Mondadori France pourrait passer dans l’escarcelle de Reworld Media. Mais l’intersyndicale est vent debout contre la cession et affirme que ce dernier n’est pas « un acteur crédible » tandis que la direction semble jouer un poker menteur, coincée entre les nécessités économiques et les syndicats. Au premier semestre 2018, Mondadori France a vu ses revenus baisser de 7,3% à 152,9 millions d’euros sur un an. Les revenus publicitaires print et web ont aussi baissé de 7,3% sur la période
Le précédent Lagardère
« Début septembre, la direction française nous certifiait que Reworld Media n’était pas un acteur crédible à la reprise de la filiale hexagonale », explique un syndicaliste de Mondadori France à Fashion Network. Mais d’après celui-ci, « le groupe italien est en train de brader Mondadori France parce qu’il souhaite se débarrasser de la presse pour concentrer son activité sur l’édition de livres ». Les syndicats craignent en effet pour l’emploi – Mondadori France emploie 700 personnes, 1000 en comptant les pigistes et les prestataires. Dans un communiqué du 11 septembre dernier les syndicats expliquaient déjà que « la quasi-totalité des salariés, toutes catégories confondues, des titres cédés [à Reworld] par Lagardère en 2014 y ont perdu leur emploi ».
Fin des rédactions remplacées par des agences
L’intersyndicale qui regroupe la CFDT, la CGC, la CGT, FO et le SNJ indique dans un communiqué de presse que « la quasi-totalité des magazines publiés par Reworld n’ont plus de rédaction. […] Ce sont des agences de production de contenus qui les conçoivent et les réalisent. Et les services transversaux indispensables à toute entreprise de presse sont aussi largement externalisés ». Ce qui laisserait augurer d’importantes suppressions de postes. Le 18 octobre 2018, un nouveau rassemblement avait lieu devant le ministère de la Culture à l’initiative de l’intersyndicale qui estime que « toute une filière [de la presse] déjà très ébranlée, subirait les effets » de la reprise de Mondadori France par Reworld.
Près de 250 salariés se sont rendus à ce rassemblement devant le ministère de la Culture, à l’appel de l’intersyndicale. Le député LREM des Hauts-de-Seine Lauriane Rossi a déjà sollicité le nouveau ministre Franck Riester sur ce sujet. Cependant, dépourvu de cabinet une semaine après sa nomination, ce dernier ne semble pas avoir les clés du dossier.
Lettre ouverte de Grazia
Dernier avatar d’une crise dans la crise, la rédaction de Grazia a publié une lettre ouverte au PDG de Reworld Média, Pascal Chevalier, dans Libération : « vos méthodes et la raison d’être de votre entreprise, décrites dans tous les articles qui vous sont consacrés depuis peu, sont aux antipodes des nôtres et de ce que nous sommes. Les simples mots ‘presse’ et ‘journalisme’ semblent absents de vos sites comme de vos déclarations […] Une fois que vous aurez acheté Mondadori, mettrez-vous en place une entreprise de presse ou une agence de publicité et de « brand content » ? Souhaitez-vous avoir des journalistes et leurs cartes de presse ou des scribes qui créeront du contenu pour des publicités dissimulées ? […] Nous avons, monsieur Chevalier, envie de vous rencontrer, d’écouter votre projet éditorial et plus encore de vous entendre répondre à nos questions ». On ne saurait être plus clair…
Annexe: les titres concernés
Mondadori France
Grazia, Biba, Auto Plus, Sport Auto, l’Auto Journal, Top Santé, Dr Good ! Vital, Pleine vie, Sciences et vie, Réponses photo, Modes & Travaux, l’Ami des jardins, Closer, Télé Star, Télé Poche, Nous Deux, le Chasseur Français.
Reworld Média
Marie France, Be, Le Journal de la Maison, Maison&Travaux, Gourmand, Auto Moto,Télé Magazine, Papilles, Football 365, Campagne décoration, Mon jardin ma maison, Vie pratique féminin. Liste non exhaustive