Trois déménagements valent un incendie affirme un dicton populaire. L’adage se vérifie au groupe Le Monde qui progressivement investit ses nouveaux locaux du côté de la gare d’Austerlitz après une grève des clandestins engagés sur le chantier et en cours de régularisation sur la demande du groupe. Mais d’autres tensions se manifestent.
Le réacteur a mal au cœur
Le réacteur, c’est la rédaction web du journal du soir. Le mal au cœur, c’est la pièce cent fois jouée des tensions entre rédacteurs de l’édition digitale, le prolétariat, rédacteurs sur le papier, la bourgeoisie, et les chefs de service, éditorialistes, l’aristocratie. Le prolétariat est gentiment méprisé par les bourgeois et les aristocrates du titre et les prolos n’aiment pas ça. Au point de présenter une pétition à la direction sous le titre « Le réacteur a mal au cœur ».
Un titre bien troussé car Jérôme Fenoglio et Louis Dreyfus ont de grandes ambitions pour conquérir des abonnements digitaux. Les objectifs sont de passer de plus de 200.000 abonnés digitaux fin 2019 à un million en 2025. Une expansion à marche forcée au moment où la fin de vie annoncée de Presstalis (en phase terminale) menace la diffusion du papier. Le terme réacteur n’est pas usurpé, mais être considéré à la fois comme la force de frappe du journal et comme la piétaille (moins bien payée) entraîne des états d’âme récurrents.
Un super médiateur nommé
Gilles Van Kote, directeur délégué chargé du développement (et imaginons-nous responsable du déménagement) devient directeur délégué aux lecteurs en place de Franck Nouchi devenu rédacteur en chef de la rubrique Idées. Relations avec les abonnés, organisation d’évènements, relation avec la Société des lecteurs (présidée par Julia Cagé, la compagne de Thomas Piketty), il animera la vaste communauté autour du journal. L’histoire ne dit pas s’il sera également médiateur auprès du petit peuple remuant du « réacteur », une fonction nécessaire et délicate.