Le 19 mars 2019, l’émission C dans l’air de France 5 consacrait une nouvelle émission à son dada, ceux qui ne sont pas amoureux des fonctionnaires de Bruxelles, nommés différemment selon les jours : extrême-droite, nationalistes, populistes… Quand la présentation faite par une chaîne d’État se transforme en lynchage d’un adversaire politique.
À l’image de la récente journée consacrée aux populismes en Europe par Franceinfo, France 5 se penche sur le même « phénomène », avec un titre presque identique : « Europe, la tentation populiste », en 95 minutes. Le site de la chaîne présente les choses ainsi :
« Après la diffusion en mars 2018 du documentaire « Terrorisme, la réponse française », la rédaction de C dans l’air propose une nouvelle soirée spéciale mardi 19 mars 2019 à 20.50 avec la diffusion du « Europe : la tentation populiste ». À la veille du Brexit et de la sortie de la Grande-Bretagne de l’Union européenne, les équipes de C dans l’air ont suivi la montée de la vague populiste qui, en Italie, en Hongrie, en Allemagne mais aussi en France, risque de faire basculer les prochaines élections européennes. Depuis l’arrivée des populistes au pouvoir en Italie jusqu’à la crise des Gilets jaunes en France, la réalisatrice Marie Lorand raconte ces neufs mois qui ont fait vaciller l’Europe. Ce documentaire suit les peuples en colère mais également les politiques, dont Emmanuel Macron, dans leurs déplacements européens. Marc Lazar, Pascal Perrineau, Jean-Dominique Merchet, Thomas Snégaroff, Françoise Fressoz et Jean-Dominique Giuliani, des experts qui interviennent tout au long de l’année dans C dans l’air, apportent leurs commentaires et analyses sur cette histoire en mouvement. Caroline Roux est une nouvelle fois partie à la rencontre de ceux qui font l’histoire. Elle a ainsi interviewé Luigi di Maio, vice-président du conseil italien, Karin Kneissl, ministre des Affaires étrangères en Autriche, Nathalie Loiseau, ministre chargée des Affaires européennes, Daniel Cohn Bendit, ex-député européen et Marine le Pen, présidente du Rassemblement National. »
Cela se passe de commentaires, en particulier au sujet des noms de journalistes commentateurs.
Lagardère studios producteur
Notons cependant que ce documentaire n’est pas uniquement une production de France 5 malgré les apparences, mais de Maximal productions, c’est-à-dire de Lagardère studios. Loin d’être anodin : c’est le premier groupe européen de production audiovisuel, composé de 28 sociétés réparties sur 3 continents.
Un regard sur leur site montre qu’il s’agit d’une machine de combat idéologique ce qui explique sans aucun doute le ton général de C dans l’air, celui de l’émission consacrée le 19 mars aux populismes en particulier. Le groupe adhère à la « charte de la diversité » et est partenaire de l’école miroir, « établissement qui forme gratuitement des jeunes issus de quartiers défavorisés aux métiers des arts, du spectacle et de l’audiovisuel. Dans le cadre de ce partenariat, l’entreprise a financé les « books » d’un certain nombre d’élèves de l’école. Véritable outil professionnel, ces « books » ont ensuite été diffusés auprès des producteurs et directeurs de casting des différentes sociétés de production ». Christophe Thoral, actuel président de Lagardère studios, a d’abord été appelé aux côtés de Denis Olivennes en 2014. Sur de telles bases, indiquées sur le site de Lagardère studios, qui peut croire un instant qu’un documentaire consacré aux « populismes » va être loyal ?
Et un documentaire à charge… un !
C dans l’air ne brille vraiment pas par son honnêteté malgré les apparences liées aux moyens économiques et techniques. Outre le fait que ce nouveau documentaire s’inscrit dans la lignée de celui diffusé en décembre 2018 (C dans l’air a un dada, on vous le disait), cette « soirée spéciale » est pleine de gros sabots.
Florilège
- Le début : « Après Trump et le Brexit, l’Europe prépare-t-elle un nouveau séisme ? ». C’est la problématique de la soirée.
- L’origine du « problème » (« comment en est-on arrivé là ?» est-il demandé) : c’est le Brexit. Pas un mot sur le référendum français de 2005 qui a été volé et peut être considéré pourtant comme un point de départ plus juste de la prise de conscience des peuples face aux incongruités politiques des « élites », ce qui pourrait être une assez bonne définition du populisme.
- Tous les analystes invités font partie des milieux anti populistes. En dehors d’eux, seuls des personnalités politiques dites populistes ont la parole. Mais cette parole est analysée selon un angle unique. C’est que, et Cohn-Bendit le dit à Caroline Roux : « Les peuples n’ont pas toujours raison. Regardez les Allemands ! ». Un beau résumé de la conception européiste de la démocratie dite de Bruxelles, et une des sources de la colère populaire continentale.
- Les mots « populistes », « nationalistes » et « extrême droite » sont amalgamés en permanence, au sujet de chacun des partis et de chacune des personnalités envisagés. Y compris et de façon presque incroyable à la fin de la première heure du documentaire : c’est le moment d’extraits d’une discussion entre Caroline Roux et Marine Le Pen. La première parle de « nationalistes ». La seconde rétorque : « Pourquoi utilisez-vous ce vocabulaire dont vous savez pertinemment qu’il est faux et à quoi il réfère ? » La journaliste demande quel mot utiliser. Madame Le Pen répond : « Les nationaux, pourquoi pas ? » et explique en quoi les populistes ne sont justement pas nationalistes au sens des Années 30 auxquelles ce documentaire veut nous conduire. Il n’empêche : dans la seconde qui suit, le documentaire nous conduit à « La rencontre des nationalistes »… Ce qui permet d’intégrer Steve Bannon.
- Le documentaire note des reculs des libertés dans les pays « illibéraux », insistant en particulier sur l’Italie, la Pologne, la Hongrie. Et fait le lien avec le RN. C’est que le danger pèserait, bien que nous ayons en Macron un sauveur possible, meilleur qu’une Merkel dont il est reconnu qu’elle a mal géré la crise des migrants de 2015, même si c’était compliqué dit-on. Du reste, Cohn-Bendit repasse par là pour nous dire ceci : « L’inhumanité gagne ceux qui n’étaient pas inhumains ».
L’ensemble est de cet acabit. On comprend mieux le mot de « lèpre », il réfère à ceux qui seraient « inhumains », ceux qui ne sont pas pour cette UE là mais pour une autre forme d’organisation européenne et pour son identité. N’est-il pas surprenant de voir que l’on utilise aujourd’hui des mots tels que « lèpre » ou « inhumain » à l’encontre d’européens ? Comme ils furent utilisés dans les Années 30 justement, pour désigner des boucs émissaires ? Il ne manque plus que des mots tels que rats ou parasites et en effet l’inhumanité, déjà réellement présente sous sa forme mondialiste, aura trouvé son vocabulaire employé par des personnes se revendiquant de l’humanisme et de la tolérance.