L’ONG Reporters sans frontières (RSF), habituée à publier des classements sur la liberté de la presse et sur bien d’autre sujets connexes, vient de dévoiler une nouvelle liste, celle des 20 plus importants “Prédateurs numériques de la liberté de la presse” en 2020.
Prédateur numérique ?
Par “prédateur numérique”, l’ONG entend évoquer des “entités dont l’activité est assimilable à une prédation envers le travail journalistique” et représentant un “danger évident pour la liberté d’opinion et d’expression”. Ces dernières peuvent être “infra-étatiques, privées, informelles” et agissent essentiellement sur les réseaux sociaux mais aussi, vis-à-vis des messageries instantanées, des boites mails et de tout ce qui concerne internet en général. Elles peuvent aussi être étatiques.
RSF a classé ces 20 prédateurs selon quatre catégories, ceux qui “harcèlent”, ceux qui pratiquent la “censure d’État”, ceux qui “désinforment” et ceux qui “espionnent et surveillent”.
En dehors de l’Occident : harcèlement, censure et désinformation pratiqués par les États
Avec du recul, on constate que les trois premières catégories, “harcèlement”, “censure d’État” et “désinformation” regroupent tout un ensemble de structures plus ou moins étatisées et non occidentales, et la dernière catégorie, “espionnage et surveillance”, des structures privées basées dans des pays occidentaux.
Dans ces trois catégories, RSF pointe du doigt, l’Inde avec les “Yoddhas de Modi” qui “trollent” sur les réseaux sociaux pour servir le parti nationaliste au pouvoir en Inde, le pouvoir algérien et ses mouches électroniques, Bolsonaro et son “cabinet de la haine”, l’Iran et son Conseil suprême du cyberespace, etc.
La Russie est évidemment mentionnée, et plus d’une fois contrairement à tous les autres (sauf l’Inde). RSF dénonce les “armées de trolls du Kremlin” qui diffusent de “fausses informations”, “publient des informations personnelles” et “diffament”. Est aussi mis en avant le Roskomnadzor (l’autorité fédérale de contrôle des communications et des médias russes), ce dernier bloquant des sites internet et applications.
En résumé, la majorité des pays dits autoritaires y passent (Chine, Arabie saoudite, Vietnam, Soudan, etc.) et les habituelles cibles “populistes”, les gouvernements brésilien et russe. Il faut attendre la dernière catégorie pour entendre parler des pays européens et des États-Unis.
En Occident : espionnage et surveillance, mais uniquement par des structures privées
La partie sur l’espionnage et la surveillance ne parle plus que de l’Occident. Mais hormis la localisation qui diffère, ce ne sont plus que des structures privées qui sont mentionnées ici. On retrouve les logiciels de NSO Group (basé en Israël), Memento Labs (Suisse, Italie, Arabie saoudite), Zerodium (États-Unis), Mollitiam Industries (Espagne) et Gamma (Allemagne).
La prédation numérique serait donc étrangère à toutes les structures étatiques situées dans ces pays et en particulier en France. La loi Avia sur la “haine sur internet” ?
Par ailleurs, rien sur les Sleeping giants ni sur la censure des GAFA ? Tous ces mouvements liberticides n’auraient rien à voir avec la “prédation numérique” et ne seraient pas un danger pour “la liberté d’opinion et d’expression” ? Sourd, aveugle, mais pas muet, le rapport de RSF sous cet aspect constitue une infox de première grandeur. Note finale : 5/20, insuffisant, à refaire.