Victime autoproclamée de la ligue du LOL
Léa Lejeune est journaliste économique, militante féministe, et est devenue une figure centrale de l’affaire de la ligue du LOL.
«Le féminisme n’a jamais tué personne, il est temps qu’il s’y mette». Une dystopie dans laquelle les femmes prennent les armes, comme les masculinistes à Montréal et Toronto, pour obtenir l’égalité d’urgence. A votre avis, ça donne quoi? Par @laurenbastide https://t.co/f9p5cwcknh
— Léa Lejeune 👩🏻💻👩🏻🏫🕵🏻♀️ (@Plancash_media) August 21, 2019
La journaliste de 32 ans (en 2019) reste discrète sur sa vie privée, sur laquelle on trouve peu d’informations.
Elle obtient un master en journalisme à Sciences Pô Grenoble en 2010 après une licence en philosophie à l’université Toulouse II Le Mirail. Elle se spécialise dès ses études dans les questions économiques et sociales et les nouvelles technologies.
Elle commence sa carrière en tant que journaliste freelance. Elle écrit, dans la continuité de ses études, sur les questions économiques. C’est à ce titre qu’elle entre en 2012 à la rédaction de Libération : elle y est responsable des sujets sur l’économie numérique et l’industrie automobile. Elle participe également au cahier économique du média, « Eco-futur », sur l’avenir de l’économie. Elle poursuit sa carrière de journaliste économique chez Challenge, où elle arrive en 2014. L’année suivante, elle intègre le service « tech, télécoms et média ».
Elle signe également pour le media des articles sur les inégalités professionnelles femmes – hommes. Elle conjugue en effet en parallèle de sa spécialité économique journalisme et militantisme en écrivant abondamment sur les questions d’égalité professionnelles hommes – femmes. Elle est par ailleurs co-auteur d’un blog féministe intitulé Les Diablogues du vagin, qu’elle crée avec son ancienne camarade de Sciences Pô Grenoble, Ariane Lavrilleux.
En 2014, elle cofonde le collectif Prenons la Une, qui vise à une meilleure représentativité des femmes dans les média. Elle en devient présidente en 2018. A ce titre, elle est souvent invitée en tant qu’experte sur la question dans les media, et donne des cours et conférences à l’ESJ Lille, Sciences Pô Paris, à l’école de journalisme de Grenoble, à Paris 8 ou encore à l’IJBA. Elle est également depuis 2019 membre du Haut Conseil à l’Egalité Femme-Homme.
L’actualité récente l’a faite connaître en tant que « victime de la ligue du LOL », dont le harcèlement aurait d’après elle nuit à sa carrière de journaliste. Elle participe à ce titre à une vidéo Brut pour dénoncer le cyber-harcèlement dans le milieu journalistique, qui serait d’après elle à attribuer au sexisme de ce milieu professionnel. Elle s’inscrit avec ces propos dans la droite ligne du combat militant qu’elle mène depuis des années. A l’examen, son statut de victime est toutefois bien plus flou qu’annoncé, et les tweets incriminés critiques plus qu’injurieux.
Formation
Elle commence ses études en octobre 2004 par une licence de philosophie à l’université Toulouse II Le Mirail. En 2006, elle entre à Sciences Pô Grenoble, spécialité politiques économiques et sociales. Elle en sort diplômée d’un master de journalisme spécialité web en 2010.
Son projet de fin d’étude, une enquête sur le crime féminin, est disponible sur internet via un site dédié.
Parcours professionnel
Elle effectue durant ses études entre 2007 et 2010 plusieurs stages d’un à quelques mois dans La Dépêche du midi, Le Dauphiné Libéré, Télérama, Le Parisien, Libération, Le Post, Rue89, L’Express et L’Expansion où elle écrit principalement sur les nouvelles perspectives économiques
De 2010 à 2012, elle est journaliste freelance spécialisée sur les questions économiques et d’entreprise. Elle participe à L’Expansion, L’Etudiant, L’Entreprise, L’Express, Commerce International, Yahoo!Finances, Rue89.
Durant la même période, elle écrit également en tant que freelance des articles sur les droits des femmes, l’égalité, le féminisme et les sexualité dans Causette, Alternatives économiques, Slate, Rue89, Têtue, Citazine, Les Nouvelles News, StreetPress.
