant n’être “ni de gauche ni de droite”. Il adhère en juin 2014 au groupe des Conservateurs et réformistes européens, qu’il quitte en avril 2016 après la scission de l’Alliance pour le progrès et le renouveau l’année précédente. »
Aucun journal allemand ne désigne l’AfD comme un parti d’extrême-droite. Les termes utilisés sont généralement « rechtspopulistisch » et « konservativ », soit « populiste de droite » et « conservateur » — un terme qui ferait plutôt référence à une partie du néo-conservatisme américain, qui défend la démocratie et le libéralisme.
« Certains scientifiques voient dans son programme politique des tendances populistes de droite, mais ce parti est majoritairement considéré comme conservateur. (Die Zeit, 05/09/2016). Les autres médias main stream (Süddeutsche Zeitung, die Welt, Die Zeit) utilisent ce même qualificatif dans leurs articles, idem pour les médias audiovisuels. Le qualificatif d’extrême-droite devrait nécessairement désigner une tendance politique visant à instaurer un État fort et autoritaire, centralisé, avec abolition de la démocratie, du pluralisme politique et de la liberté d’expression.
Alternative für Deutschland (AfD) défend farouchement la Grundgesetz, la loi fondamentale démocratique allemande, nettement plus démocratique que les institutions de la Vème République française. Le parti souhaite même la compléter en y introduisant des éléments de démocratie directe afin de prévenir toute confiscation du pouvoir à l’avenir.
La même chose vaut d’ailleurs du FPÖ autrichien, de l’UDC suisse, du PVV néerlandais, du SD suédois, tous partis démocrates souverainistes, libéraux, favorables au contrôle migratoire, hostiles à l’islam et pro-israéliens que les médias français évoquent tous en permanence comme étant « d’extrême-droite ».
Les grands traits « conservateurs » et « populistes » du programme d’Alternative für Deutschland (AfD)
Le néo-conservatisme de l’AfD
Le programme économique de l’AfD présente des traits largement inspirés du libéralisme :
— moindre progressivité de l’impôt (point 11.1),
— limitation des dépenses publiques et de la fiscalité (point 11.2),
— abolition de tous les impôts sur les sociétés, la fortune et la succession (point 11.3),
— restauration du secret bancaire (point 11.7).
« Ceci convient au programme économique de l’AfD, qui s’inspire de principes néolibéraux et affiche un fort scepticisme par rapport aux interventions de l’État dans l’économie, veut soulager les entreprises, accorder davantage de responsabilité aux citoyens. Süddeutsche Zeitung, 05/09/2016. Le Süddeutsche Zeitung est de tendance sociale-démocrate.
À noter que l’AfD souhaite mettre un terme à une politique de libre-échange indifférencié pour lui substituer un libre-échange différencié en fonction des situations et des conditions structurelles. Le parti s’est par exemple déclaré hostile au TTIP/Tafta.
Le « populisme » d’AfD
Le « populisme » de l’AfD peut se décliner en deux volets : l’euroscepticisme et la volonté d’instaurer une politique d’immigration restrictive, notamment de l’immigration musulmane.
Le programme de l’AfD prévoit :
- Le renoncement à l’euro ; l’AfD considère en effet que cette monnaie ne saurait fonctionner en l’absence d’homogénéité des structures économiques et des traditions de politique économique des différents pays européens ; l’AfD croit à la résilience à long terme de ces phénomènes et ne croit pas à la possibilité d’une convergence; l’AfD prône le retour au DM et aux autres devises nationales ;
- L’AfD souhaite la totale restauration de la souveraineté législative des parlements nationaux européens, c’est-à-dire la substitution du centralisme par un fédéralisme intégral au sein de l’UE (le terme de « fédéralisme » étant pris ici au sens propre et non au sens de « centralisme » qu’il a souvent en France quand on parle d’Europe). Mais cette demande est bel et bien une demande de restauration de la démocratie confisquée par Bruxelles.
« L’AfD prône la dissolution de la zone Euro et le retour aux monnaies nationales comme le DM. » Die Welt 05/09/2016
L’AfD est en outre hostile aux déconstructions sociétales, comme le mariage pour tous.
