Subrepticement, L’Obs semble devenir un magazine people à l’anglo-saxonne, du moins si l’on en croit la Une de son numéro daté du 28 février au 5 mars 2019, et au service de la vision du monde du président Macron. Un numéro consacré à « Salvini, le poison populiste ».
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Que L’Obs soit un hebdomadaire très intégré dans le système médiatique officiel, cela ne fait plus de doute. En particulier quand le pouvoir politique officiel se croit menacé ou bien en période électorale, ce qui est le cas actuellement ainsi que les nombreuses rencontres du président avec les citoyens l’attestent. De même que la tribune du même président, peu lue mais publiée dans la plupart des équivalents du Monde de l’Union Européenne. La Une de L’Obs de la semaine du 28 février au 5 mars 2019 ne fait donc pas dans la dentelle, vu que l’heure est grave, d’aucuns diraient même qu’elle ressemble à la presse des années 30. Le visage en noir et blanc de Salvini, sur cette couverture, ajoute à l’effet :
L’Obs ou le poids des mots
- « Le poison populiste »: « poison », autrefois certains hebdomadaires de triste réputation eussent écrit par exemple « le rat » ou « le parasite ». L’Obs choisit « le poison». La rhétorique de fond est identique.
- « Il hypnotise les italiens »: qui peut douter qu’il s’agit là, l’hypnotisation de l’ensemble d’un peuple, d’un fait et d’une information journalistique vérifiée et non d’une sorte de vague rumeur ?
- « Il s’allie avec Le Pen » : entendre « avec le Mal ».
- « Il menace l’Europe »: comme pour la question de l’hypnotisme, il n’est pas douteux que des faits vérifiés vont venir, dans les pages de l’hebdomadaire, accréditer cette opinion émise par la rédaction de L’Obs. Mis quelle Europe ?
Un dossier à charge
Le dossier s’ouvre sur une photographie en noir et blanc (clarté évidente du symbole) où Salvini, de dos, fait face à une foule portant nombre de drapeaux de la Lega, son parti politique que L’Obs traite du pire, comme tous les médias officiels, c’est-à-dire d’être de la fameuse extrême-droite, celle qui menacerait l’Europe. Pour L’Obs, la « peste », celle du président Macron, revient. Le danger, ce n’est cependant plus le Duce, mais c’est le « capitano ». Et c’est aussi en Italie. L’Obs pointe du doigt la popularité croissante de Salvini, ce qui effraie l’hebdomadaire, mais oublie d’en analyser les causes. Il serait d’autant plus dangereux qu’il a une amie en Marine Le Pen ce qui est la deuxième frayeur de L’Obs.
La nouvelle résistance
Une fois passé le portrait à charge du ministre italien de l’intérieur, l’hebdomadaire donne à lire un article intitulé rien moins que rien que « Le front des résistants ». Il s’agit d’une fronde d’élus qui refusent d’appliquer les lois décidées par le pouvoir politique pourtant élu démocratiquement et représentant incontestablement le peuple italien, refus que L’Obs, hebdomadaire réputé vertueux, devrait sans doute trouver détestable. Ce ne sera pas le cas, au contraire, car c’est de la « résistance », de son point de vue. L’article laudateur trace le portrait d’un maire de Naples, figure de proue des anti-Salvini, faisant des selfies avec des migrants. Les choses sont donc claires.
Elles sont aussi fort dangereuses puisque Salvini dispose, avec Le Pen, d’une alliée puissante qui pourrait l’aider à changer le rapport de forces au parlement européen avec la constitution d’un groupe populiste important, craint L’Obs. Le danger serait d’autant plus réel que les deux amis disposeraient « des millions de Poutine », auquel semble-t-il, à lire la presse française, plus aucune élection n’échapperait. D’ailleurs, comme un diable ne sort jamais seul d’une boîte, L’Obs ajoute un autre « repoussoir » en la photo de Marion Maréchal accompagnée de son compagnon italien, Vincenzo Sofo, supposément « théoricien » de la Lega, malgré son jeune âge. Ils sont tous là. Et Vincenzo Sofo n’est pas n’importe quel jeune homme amoureux : il est « le taliban » de Salvini. C’est que les comparaisons entre tueurs islamistes musulmans et défenseurs de l’enracinement européen pleuvent actuellement à flots en France sans que L’Obs ne paraisse s’émouvoir de l’incongruité de telles comparaisons, au contraire.
Dix pages de dossier, d’où il ressort que le danger est non seulement pressant mais que Salvini pourrait bien être celui qui mettrait un terme, liste non exhaustive, à l’Union Européenne, la démocratie, l’humanisme, l’universalisme, les droits de l’homme, les libertés, dont celle de la presse… dans le cadre d’une sorte d’internationale des gens dits dangereux. Macron veille, bien sûr. Il n’est du reste pas seul : la page suivant le dossier présente un Edouard Philippe fermement campé sur ses jambes, comme prêt à l’affrontement, avec un titre évocateur, « Déloge-moi si tu peux ». L’Obs, un hebdomadaire dont l’indépendance d’idées s’affirme à chaque numéro.