Première diffusion le 26/05/2019
Les autorités américaines avaient choisi de ne révéler qu’une partie des inculpations contre Assange, celles pour piratage informatique. Elles viennent d’ajouter 17 nouvelles charges dont celles d’espionnage, remettant en cause la liberté d’informer.
Le premier amendement de la Constitution vidé de sa substance
Le premier amendement du « Bill of rights » de 1791 interdit au Congrès de voter des lois restreignant la liberté de religion et d’expression et la liberté de la presse. L’administration veut le contourner en considérant qu’Assange n’a pas fait un travail de journaliste mais d’espion en publiant des documents confidentiels révélant les sources de la diplomatie américaine comme celles de l’armée et mettant en danger des irakiens et des afghans employés par les États-Unis en période de guerre. De manière presque comique le procureur a invoqué la mise en danger « de défenseurs des droits de l’homme et de dissidents ».
Réactions en chaîne et mesure préventive
Si Assange est extradé vers les États-Unis, il pourrait être jugé selon une loi de 1917 qui punit la vente ou la remise de documents secrets à une puissance étrangère. Contrairement à une vulgate souvent répandue, l’administration Obama n’avait jamais révélé les charges retenues contre Assange, laissant planer le doute.
Mais l’objectif des américains va bien au-delà du cas Assange. Ce dernier est malade, dépressif, affaibli après six ans de confinement et quasi abandonné par les grands médias qui ont publié ses documents et en ont largement profité, comme Le Monde qui a le culot de parler d’Assange « qui s’est toujours présenté comme journaliste », lui déniant implicitement cette qualité. L’objectif des autorités est d’instaurer une menace préventive contre tous ceux qui pourraient – via des sources d’information privées ou publiques – être tentés d’exploiter ces sources potentiellement contraires aux intérêts américains.
Sans rire, John Demers, responsable de la section sécurité nationale du ministère de la Justice américain tient à préciser que cette inculpation n’est pas « un avertissement » (warning shot) pour les journalistes, ajoutant « le ministère prend sérieusement en compte le travail des journalistes pour la démocratie ».
Un des avocats d’Assange, Barry J. Pollack, a précisé que son client était en réalité « inculpé pour avoir encouragé des sources à lui fournir des informations confirmées et pour les avoir publiées ». Il ajoute que « ces accusations sans précédent démontrent la gravité de la menace que l’inculpation d’Assange implique pour les journalistes dans leur travail d’information du public concernant les actions du gouvernement américain ».
Crédit photo : Thierry Ehrmann via Flickr (cc)