« Les points forts du programme de ce parti sont : l’exigence d’une sortie de l’Euro, le plaidoyer en faveur de la famille traditionnelle et de l’énergie nucléaire, l’exigence de davantage de démocratie directe. Die Zeit, 05/09/2016
Ce premier sujet sensible dans une Europe de l’ouest où les « avancées (= déconstructions) sociétales » sont censées ne pouvoir être remises en cause, même démocratiquement (totalitarisme). Mais le véritable torchon rouge est la volonté de mettre en place une politique de limitation de l’immigration, et surtout l’hostilité à l’islam.
L’AfD pense en effet que la politique d’immigration allemande – ou plutôt son absence – est devenue folle. Elle exige le renoncement à la pensée magique et religieuse, et l’adoption d’une politique restrictive et surtout rationnelle dans ce domaine.
La question de l’immigration n’a en effet jamais été une question morale, religieuse ou raciale. Toute immigration a des conséquences économiques et sociales qui peuvent, selon les conditions dans lesquelles elle survient, être positives ou négatives, comme le démontrent les études réalisées par l’État allemand lui-même. L’AfD a toujours rejeté l’idéologie « antiraciste » comme étant une imposture et propose la mise en place d’une politique rationnelle de l’immigration et d’asile.
« C’est parce que nous tenons à l’État de droit que nous estimons que la politique d’immigration doit être réglementée par la loi selon des critères clairs, s’inspirant par exemple de ceux qui existent en Australie ou au Canada. Ce qui est décisif, ce sont les connaissances linguistiques, la formation, les connaissances professionnelles et les exigences du marché allemand du travail. L’AfD rejette totalement toute immigration à la seule charge du système social allemand – y compris en provenance des pays de l’Union Européenne. » (Portail AfD).
Cette politique ne consiste donc pas à fermer les frontières, mais à les réguler. La dernière phrase de ce programme implique en outre clairement que l’AfD veut mettre fin aux accords de Schengen : la restauration de l’État de droit signifie celle des frontières…
Ce discours touche des pans entiers de la société allemande :
« (Leif-Erik) Holm (candidat de l’AfD à la présidence en Mecklembourg-Poméranie Occidentale, NDLR) l’a dit et répété : “Nous ne laisserons pas plus longtemps les anciens partis conduire notre pays à la catastrophe” et encore “La police fédérale doit contrôler nos frontières” ». Frankfurter Allgemeine Zeitung (FAZ), 05/09/2016
On se rappellera ici opportunément de l’extraordinaire succès de l’essai « Deutschland schafft sich ab (L’Allemagne se détruit) » de Thilo Sarrazin, vendu à des millions d’exemplaires…
Et Frauke Petry – porte-parole de l’AfD depuis le 4 juillet 2015 — martelant : « Plus de 90% des demandeurs d’asile viennent alourdir la charge de l’État-Providence .
Fortes restrictions imposées à l’islam
« Un élément central (de la politique de l’AfD, NDLR) est constitué par le rejet général de l’islam. Cette religion doit être refoulée en Allemagne. Die Zeit, 05/09/2016
« L’AfD mène un combat culturel – pas une guerre des classes » Süddeutsche Zeitung (SZ), 05/09/2016
L’islam est considéré comme une religion anti-démocratique, totalitaire, suprématiste, raciste et antisémite, phallocrate et ségrégationniste. Le fait que des individus nés musulmans ne suivent pas à la lettre ses préceptes ne change rien à son contenu.
L’AfD marche sur des œufs dans ce domaine, tant l’interdiction de la critique de cette religion a progressé en détruisant des pans entiers de la liberté d’expression et partant de la démocratie. Le programme de l’AfD énonce que l’islam ne fait pas partie de l’Allemagne. Il affirme même que ce dernier est verfassungswidrig (contraire à la constitution), ce qui ouvre théoriquement la porte à son interdiction. Mais comme l’AfD veut cependant maintenir la liberté de culte, ce parti se propose seulement d’interdire entre autres les minarets, l’appel du muezzin et le voile intégral, veut accepter tous les musulmans qui reconnaissent la constitution et renoncent à tout ce qui, dans l’islam, y est contraire. Le parti ne veut donc pas interdire l’islam, mais se contenter de dissoudre les associations rejetant la constitution et la construction et la gestion de mosquées intégristes, tout comme les financements étrangers par des pays ou des individus islamistes. Les imams doivent être formés en Allemagne et en allemand.