Entre juillet 2012 et août 2014, elle travaille en tant que rédactrice – reporter chez Libération pour « Eco-future », cahier sur l’économie en transformation (innovation technologique, industrielle et sociale) et au service « Economie » sur l’économie numérique et l’industrie automobile.
En septembre 2014 elle entre chez Challenges en tant que journaliste en charge de l’emploi, du social et du patronat. Depuis septembre 2015, elle participe au service « tech, telecoms et media ». Elle participe par ailleurs à la verticale « Femmes » sur site sur le sujet des inégalités professionnelles femmes-hommes.
En 2014, elle cofonde avec d’autres journalistes le collectif Prenons la Une pour militer en faveur d’ « une meilleure représentation des femmes dans les médias et l’égalité dans les rédactions ». Léa Lejeune est moteur dans la création du collectif, qui naît notamment de l’état des lieux de la représentation des femmes dans les media que lui avait commandé en 2013 Claire Alet, rédactrice en chef à Alternatives économiques. Au titre de sa participation dans ce collectif, elle est fréquemment appelée à intervenir en tant qu’experte sur divers média télévisuels, comme Public Sénat, France info, Canal + ou encore CNN
Elle donne par ailleurs des cours et des conférences à l’ESJ Lille, Sciences Po Paris, école de journalisme de Grenoble, Paris 8, l’IJBA. Elle donne également des conférences en tant que spécialiste des questions féministes et cofondatrice de Prenons la Une dans les média et différents évènements féministes.
Elle a annoncé un podcast en préparation, « Ambitieuses », sur les questions d’égalité professionnelle homme – femme.
Victime autoproclamée
Elle a fait la une des médias à cause du scandale de la Ligue du Lol dont elle s’est autoproclamée victime à travers une vidéo de Brut dans laquelle elle témoigne avec Florence Porcel. Dans un article publié sur Slate le 12 février 2019 « J’ai subi des raids de la Ligne du Lol et cela a pesé dans ma carrière », elle explique que le harcèlement des membres de la Ligue du Lol entre 2010 et 2013 lui aurait valu son poste de l’époque. La journaliste fait en effet à l’époque les frais de tweets critiques et de plaisanteries douteuses. Son numéro personnel est également diffusé par des tweetos et elle raconte avoir subi plusieurs appels et canulars téléphoniques. La journaliste fait plus précisément référence dans ses témoignages les vagues de tweets reçus suite à la révélation d’une erreur dans l’un de ses articles. Les enquêtes approfondies sur l’affaire et notamment celle publiée sur Medium le 12 juillet intitulé « Ligue du Lol : ce que les media n’ont pas cherché » montrent pourtant le premier tweet de cette campagne n’émanait pas des journalistes mis en cause dans l’affaire de la Ligue du Lol d’une part, et les tweets de Vincent Glad, le journaliste accusé par Léa Lejeune, étaient en réalité plus critiques qu’injurieux d’autre part. La conclusion de Léa Lejeune elle-même dans son article sur Slate ne correspond pas à l’allégation selon laquelle cette affaire lui aurait valu son poste. Elle affirme finalement seulement que « dans un contexte économique difficile, alors que j’avais encore des progrès professionnels à faire, cela a joué contre l’obtention de mon CDI ». Si la journaliste subi effectivement des moqueries sur Twitter à l’époque de l’affaire, l’attribution des tweets à la Ligue du Lol et aux quelques journalistes aujourd’hui mis en cause s’avère donc hasardeuse.
Parcours militant
Dès ses études, Léa Lejeune s’intéresse aux questions féministes. Elle y consacre d’ailleurs son projet de fin d’étude, avec une enquête sur le crime féminin – et notamment le meurtre. Les résultats en sont publiés sur un site dédié, sur lequel elle se définit elle-même comme « passionnée par les questions féministes ».
Son blog Les Diablogues du vagin vise à traiter les sujets d’actualité sous un angle féministe. Elle y assure la partie écrite tandis qu’Ariane Lavrilleux y publie des formats audio. Il témoigne de la culture féministe de la journaliste, avec la mise en avant de concepts militants tels que le « patriarcat », le « mansplanning » ou encore la « culture du viol ». Toujours en ligne, le blog n’est plus alimenté depuis 2012.
