En finale pour la présidence de Public Sénat – la décision ne sera prise que le 19 avril – on trouve sans grande surprise le président actuel (Emmanuel Kessler) contre le journaliste politique Jean-François Achilli. Le premier incarne la continuité – et l’indépendance de Public Sénat qui est l’une des coûteuses facettes de l’exception culturelle française. L’autre, la proximité avec Emmanuel Macron – qui a déjà réussi à imposer ses candidats à l’AFP et à LCP-AN – et la possibilité d’une fusion avec LCP-AN justement.
Kessler défend son bilan
En attendant le choix du Sénat, Emmanuel Kessler ne se prive pas d’interventions médiatiques pour soigner son bilan. Ainsi, sur France Info : « On est dans l’action, dans l’énergie. Il y avait plus de 60 personnes mobilisées toute la journée pour une antenne en continu de 11h30 à 23h30, avec beaucoup de moyens techniques, un plateau exceptionnel dans la salon des conférences du Sénat », a‑t-il expliqué, enfonçant le clou : « On rend ça passionnant en étant proches de citoyens, en leur permettant de s’exprimer. Et puis on a essayé de montrer à quoi sert le Sénat ».
Pas assez Macron compatible ? Obstacle ou avantage ?
Cependant une autre partie de ce même interview, si elle peut être appréciée au Sénat, ne le sera guère en haut lieu : « Il y a eu quand même une leçon politique assez forte lors de ces élections. L’effet Macron a été stoppé au Sénat. Certes, ça pouvait être anticipé parce que ce sont les conseillers municipaux élus en 2014 qui ont voté et La République en marche n’existait pas. On s’attendait quand même à une poussée, hors ça a été plutôt une régression de la part de LREM ». Message subliminal : le Sénat n’est pas sous le contrôle d’En Marche, or comme celui-ci a un droit de regard direct sur la présidence de Public Sénat, la chaîne ne doit pas non plus être contrôlée par l’Élysée.
Au Figaro, il a été plus clair encore : « trois ans, c’est court pour mener à bien sa mission: j’espère pouvoir la prolonger. Je suis candidat à un deuxième mandat, qui me permettra d’aller au bout de mon engagement ». Clamant qu’il avait 24.2 millions de téléspectateurs en décembre 2017 – qui le croira ? Il s’oppose toujours à la fusion et défie l’Élysée : « je n’y suis pas favorable. En revanche, je pense qu’il faut encore intensifier l’harmonisation de nos grilles de programmes et la mutualisation de nos moyens ». Et au Monde, en janvier 2018, il croit bon de préciser : « pour l’instant, ni le Sénat, ni l’Assemblée nationale ne souhaitent cette fusion. Les deux chaînes reflètent le système de bicamérisme français. Et si fusion il y a, elle ne se décidera pas à l’Elysée ou à Matignon mais au Sénat et à l’Assemblée ».
Achilli en embuscade
De son côté, Jean-François Achilli, qui a connu par le passé une rivalité avec Jean-Jacques Bourdin sur RMC, reste étonnamment discret dans les médias. Tout juste sait-on de lui ces derniers temps qu’il a échangé avec des lycéens à Bastia lors de la semaine de la Presse fin mars 2017 après avoir « rencontré une cinquantaine d’enseignants dans le cadre d’une formation à l’Éducation aux Médias et à l’Information » ou qu’une politologue caennaise de 37 ans qui a eu une « brève liaison » sur deux week-ends en 2014 avec lui a été condamnée pour harcèlement. Rien ne filtre de lui, à part, selon le JDD, qu’il « fait figure de grand favori » car il est favorable à la fusion LCP-AN – Public Sénat.
Qui, des conservateurs du Sénat ou de Macron, aura raison ? Réponse le 19 avril.