Leif-Erik Holm : « Les citoyens ne veulent pas que notre pays et toute l’Europe deviennent petit à petit un califat » Die Welt, 05/09/2016
Cette attitude vis-à-vis de l’islam constitue le motif de critique le plus violent d’un establishment qui a renoncé à la démocratie et à la liberté d’expression dans ce domaine en condamnant, voire en poursuivant judiciairement toute critique du totalitarisme islamique.
C’est surtout l’extrême-gauche qui enfonce le clou :
« Toute comparaison directe du NSDAP et de l’AfD serait certes impropre et anachronique. Il y a cependant des parallèles étonnants : ce ne sont plus “les juifs”, mais “l’islam” qui est devenu l’ennemi fantasmé des populistes de droite. 75% des partisans de l’AfD voient dans l’islam un danger pour l’Allemagne, selon une analyse de (l’institut de sondage) infratest-dimap sur le résultat des élections. 86% ont répondu oui à l’affirmation “le nombre des migrants me fait peur . Pas moins de 100% sont d’avis que le nombre des migrants doit être limité. Le sujet des migrants a constitué pour 54% le motif de vote en faveur de l’AfD, suivi de la justice sociale avec 48% (notons que ces électeurs considèrent que ce sont des mesures libérales, et non l’intervention tous azimuts de l’État, qui sont le meilleur garant de cette dernière, NDLR). » Tageszeitung (TAZ) 05/09/2016
L’électorat de l’AfD : clivages sociaux
Certains journaux allemands ont donné de l’électorat de l’AfD une image plutôt dévalorisante : « Masculin, diplôme de fin d’études secondaires, au chômage » Die Welt 05/09/2016. « 28% des électeurs de l’AfD ont un faible niveau de formation ». TAZ 05/09/2016.
Mais une étude de l’Institut der deutschen Wirtschaft (Institut de l’économie allemande) vient quelque peu tempérer ces affirmations péremptoires : selon elle, un tiers des sympathisants de l’AfD ferait partie des revenus de la tranche supérieure. Seul le très libéral FDP peut s’enorgueillir de scores comparables. (Süddeutsche Zeitung (SZ) 05/09/2016). Or le FDP est le seul parti à afficher une progression aux élections régionales de Mecklembourg-Poméranie Occidentale à part l’AfD. Ces deux partis séduisent clairement un électorat de petits entrepreneurs, de patrons de PME, d’artisans et de professions libérales, qui n’ont jamais demandé une immigration de peuplement, contraire aux très grandes entreprises qui le font pour des raisons de collusion avec le monde politique – un phénomène que nous avons déjà précédemment évoqué.
Un sondage des électeurs de l’AfD commandé par le Frankfurter Allgemeine Zeitung (FAZ) le 05/09/2016 a montré que ce parti obtenait les meilleurs résultats chez les groupes suivants :
- hommes (26%, contre 17% de femmes) âgés de 30 à 44 ans,
- issus de la société civile et de l’économie privée (indépendants, artisans, commerçants, petits entrepreneurs mais aussi travailleurs du privé en général),
- ayant une formation faible à moyenne,
- issus des périphéries urbaines plutôt que citadins, voire ruraux. C’est ainsi que les circonscriptions de Vorpommern-Greifswald II, III et V – rurales et à la frontière polonaise – sont majoritairement tombées aux mains de l’AfD. C’est de là que provient une bonne partie des députés AfD. Sur la paradisiaque île touristique d’Usedom, 9 communes sur 16 ont voté à plus de 40% pour l’AfD ou le NPD (extrême-droite).
Les femmes, les fonctionnaires, les plus jeunes et les plus vieux sont donc moins enthousiastes, mais l’AfD dépasse les 10% dans tous les groupes et n’est donc rejetée nulle part.
