Toute famille de bonne foi, y compris favorable à ce qui y est écrit, ne peut que le constater : les manuels scolaires des établissements français ne brillent pas par leur honnêteté. Le fait était déjà patent en Histoire ou en Education morale et civique. Il semble s’étendre.
Manuels scolaires et politique
Les manuels scolaires proposent aux enfants un regard très orienté sur l’histoire et la politique. Dans le premier cas, par exemple, le choix de ce qui est dit ou non, intégré ou pas, est fondamental. La manière de parler des Lumières et de la Révolution française est ainsi souvent un exemple caricatural, montrant une sorte de chemin unique qui ne pouvait qu’être suivi par des gens civilisés (l’idéologie bobo) tandis que tout ce qui concerne le 20e siècle vise à montrer combien tout autre mode de penser serait dangereux pour le « bien », autrement dit la démocratie libérale et représentative telle que nous la connaissons (le danger, c’est la page que vous lisez, par exemple).
Dans le second cas, l’éducation civique n’y va pas par quatre chemins, qualifiant tout mouvement politique souverainiste « d’extrême droite », ce qui, relié aux programmes d’histoire dans l’esprit des bambins, conduit à imposer une influence politique directe contre des partis politiques clairement identifiés alors qu’ils sont parfaitement légaux et légitimes, en réalité non assimilables aux critères de l’extrême droite définis par les sciences politiques. L’idée, si l’on peut appeler cela ainsi, est d’assimiler toute pensée non mondialiste aux fascismes du siècle passé. De cet état de fait, le lecteur trouvera nombre d’exemples et d’analyses dans un excellent hors série du quotidien Présent, actuellement disponible en kiosques, maisons de la presse et sur le site de ce journal.
Un peu de propagande, Staline corrige Ménard
La propagande est partout. Dans la manière de pratiquer l’enseignement, comme ici, où chacun constatera qu’il n’y a aucune transformation en cours du visage de la population française, mais aussi dans le choix des sujets et de la façon de les traiter dans les manuels de Français.
L’exemple du manuel juste paru chez Nathan, un des plus gros éditeurs fournisseurs de collèges et de lycées tant un monopole existe entre quatre ou cinq éditeurs que personne ne peut détrôner, est frappant. Le manuel concerné s’adresse aux élèves des classes de 4e des collèges (ceux qui apprennent par ailleurs l’histoire des Lumières, de l’esclavage, de la Révolution, du 19e siècle, de la colonisation et l’Affaire Dreyfus en histoire, la mondialisation en géographie et la « justice » en Education Morale et Civique).
Le manuel reprend une photographie publiée par L’express le 10 septembre 2015 avec pour légende « Photo de migrants manipulée : le jeu dangereux de Robert Ménard », le livre propose de « réfléchir sur les médias », pratique particulièrement à la mode dans l’éducation nationale, dans un sens très clair : le but est de mettre symboliquement à mort le méchant maire de Béziers, soutenu par le RN, for et briguant bientôt un nouveau mandat. Un texte est proposé aux élèves, accompagné d’un questionnaire. Les élèves ont à se demander pourquoi le fait de « modifier » cette image « est immoral ». En temps normal, ce genre d’exercice s’appuyait sur des photos de propagande de Goebbels ou bien sur la manière dont les régimes staliniens et chinois effaçaient leurs opposants des photos, une fois ceux-ci éliminés dans le réel. Là, il s’agit d’attaquer l’information diffusée par un maire légitimement élu dans le cadre institutionnel de la République française. D’ailleurs, les élèves sont ensuite appelés à s’interroger sur « l’objectif visé par cette photographie » et sur « les manipulations qui ont été nécessaires ». Le tout dans le cadre d’un exercice intitulé « Mieux comprendre les médias » et qui occupe deux pages du manuel scolaire. Comme il y a un peu de place, un exercice sur une autre photographie accompagne celui consacré à Ménard : il s’agit d’une photo issue du régime iranien actuel.
L’école est devenue un enjeu politique majeur pour les libéraux libertaires
La photographie ainsi « étudiée » montrait des clandestins regroupés sur un quai de gare en Macédoine, attendant leur entrée dans l’UE, photo simplement reprise en couverture du journal municipal de Béziers avec comme légende « Ils arrivent ! ». Ce qui semble correspondre à la réalité de l’époque et de la photographie, comme à celle vécue concrètement lors de la crise migratoire de l’année de la photo, 2015 (un million sont arrivés en Allemagne, par exemple). Il est intéressant de voir comment l’idéologie au pouvoir s’insère à l’école. Les exemples sont nombreux et l’OJIM en parle souvent. Le choix de ce qui est ici présenté comme une « manipulation » l’est tout autant.
Le sénateur effacé
Les auteurs de ce manuel auraient pu reprendre, il y en a tellement, une occurrence de manipulation bien réelle, à l’exemple de la façon dont le quotidien La Provence a effacé un sénateur d’une photographie en août 2019. Question bonus : à quelle bord politique ce sénateur appartient-il ?
Que pensez-vous qu’il arriva une fois l’information connue concernant cet exercice ? Les médias en ont parlé ? En effet. Enfin… Présent et Boulevard Voltaire. Il serait cependant mensonger de dire que les médias officiels du régime ne s’offusquent jamais de ce qui se trouve dans les manuels. Ainsi, le 15 septembre 2017, un manuel de mathématiques de terminales du même éditeur, Nathan, faisait polémique dans l’autre sens, polémique pour le coup reprise par tous les médias, avec un problème commençant ainsi (et une photographie de migrants sur un bateau) : « Des migrants fuyant la guerre atteignent une île en Méditerranée. La première semaine, il en arrive 100. Puis chaque semaine, le nombre de nouveaux arrivants augmente de 10%. Par combien est multipliée une quantité lorsqu’elle augmente de 10 % ». Cela fit scandale. Peut-être les éditions Nathan font elles maintenant un mea culpa permanent afin de ne pas être mises au ban de la société ? Et pour ce faire publient-elles des exercices cadrant mieux avec la ligne idéologique du parti ? Et avec celle de l’« Education » nationale.