Tout a été dit ou presque sur le naufrage de Presstalis, les chantages de la CGT, les gabegies, les sur salaires, l’absence de professionnalisme, la ponction sur les petits éditeurs comme nous vous le disions en février 2018. Maintenant l’État détourne les fonds de soutien à l’innovation en faveur de la presse vers la messagerie en quasi faillite.
Le Fonds stratégique pour le développement de la presse
Le FSDP a été créé en 2012 pour aider au développement de tous les types de presse , en ligne comme imprimés, par le biais de subventions (non remboursables) attribuées sur dossiers de présentation de projets innovants : formation, liaisons écrit/digital, améliorations techniques etc. Administré par le ministère de la culture, le fonds est aussi ouvert aux agences de presse.
Le budget du fonds est voté annuellement dans le cadre de la loi des finances et ne peut être modifié en cours d’année que par une loi rectificative. Pour 2018 ce budget est de 18,2 millions d’euros.
Accord secret grands éditeurs/ministère
C’est en catimini qu’un accord dont les détails ne sont pas encore rendus publics (au début d’octobre 2018) a été trouvé entre les pouvoirs publics et les principaux utilisateurs de Presstalis : les grands quotidiens nationaux Le Monde, Le Figaro, Libération, Aujourd’hui en France et une partie de la presse quotidienne régionale.
Au terme de cet accord la moitié des sommes disponibles sur le fonds iraient au sauvetage de la société de distribution, soit 9M€ pour l’année 2018. Mieux, cet « accord » est reconductible pour trois ans, autrement dit la moitié des subventions accordées pour 2019, 2020 et 2021 iront à Presstalis au détriment de l’innovation et de la presse digitale.
Indignation du syndicat de la presse en ligne
Dans un communiqué du 2 octobre 2018, le Spiil a condamné cet arrangement entre amis :
« Depuis 2009 le Spiil n’a de cesse de dénoncer les modalités du soutien de l’État au secteur de la presse. Dans son panorama des aides, publié annuellement depuis 2015, il fait le constat d’un statu quo depuis les États généraux de la presse (2008), avec une proportion des aides à la presse réservées au papier identique à celle de 2008 en 2016.
Le Spiil condamne l’opacité totale de la prise de décision qui a abouti, sans aucune concertation hormis avec un tout petit nombre d’éditeurs clients de Presstalis, à utiliser un fonds censé bénéficier à toute la presse sans discrimination de support pour sauver un acteur industriel de la presse papier
(…)
Le Spiil saisit donc, au titre de la nécessaire transparence des aides à la presse, la Ministre de la Culture ainsi que la Présidente du FSDP et demande la publication de l’accord passé entre l’État et Presstalis pour connaître l’ensemble de ses modalités. »
La pilule est également difficile à avaler du côté de la presse imprimée non quotidienne. Pour 2018, 38% des 9M d’euros disponibles hors aides à Presstalis ont été attribués à un seul acteur économique : le groupe La Dépêche du Midi de Jean-Michel Baylet comme nous vous le disions il y a quelques jours, laissant des miettes aux autres intervenants du secteur. Au moment où nous mettons en ligne, la ministre de la culture François Nyssen n’avait pas répondu aux interrogations du Spiil.