Il est le premier parti des travailleurs, sans toutefois rebuter complètement les fonctionnaires, les diplômés d’études supérieures ni les retraités. Les chômeurs votent également pour lui, sans pour autant rejeter le libéralisme : ce sont les obstacles systémiques à l’emploi qui doivent être éliminés, tout doit être fait pour que les bénéficiaires du Hartz IV (sorte de « RSA » à l’Allemagne) retournent à l’emploi coûte que coûte.
À noter que plus de 15% des électeurs de l’AfD sont des transfuges de l’extrême-gauche, de l’alter-mondialisme et de l’antifascisme, séduits par la volonté de l’AfD de mettre fin à un libre-échange indifférencié pour lui substituer un libre-échange différencié en fonction des situations et des conditions structurelles. Ce sont en fait les classes moyennes qui fournissent les gros bataillons des électeurs de l’AfD, sans toutefois qu’aucun autre groupe ne soit totalement rebuté par ce parti.
L’électorat de l’AfD : clivages géographiques
Le principal clivage politique structurel observable est géographique : l’AfD engrange deux fois plus de voix (autour de 20% en moyenne) dans les régions de l’est issues de l’ex-RDA qu’à l’ouest (autour de 10% en moyenne). Mais elle n’est pas sans séduire les régions du sud (Bade-Wurtemberg, Bavière, autour de 15% aux dernières élections).
Les états fédérés de l’est issus de l’ex-RDA rejettent le politiquement correct et le gauchisme idéologique, qui leur rappellent de mauvais souvenirs pires que ceux de l’époque nazie. Le sud alémanique et bavarois a une forte identité historique extrêmement ancienne. Les états fédérés de l’ouest sont des régions artificiellement créés après la guerre, sans identité forte, ravagées dès le XIXème siècle par la révolution industrielle, et comprenant de fortes communautés turques ou afro-musulmanes courtisées électoralement.
Le consensus politique allemand déstabilisé
La percée de l’AfD déstabilise le système politique allemand, car il ne rentre pas dans le consensus qui s’est installé après-guerre. Cette déstabilisation est durable : l’analyse des résultats au Mecklembourg-Poméranie Occidentale montre en effet deux phénomènes structurels essentiels :
- la spectaculaire progression de l’AfD s’est faite au détriment de tous les autres partis,
- l’AfD est parvenue à mobiliser de nombreux abstentionnistes ce qui a permis à ce parti de parler de “grand jour pour la démocratie” suite aux dernières élections : plus de la moitié des électeurs ont voté AfD par conviction, mais tout de même 42% par rejet des partis traditionnels.
« L’AfD a empiété sur les plates-bandes de tous les partis. C’est ce que montrent les données collectées par le groupe de recherche sur les élections mandaté par la ZDF (2nde chaîne publique allemande). 17% des électeurs avaient coché SPD il y a cinq ans, 16% NPD (extrême-droite), 15% CDU (chrétiens-démocrates), 3% Verts et FDP. Süddeutsche Zeitung (SZ), 05/09/2016.
L’AfD est parvenu à se mettre en phase avec le mécontentement grandissant au sein de la société allemande, et ce dans un pays économiquement dynamique, avec un taux de chômage modéré, un excédent commercial appréciable et un endettement public et social acceptable… c’est bel et bien le Kulturkampf (la « guerre des civilisations ») qui est au cœur de la crise en Allemagne.
Leif-Erik Holm a qualifié Angela Merkel de « chancelière-dictateur », et la RFA d’« autocratie dominée par des tyrans ». Des mots qui touchent les laissés-pour-compte et les dégoûtés de la politique…
« Il y a sûrement beaucoup de vacanciers à Usedom pendant l’été, mais les étrangers (extra-européens) ou les demandeurs d’asile sont rarissimes dans tout le Mecklembourg-Poméranie Occidentale. Pourquoi donc la question des réfugiés domine-t-elle à un tel point le débat là où ils sont absents ? […] La xénophobie fonctionne en effet sans étrangers, déclarent des experts tels que le professeur de politique de Mainz Jürgen Falter : “Ces électeurs n’ont pas besoin de confrontation pour fantasmer un ennemi imaginaire. Il leur suffit de croire que celle-ci pourrait se produire”. » TAZ, 05/09/2016
Comme dans les pays d’Europe centrale, les länder de l’est ne veulent en aucun cas subir les horreurs qu’ils constatent à l’ouest. Ils les préviennent donc en freinant des quatre fers. C’est un phénomène de séparation des populations non-miscibles et de constitution de réserves. À l’ouest, le clientélisme oblige les politiques à faire le grand écart en ménageant les électeurs musulmans. Mais les communautés se séparent sur le terrain et rêvent chacune de deux pays diamétralement opposés.