Léa Lejeune est plus particulièrement préoccupée par la question de l’égalité professionnelle homme-femme dans les milieux médiatiques. Elle co-fonde en 2014 pour militer sur le sujet le collectif Prenons la une, qui réunit des femmes journalistes désireuses de mettre en avant une plus grande présence féminine dans les média et de lutter contre le sexisme dans ces instances. Léa Lejeune est présidente du collectif depuis 2018.
Avec l’affaire de la Ligue du Lol, la militante se découvre un nouveau sujet de prédilection, celui du cyber-harcèlement. Forte de son expertise avec Prenons la une, devenu en 2018 une association de loi 1901 pour pouvoir proposer aux victimes de violences sexistes dans les médias une aide juridique, elle s’attaque toutefois à ce nouveau sujet sous le statut de victime.
Ce parcours médiatique et militant lui vaut de devenir membre depuis 2019 du Haut Conseil à l’Egalité entre les Femmes et les Hommes
Collaborations
Elle fonde avec une ancienne camarade de Sciences Pô Grenoble, Ariane Lavrilleux, un blog d’actu féministe : Les Diablogues du vagin. Le titre du blog fait références d’un côté à la pièce féministe Les Monologues du Vagin, et de l’autre aux Diablogues, un recueil de courtes pièces de théâtre de Roland Dubillard.
En 2013, Claire Alet, rédactrice en chef à Alternatives économiques, commande à Léa Lejeune une enquête sur la représentation des femmes dans les média. Le travail de la journaliste fait état d’une large sous-représentation des femmes.
Suite à cette enquête, Léa Lejeune et Claire Alet fondent en 2014 le collectif Prenons la Une avec d’autres femmes journalistes qui partagent leur ressenti d’une inégalité professionnelle entre hommes et femmes dans les média, parmi lesquelles Ariane Lavrilleux, Mélissa Theuriau, Ruth Elkrief, Audrey Pulvar ou encore Rokhaya Diallo. Le collectif se lance via une tribune publiée le 4 mars 2014 dans Libération, qui recueille en quelques jours plus de 800 signatures. L’objectif de l’association est donc dans un premier temps de travailler à « une meilleure représentation des femmes dans les médias et l’égalité dans les rédactions ». L’association, qui compte aujourd’hui 140 personnes, devient en 2018 suite au mouvement #MeToo une association de loi 1901 et développe une activité d’aide aux victimes de violences sexistes dans les média lui permettant de se constituer co-partie civile avec d’éventuelles victimes. Léa Lejeune devient la même année présidente de l’association, Claire Alet présidente d’honneur, et Aude Lorriaux et Lauren Bastide porte-paroles.
Ce qu’elle gagne
Non connu
Sa nébuleuse
Claire Alet : elle entre à la rédaction d’Alternatives Economiques en 2011. Elle en est désormais rédactrice en chef et responsable de la rubrique « France ». C’est elle qui commande à Léa Lejeune une enquête sur l’égalité professionnelle entre homme et femme dans les média puis fonde avec elle le collectif Prenons la Une en faveur d’une meilleure égalité professionnelle homme – femme.
Ariane Lavrilleux : ancienne camarade de Sciences Pô Grenoble avec laquelle Léa Lejeune lance le blog Les Diablogues du Vagin. Elle est actuellement journaliste freelance basée au Caire.
Lauren Bastide : journaliste pour Elle Magazine durant plus de 9 ans, elle devient ensuite chroniqueuse pour « le Grand 8 » sur D8, puis pour « Le Grand Journal » de Canal +. Désormais à son compte, elle s’est spécialisée dans des formats podcasts qu’elle produit via le studio de production qu’elle a créé en 2016 avec Julien Neuville. Militante féministe elle aussi, elle fait partie du collectif Prenons la une monté par Claire Alet et Léa Lejeune, dont elle est depuis 2018 porte-parole.
Aude Lorriaux : journaliste et rédactrice freelance spécialisée en politique et société, elle fait partie du collectif Prenons la une monté par Claire Alet et Léa Lejeune, dont elle est depuis 2018 porte-parole.
Marie Kirschen : après une première expérience de pigiste chez Libération et Têtu, elle fonde la revue lesbienne Well Well Well. Désormais rédactrice en chef des Inroks, la journaliste est spécialiste des questions féministes et LGBT. Elle fait partie des premiers signataires de l’Association des Journalistes LGBT, et du collectif co-fondé par Léa Lejeune, Prenons la une.
