Le 5 juillet dernier, Bill Shine a rejoint officiellement la Maison-Blanche pour occuper le poste de chef de cabinet adjoint, en charge de la Communication. Pour la première fois, Trump disposera d’un collaborateur qui connait intrinsèquement le monde de la télévision, depuis plus de vingt ans. Shine, partant de la base, s’était hissé au sommet en devenant le plus proche collaborateur du fondateur et dirigeant de Fox News, Roger Ailes, puis a continué pour un temps à assister la direction après le départ de ce dernier.
Les médias ont différemment rendu compte de la nouvelle. De façon neutre et factuelle, comme le Telegraph, qui explique que Trump est frustré par sa couverture médiatique alors que se profile la dernière ligne droite avant les élections partielles de l’automne. Ou de façon plus critique, comme pour USA Today, qui a mis l’accent sur les échecs successifs de tous les occupants de cette fonction depuis la démission de Hope Hicks, 29 ans, la très proche et très loyale organisatrice de la campagne de Trump. La moutarde lui était parait-il monté au nez après son harcèlement par les démocrates du Congrès qui voulaient la coincer dans l’affaire Russe. Hicks a démissionné en février, et ses successeurs n’ont pas été à la hauteur. Hicks, après s’être mise au vert, serait maintenant en discussion pour plusieurs emplois à haut salaire dans le secteur privé.
La plupart de médias ont été hostiles dans leurs commentaires, soutenus par les démocrates et certains #Nevertrumpers qui voient dans la nomination de Shine (qui aurait enterré chez Fox les accusations de harcèlement sexuel contre son patron Roger Ales comme de son ami Bill O’Reilly), un plan machiavélique destiné à « contrer » les accusations contre Trump de la star du porno Stormy Daniels. The Hill, dans le genre moraliste, rappelle que certains conservateurs pensent que Shine devrait faire l’objet d’une enquête pénale afin de vérifier s’il a commis des actes illégaux dans la protection de ses amis. Pour protéger Trump naturellement. Mais les plus venimeux, comme Vox ou The Gardian, se sont déchainés.
Les articles sont unanimes sur un point. Shine est proche du commentateur du soir Sean Hannity, self made man richissime des radios locales (il a ainsi quadrillé les États-Unis), passé ensuite à la télévision. Champion des taux d’écoute, judoka confirmé, Hannity parle à Trump tous les soirs afin de faire le bilan de la journée. Il a été instrumental dans la « délégitimisation » du FBI et du procureur Mueller. Il est l’agent principal de propagande de Trump. À coup de massue!
Mais c’est l’ensemble de Fox News qui maintenant, à quelques exceptions, emboite le pas de Trump. On se souvient que Trump avait laissé entendre qu’il souhaiter créer « son » groupe de médias. Depuis, les Murdoch se sont semble-t-il calmés et jouent le jeu. Tout comme l’équipe du matin Fox & Friends, qui elle vise l’Amérique familiale, plus centriste, très religieuse, toujours prête à valoriser les réalisations de l’administration Trump. En constant contact avec Trump en direct, et avec le public (messages twitter) sans oublier des invités plus « bourgeois » que ceux d’Hannity, ils représentent la boite à idées de la journée, ou plutôt la boite à tweets de Trump. Puis, il y a les autres journalistes du soir, comme Tucker Carlson et Laura Ingraham, qui collectivement avec Hannity, ont écrasé les taux d’écoute de CNN « prime time », cependant que MSNBC suit Fox de très près dans le créneau du public amoureux des conspirations.
Les premiers cris d’alarme anti-Fox avaient été lancé en début d’année par le Washington Post, suivi du New Yorker. Motif : Trump est « Foxo-dépendant » pour sa propagande comme pour son information en direct sur l’état de l’opinion, tandis que Fox news est « Trumpo-dépendant » pour ses taux d’écoute.
Nul doute que la nomination de Bill Shine à la Maison-Blanche va renforcer une osmose déjà bien engagée. La question restant : au service de quelle politique ?