En s’attaquant à Anthony Scaramucci, CNN a commis une bévue de taille. Scaramucci est un fidèle de Trump, auprès duquel il s’est engagé (au point de vendre Skybridge Capital, son très profitable business) afin de le conseiller sur sa politique économique et fiscale.
En disséminant une « Fake news » insinuant que l’homme de Wall Street, également homme de médias (Fox News, Wall Street Week), avait discuté, avant l’intronisation de Trump, de la levée des sanctions russes avec le patron d’un fonds russe « proche de Poutine », la filiale de Time Warner a réalisé avoir franchi la limite. Scaramucci, passif-agressif et connaissant son droit, a poliment informé la direction de son intention de la poursuivre pour diffamation pour cent millions de dollars. Ce qui créerait un précédent fâcheux. Résultat : rétractation, « démission » de trois journalistes, nouvelles procédures déontologiques…
CNN connait un passage à vide… depuis le témoignage du 8 juin dernier au congrès de l’ex-directeur du FBI, James Comey. Ayant annoncé à grand bruit (sur la foi de multiples sources anonymes) que Comey nierait qu’il avait affirmé trois fois à Trump qu’il ne faisait pas l’objet d’une enquête du FBI, Comey confirma la version de Trump contre toute attente.
Ce qui n’a pas empêché la chaîne de courir en juin après tous les lièvres, allant de la collusion potentielle du gendre de Trump (Kushner) avec les Russes, à la thèse de l’entrave trumpienne à la justice, en passant par la double ration de crème glacée dans l’assiette présidentielle, et sans oublier l’insinuation d’un prochain crépuscule électoral du trumpisme, bafouée par les résultats de la législative partielle de Géorgie, pourtant présentée par CNN comme un référendum sur Trump.
Bref, CNN a oublié de suivre l’actualité, et tend à se laisser dépasser par les évènements, incapable de percevoir l’effet boomerang qui se dessine tant dans l’opinion que chez les parlementaires : l’affaire Russe devient progressivement l’affaire Obama, avec une série d’enquêtes parlementaires qui se montent sur ses anciens collaborateurs, les médias pas loin derrière (l’Ojim suivra ce dossier).
En fait, tel le chaton qui court dans tous les sens après la lumière rouge du pointeur laser, CNN, ahuri par Trump, n’a pas anticipé la contre-attaque des contre-révolutionnaires, en particulier celle du Project Veritas. Champions de la caméra invisible, Project Veritas vient de diffuser une série de trappages ciblant CNN, sous l’intitulé « American Pravda ». Il y est révélé que Zucker (le patron de la chaine) a poussé l’affaire russe pour des raisons financières (taux d’écoutes), que les membres de l’équipe piégés concèdent qu’il n’y a pas de preuves, et que « ce truc russe, c’est un gros sandwich plein de vent » (« a nothing burger », sic Van Jones).
Bad timing… parce que CNN devient un irritant qui gêne une fusion (en négociation) de 85 milliards de dollars entre AT&T et Time Warner. Fusion qui doit être approuvée par le ministère de la justice de l’administration Trump… Pire encore, selon des sources citées par le New York Business Journal, la position de Zucker serait incertaine : AT&T, qui fait dans le divertissement, n’apprécierait pas la récente évolution de CNN et pourrait bien disposer de cette chaine, non essentielle au conglomérat.