Elle l’a dit
Sa version de l’affaire de la Ligue du Lol, dans l’article qu’elle publie sur Slate le 12 février 2019 « J’ai subi des raids de la Ligne du Lol et cela a pesé dans ma carrière » : « Entre 2011 et 2013, j’ai subi du cyber-harcèlement répété qui démarrait, à chaque fois, par des tweets ou messages d’un membre de la Ligue du LOL (…) Un jour, ils me sont tombés dessus parce qu’il y avait une erreur secondaire dans un article sur l’intitulé de poste d’un interviewé, le raid a commencé: quarante messages en deux heures qui se moquaient de moi. Prise de panique, j’ai mal réagi et commis une erreur professionnelle, une mauvaise réaction, pour laquelle je me suis confondue en excuses le jour même au sein du journal. Mais le raid a recommencé, redoublé, des dizaines et dizaines de messages »
Sur le lien qu’elle fait entre son engagement à Prenons la Une et l’affaire de la Ligue du Lol, dans l’article qu’elle publie sur Slate le 12 février 2019 « J’ai subi des raids de la Ligne du Lol et cela a pesé dans ma carrière » « Pour ma part, ce que j’ai vécu m’a donné envie de m’engager pour la défense des femmes journalistes, je l’ai fait au sein de Prenons la Une, association qui œuvre pour une meilleure représentation des femmes dans les médias et l’égalité dans les rédactions. Quand Claire Alet, rédactrice en chef à Alternatives économiques, est venue me voir pour monter l’association, il y a quatre ans, j’ai d’abord eu peur que les membres de la Ligue du LOL utilisent cet engagement de nouveau contre moi, mais je me suis lancée. »
Dans une conférence sur le harcèlement dans les médias des Assises du Journalisme en mars 2019 : « Les ressources humaines sont très discrètes dans le journalisme. Ce ne sont pas des mécanismes de ressources humaines traditionnels. L’une des choses que l’on propose avec le collectif Prenons la Une, c’est que les annonces de postes soient publiées. »
Sur les spécificités du harcèlement dans l’univers journalistique, dans une interview donnée à Anne-Charlotte Dusseaulx pour le JDD le 12 avril 2019, « Femmes journalistes : « la profession se féminise, mais la route est encore longue » » suite aux premiers Etats généraux des femmes journalistes : « Le sexisme est assez récurrent dans le milieu professionnel, à la fois sur la question des inégalités salariales mais aussi de harcèlement. Cependant, nous pensons qu’il existe trois facteurs aggravants dans le journalisme : la précarité, car on démarre par des années de piges ou de CDD qui ne mettent pas dans une bonne position pour s’imposer dans une rédaction ; le fait que ce soit un métier d’égo ; et qu’on trouve souvent du travail par cooptation et non par une offre d’emploi publiée sur un site web. Or la cooptation, c’est l’entre-soi, les “boys club”… »
On l’a dit
« Si l’on se penche sur les faits, il ne reste pas grand chose du storytelling “un groupe de journalistes hommes a harcelé d’autres journalistes femmes et issues des minorités pour prendre le pouvoir”. Une lecture plus juste de l’affaire serait la suivante : une bande de petits cons se moquaient de tout le monde ou presque sur le Twitter de l’époque. Au milieu de ces ricanements répétés, on trouve des propos sexistes, homophobes ou racistes mais le harcèlement sexiste n’était pas le but premier de l’affaire. Ce groupe Facebook n’a pas été créé pour “harceler des féministes”, c’est une lecture erronée et militante de l’affaire qui l’a fait passer pour cela. » Medium, 20 juin 2019.
« Léa Léjeune, présidente de “Prenons la Une”, collectif de femmes journalistes, a raconté à Slate avoir été harcelée par Vincent Glad et Alexandre Hervaud. Comme le raconte ce dernier dans son Medium, il a demandé à la journaliste de prouver ses dires auprès de Slate, ce qu’elle n’a pas fait, le nom d’Alexandre Hervaud a donc été supprimé de l’article qui le dénonçait au départ comme un harceleur. Restent donc les accusations de harcèlement qui concerne Vincent Glad: les tweets envoyés par Vincent Glad à Léa Lejeune sont visibles ici. Ils ne comportent aucune insulte, aucune agressivité exprimée de façon répétée ». Medium, 12 juillet 2019.