L’histoire des trente dernières années regorge de fake news répercutées par des médias autoproclamés officiels, et prétendant de ce fait être vertueux. Ces médias viennent d’en donner un nouvel exemple ubuesque.
La mort et la résurrection du journaliste ukrainien Arkadi Babtchenko, observée sous l’angle à la mode des fake news, et non sous celui d’éventuels jeux de tel ou tel service secret, restera assurément dans les annales de l’histoire de la désinformation, celle menée au quotidien par des médias qui se prétendent seuls détenteurs de la légitimité médiatique. Particulièrement en France. Une fake news aussi ubuesque que Timisoara (pseudo charniers lors de la chute de Ceaucescu en Roumanie) ou les armes de destruction massive présentées par les États-Unis devant l’ONU, toutes proportions gardées bien entendu. La question n’est d’ailleurs pas celle de la grosseur du mensonge.
Les faits ?
Mardi 29 mai 2018, Arkadi Babtchenko est annoncé mort par Kiev. Il est réputé pour être l’un des journalistes russes parmi les plus engagés contre Vladimir Poutine. Sa mort, assassiné, ne pourrait qu’accréditer l’idée occidentale en vigueur, selon laquelle le président russe serait un dictateur ou pire une menace pour la démocratie en tant que telle, à l’échelle universelle. Mais Arkadi Babtchenko est réapparu le mercredi 30 mai, bien vivant… lors d’une conférence de presse, cela ne s’invente pas. Une conférence de presse organisée par les services de sécurité ukrainiens. Le tout dans le cadre des tensions entre l’Ukraine et la Russie. Ainsi que l’écrit Franceinfo le 1er juin 2018 : « Les journalistes sont d’abord stupéfaits, puis soulagés ». Sa mort serait une mise en scène destinée à protéger le journaliste d’une menace imminente de mort. Les services ukrainiens font donc mine que le journaliste a été « tué » (officiellement)… pour qu’il ne meure pas. C’est la version officielle. Notons qu’une photo du journaliste baignant dans « son sang » (en réalité du sang de cochon, selon la version ukrainienne post-résurrection) a même été diffusée lors de l’annonce de son « assassinat ».
Que la version du faux assassinat organisé par des services de sécurité malins pour protéger un opposant à Poutine (considéré comme menant le camp du Mal ici comme ailleurs) soit véridique importe finalement peu, et nous n’en saurons sans doute rien avant longtemps. Par contre, le mode de réaction des médias occidentaux massivement antirusses, sinon russophobes, et comme naturellement anti Poutine, est révélateur : toute la presse européenne, et a fortiori française, est apparue pour ce qu’elle est, une machine de propagande capable de diffuser une fake news de cette sorte, l’assassinat d’un journaliste opposant de Poutine qui n’est pas mort. Ce pourrait être comique si cela ne traduisait pas la triste réalité contre-démocratique de nos pays quotidiennement donneurs de leçons en ce domaine. Et particulièrement à l’égard des médias russes, que l’on se souvienne de l’agacement du président Macron envers Russia Today et Sputnik, agacement présidentiel à l’origine de la loi anti fake news en préparation du côté du gouvernement français.
Des médias pris le fake dans le sac ?
Ils l’affirment, comme par exemple Stéphane Siohan, correspondant à Kiev pour divers médias français : « On a tous commencé à contacter nos sources pour vérifier : ses collègues, sa famille, des ministères… ». Et là… Aucun doute ! Babtchenko est bel et bien mort, si bien qu’articles, Unes ou nécrologies s’emballent. Quoi de plus normal puisque le journaliste russe opposant à Poutine est mort assassiné, sans doute par les méchants, comprendre les russes, c’est sûr et certain, et… de « sources » sûres (plurielles et vérifiées, pas de doute). Finalement, les médias occidentaux sont prêts à peu douter de cette mort puisqu’il est acquis, dans leur vision du monde, que la Russie est un pays qui « assassine ses opposants » et que Poutine « est » contre la liberté de la presse. Un dogme de foi ne se met guère en doute. Fleurs, veillées, mémorial en hommage aux journalistes assassinés, la machine s’emballe à Kiev, l’Ouest enchaîne. Fake et double fake ! Babtchenko n’est pas mort et l’information est fausse. Ce qui n’empêche pas les médias français de diffuser une autre « information », selon laquelle la Russie menaçait (justement) de l’assassiner. Accréditation et diffusion de fake news, on se demande ce que la loi française à venir prévoira pour ce délit…
Dans la masse médiatique officielle ayant relayé la fausse mort du journaliste, quelques perles méritent d’être récompensées, à commencer par le quotidien dit de « référence » Le Monde pour cette superbe Une.
Le quotidien remporte la palme de la fake news, pas de doute. D’autant plus qu’il est daté du 31 mai 2018, autrement dit… du lendemain de la résurrection de Babtchenko. Lire Le Monde le 31 mai c’est s’informer au sujet d’un journaliste assassiné dont tout le monde sait alors qu’il ne l’a pas été. Notons que Le Monde est avec Libération l’un des fers de lance de la lutte anti fake news en France. La question se pose maintenant de l’appréciation que les rédactions de ces journaux vont attribuer à leur propre travail…
La preuve par Libération justement : « Y a pas mort d’homme », en Une. Un double effet espéré :
- que l’humour dégonfle l’affaire
- que cela apparaisse comme une sorte de gaminerie sans importance avec le « y a pas » des cours de récréation.
Objectif ? Évacuer d’un trait de Une ce fait : la propension des prétendus combattants anti fake news à diffuser de beaux exemples de ces dernières, entre deux interprétations très orientées du réel. Le Monde n’est d’ailleurs pas en reste en ce domaine puisque le 4 juin le quotidien s’attache à démontrer que la fausse mort de Babtchenko aurait en réalité était une manœuvre permettant de repérer une « liste de 47 cibles d’assassinats ». Autrement dit, Le Monde poursuit la diffusion de la propagande de Kiev.
Que dire ? Sinon que les « rois des médias officiels » sont nus ?
Bonnes consciences d’Occident toujours prêtes !
Ces deux exemples sont déjà ubuesques. Ils le sont d’autant plus que sur la base des « informations » d’assassinat, les bonnes consciences d’Occident se sont soulevées contre la tyrannie et pour la liberté ! No Passaran et barricades twitterisées à gogos !
Pathétique ? Oui. Le mot est juste : ce qui reste de presse en France et ses prétendus « bonnes consciences » en permanence sur les écrans et dans les studios sont hélas pathétiques. Il faut dire que l’ensemble du système médiatique est fortement aidé pour l’être, pathétique. À commencer par l’AFP .