Tout se passe par ailleurs comme si, et ce à l’instar des tendances constatables dans les pays d’Europe centrale, les Allemands de l’est regardaient de plus en plus l’ancienne puissance coloniale russe avec les yeux de Chimène : « De nombreux partisans de l’AfD et le Front de gauche (allemand) font davantage confiance à Poutine qu’à Merkel » (Die Zeit, 05/09/2016) ; « La confiance en Poutine est supérieure de presque un tiers (30%) parmi les soutiens de l’AfD à la moyenne nationale. C’est également le cas chez les électeurs de gauche (radicale) (31%). C’est ce qui ressort d’une enquête menée par l’institut de sondage Forsa commandé par le Zeit. » Die Zeit, 05/09/2016.
La montée de la crise politique en Allemagne
Les partis de l’establishment ont réagi par des mesures d’urgence à la crise à l’est. Il existe ainsi depuis 2015 des grandes coalitions (rouge-noir, soit SPD-CDU) dans cinq états fédérés dont 4 dans l’ex-RDA : Berlin, Mecklembourg-Poméranie Occidentale, Saxe-Anhalt, Saxe et Sarre (Ouest). Ce type de coalition apparaît dans un pays en crise, mais épris de consensus. Il consiste néanmoins à abolir le système partisan dans les faits et l’histoire montre qu’elles ne sont jamais que des situations transitoires. Ce fut par exemple le cas de la célèbre Grande Coalition du chancelier Kurt-Georg Kiesinger (1966 – 1969), qui ne fit guère que marquer la transition en douceur d’une domination de la démocratie chrétienne (1949 – 1966) vers celle de la social-démocratie (1969 – 1981) dans le cadre des bouleversements qui ont abouti à la crise de 1968–69, en attendant le retour de bâton néo-conservateur de 1981.
L’avenir reste incertain. L’AfD pourrait triompher à l’est mais pas ou nettement moins à l’ouest, la question du sud restant un dilemme. Une alliance de la Bavière et du Bade-Wurtemberg avec les états fédérés de l’est pourrait entraîner un blocage politique au niveau de l’assemblée haute, le Bundesrat (Conseil fédéral), constitué des représentants des 16 régions. Un désaccord irréconciliable entre les partis de l’establishment et l’AfD entraînerait une crise politique majeure en Allemagne dans l’impossibilité de réaliser le sacro-saint consensus, sachant que nul ne peut prédire l’évolution d’un CDU menacé d’implosion interne, sans compter que nombre de membres de la CSU bavaroise ne sont pas hostiles à l’AfD.
Sources
- Portail de l’AfD
- Frankfurter Allgemeine Zeitung (FAZ), 05/09/2016
- Frankfurter Allgemeine Zeitung (FAZ), 05/09/2016
- Frankfurter Allgemeine Zeitung (FAZ), 05/09/2016
- Süddeutsche Zeitung (SZ), 05/09/2016
- Süddeutsche Zeitung (SZ), 05/09/2016
- Süddeutsche Zeitung (SZ), 05/09/2016
- Die Welt, 05/09/2016
- Die Welt, 05/09/2016
- Die Welt, 05/09/2016
- Die Welt, 05/09/2016
- Die Welt, 05/09/2016
- Die Welt, 05/09/2016
- Die Zeit, 05/09/2016
- Die Zeit, 05/09/2016
- Die Zeit, 05/09/2016
- Die Zeit, 05/09/2016
- Die Zeit, 05/09/2016
- Tageszeitung (TAZ), 05/09/2016
- Der Spiegel, 05/09/2016