Enfermé dans une prison londonienne depuis son arrestation en avril 2019, Julian Assange était placé depuis de longs mois en isolement et privé de tout contact extérieur, sans lumière et avec peu de soins médicaux, aggravant ainsi son état de santé déjà particulièrement fragilisé par sept années d’enfermement au sein de l’ambassade d’Équateur à Londres.
Désormais sorti de son confinement, le fondateur de Wikileaks est devant le tribunal depuis le lundi 24 février 2020 afin de se défendre contre une demande d’extradition aux États-Unis, où il risque jusqu’à 175 ans de détention.
La liberté d’informer mobilise les organisations
La situation particulièrement inquiétante de Julian Assange a entraîné une grande vague de mobilisation en sa faveur par des organisations importantes du monde journalistique.
Dès le début du mois de décembre 2019, un appel de journalistes du monde entier que nous avions relayé avait émergé avec le mot d’ordre #JournalistsSpeakUpForAssange. Plus de 1300 journalistes d’une centaine de pays ont ainsi lancé une pétition et diffusé une vidéo de soutien à partager au maximum.
De son côté, Reporters sans frontières a également organisé une pétition contre l’extradition d’Assange qui a dépassé son objectif de 50 000 signatures. Cette pétition qui vise à soutenir la liberté d’expression s’indigne du traitement réservé au lanceur d’alerte, assimilé à de la torture par un expert de l’ONU, et met également en avant que « la contribution d’Assange au journalisme est indispensable ».
En France le Syndicat National des Journalistes a rédigé un communiqué appelant à la mobilisation des médias français pour « faire toute l’information nécessaire sur le procès », dénonçant au passage le « silence gênant qui élude cette actualité en France ».
Cette affaire souffre d’une étrange retenue de la part d’une partie de la classe médiatique française qui semble visiblement gênée par la personnalité inclassable de Julian Assange.
Souvent présenté comme un « activiste » dont la qualité de journaliste se trouve ainsi régulièrement contestée, Assange s’est vu récemment qualifié de « héros trouble » par Ouest-France ou encore d’« icône controversée » par Le Monde.
Bien que le lanceur d’alerte australien soit soutenu par de nombreux journalistes soucieux de la liberté d’informer, les médias de grand chemin n’ont de cesse de le présenter comme un personnage ambigu, revenant régulièrement sur son implication dans la défaite d’Hillary Clinton aux élections présidentielles américaines de 2016 et insistant sur sa collaboration passée avec Russia Today.
Un procès volontairement dissimulé aux médias ?
Depuis lundi 24 février s’est donc ouvert le procès de Julian Assange au sein d’un tribunal dépendant de la prison de Belmarsh, l’établissement de haute sécurité au sein duquel ce dernier est détenu. Situé dans un quartier isolé au sud de la capitale britannique, ce tribunal est doté de salles exiguës, limitant ainsi très fortement la présence du public et des médias.
Par ailleurs, même si une salle de visioconférence a été ouverte afin de suivre les débats, la taille de celle-ci et la piètre qualité technique de la retransmission ne permettent pas aux journalistes présents de suivre l’audience correctement, empêchant ainsi de faire circuler les informations sur ce procès pourtant hors-normes.
Au final, les débats concernant la procédure d’extradition doivent durer quatre mois. La première partie devait se tenir jusqu’au vendredi 28 février mais s’est finalement achevée avec un jour d’avance sur le calendrier prévu et reprendra pour trois semaines à compter du 18 mai, avant que la décision ne soit rendue dans le courant du mois de juin 2020.
D’ici là, la mobilisation ne devrait pas faiblir pour que ce procès exemplaire à forte connotation politique ne soit pas celui de la liberté d’expression dans son ensemble.