De nombreux intellectuels et analystes ont dénoncé le caractère totalisant et totalitaire des GAFAM dans leur entreprise de numérisation d’une partie croissante de la population du globe, et leur exploitation commerciale de ces données. Par un clin d’œil malicieux – ou par étourderie naïve – le géant de Californie pourrait s’installer au cœur de Berlin, dans l’ancien siège de la police politique de l’Allemagne de l’est, la Stasi. Récit.
Un nouveau campus contesté
Depuis plusieurs années Google fait les yeux doux à Berlin pour y installer un nouveau « campus », en réalité un espace de plus de 3000m2 de bureaux, de « cafés de travail » et autres espaces de travail partagé. Le premier quartier visé fût Kreuzberg. Ce quartier berlinois résulte de la fusion de Kreuzberg proprement dit (côté ouest, secteur américain) avec l’arrondissement de Friedrichshain anciennement secteur est. Considéré comme un quartier branché et bobo, il comporte également une partie (“Petit Istambul”) habitée par une forte minorité turque.
La population du quartier craignant une forte hausse des loyers et des prix des habitations s’est opposée au projet du californien sous le slogan « Fuck off Google » (va te faire voir Google, une autre traduction plus radicale est possible).
La municipalité câline Google
Une partie des élus municipaux, émus par cette résistance, a offert ses services, des locaux, des aides. Le conseiller municipal Gregor Hoffman se serait offert lui-même, ainsi que sa femme et ses enfants si Google lui avait demandé. Le quotidien Berliner Zeitung rapporte ainsi que Gregor offre à Google de s’installer dans le centre de Berlin, à Lichtenberg exactement.
Un emplacement idéal, plastronne l’élu. Un moyen de moderniser l’arrondissement. De quel bâtiment s’agit-il donc ? Tout simplement de l’ancien quartier général de la Stasi, la police politique de l’Allemagne de l’est. La Stasi connue pour espionner la population. Le très beau film La Vie des autres (Das Leben der Anderen) de Florian Henckel von Donnersmarck, sorti en 2006, est une parfaite illustration de ce processus d’espionnage massif. D’aucuns disent que Gregor Hoffman a fait cette proposition iconoclaste pour souligner le caractère intrusif des GAFAM. D’autres que son projet est plus naïf que provocateur. Au moment où nous publions, Google n’avait pas répondu à la proposition.
Photo : image tirée de “La vie des autres”, détournement.