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Pascal Praud : retour sur un acte d’accusation et des menaces de mort

21 mars 2020

Temps de lecture : 5 minutes
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Pascal Praud : retour sur un acte d’accusation et des menaces de mort

Temps de lecture : 5 minutes

Ce 9 mars 2020, Pascal Praud est menacé de mort ; depuis sa présomption de climato-scepticisme à l’occasion de son émission du 6 mai 2019 sur CNews, le journaliste et présentateur de L’Heure des Pros est la victime récurrente de la vindicte de ses confrères, dans des articles peu flatteurs au Monde, Les Inrocks, Le Huffigton Post, Libération, Le Nouvel Obs, etc. Cette fois-ci, pour les rappeurs Sneazzy et Nekfeu dans leur clip Zéro Détail, il mériterait un « canon au fond de la bouche » et « une balle dans le cervelet », car il salirait l’islam dans ses émissions. L’intégrité physique du journaliste est menacée. Voyons comment ont réagi une partie des confrères à cette occasion.

À L’Express et au Point ? Neutralité express, laissez faire la justice

On prend des pincettes tout en évo­quant le fait divers via l’en­quête du par­quet de Paris ouverte à la suite de la dif­fu­sion du clip sur inter­net, loi Avia oblige.

« Le par­quet de Paris a décidé d’ou­vrir une enquête après la dif­fu­sion du sin­gle de Sneazzy et Nek­feu, dont les paroles sem­blent men­ac­er le jour­nal­iste de la chaîne Cnews. »

Au Point, l’ac­cent est mis sur des men­aces faites à la police et sur les réac­tions à chaud de Pas­cal Praud, par­lant avec ironie d’une « méth­ode de dis­cus­sion assez expédi­tive ». En plus de l’in­sulte, une sorte de « fierté musul­mane » entend faire respecter le délit de blas­phème. « J’su­is musul­man et fier de l’être/On va jamais m’traîn­er dans la boue. ».

Au Parisien, Est Républicain, Sud Ouest, Ouest-France et compagnie des journaux régionaux ? « Aller demander à l’AFP ! »

Peu de choses dévelop­pées, on reprend la dépêche AFP. Bref rap­pel des faits, pre­mier gros titre qui saute aux yeux (saint-pas­d’a­mal­game, priez pour nous) : des paroles « mal com­pris­es », selon Sneazzy. On se focalise sur le rappeur, sa vie.

À L’Obs et au Monde, la parole est à la défense

9 mars, dans L’Obs : « Plusieurs per­son­nal­ités poli­tiques ont égale­ment tenu à apporter leur sou­tien, la plu­part issues du par­ti de droite Les Répub­li­cains. » Sont cités Nadine Mora­no, Bruno Retail­leau, Éric Ciot­ti. Tra­duc­tion : La Manif pour tous, donc la frange extrémiste et nauséabonde de la droite.

Le 10, on rem­pile : « DES PAROLES SORTIES DE LEUR CONTEXTE ». L’ar­gu­men­taire : Praud représente ces « polémistes droitiers omniprésents sur les chaînes d’info », dit Nico­las Truong au Monde le 7 mars. ET EN PLUS ! cer­tains poli­tiques se ser­vent de cette affaire pour tir­er à boulet rouge sur l’Is­lam. Jean-Michel Aphatie, Jérôme Béglé, Philippe Cor­bé, Françoise Labor­de, Éric Naul­leau ou Ivan Rioufol ont con­damné cet appel au meurtre et sou­ti­en­nent Pas­cal Praud. Aux abon­nés absents les syn­di­cats de jour­nal­istes type SNJ, dont le silence est assourdissant.

Au Figaro, la parole est au procureur Pina

On relit les mêmes choses, que les employeurs de Praud réfléchissent l’ac­tion en jus­tice, que les pro­pos sont inad­mis­si­bles, on dresse la mono­gra­phie de Sneazzy, etc.

Quand voici Céline Pina ! pour FigaroVox. Elle défend Praud, dénonce le rappeur : « […] Sneazzy qui pense que l’appel au meurtre est un moyen de témoign­er de sa fierté d’être musul­man [..]. » et ajoute que les paroles de cette chan­son révè­lent la men­tal­ité qui sévit dans les quartiers, savam­ment entretenue par un mélange de dis­cours vic­ti­maire et de pro­pa­gande vio­lente. Der­rière, la remise à jour du délit de blas­phème et le mutisme des milieux de gauche face à cette affaire, qui fait étrange­ment écho à l’af­faire Mila, ou aux car­i­ca­tures de Mahomet par Char­lie Hebdo.

Valeurs Actuelles, inversion accusatoire

L’ar­ti­cle de VA entend démon­ter la défense du rappeur à l’oc­ca­sion du tol­lé sus­cité sur les réseaux soci­aux après la pub­li­ca­tion du clip.
Le prévenu par­le : les paroles expri­ment « la haine qui peut exis­ter con­tre les musul­mans et la volon­té de les faire taire, le tout imagé par la métaphore de la balle dans le cervelet (pour dire « ne pensez plus ») et du canon dans la bouche (pour dire « ne par­lez plus »). En somme, ce serait un mau­vais procès qu’on lui fait.
Pour Valeurs Actuelles c’est clair, on est dans l’in­ver­sion accusatoire, la vic­tim­i­sa­tion de celui qui appelle au meurtre, le tout au nom de l’anti-islamophobie et de la lib­erté d’expression.

À RTL comme à Canal+, on défend la profession

La société des jour­nal­istes de RTL a dénon­cé par tweet les « paroles infectes » de Sneazzy envers Pas­cal Praud « et plus large­ment la pro­fes­sion de journaliste ».

Last but not least

Anne-Chris­tine Lang, députée LREM déplore sur Twit­ter le manque de réac­tion à gauche : « Il paraît que soutenir Pas­cal Praud, c’est de droite […] ça en dit long sur la décom­po­si­tion d’une par­tie de la gauche… ». Moral­ité ? De deux choses l’une, la défense d’un col­lègue ou la défense de la bien-pen­sance, deux poids deux mesures sont de mise au pays de cer­tains journalistes.

Pour creuser un peu, con­sul­tez le por­trait de Pas­cal Praud et notre arti­cle sur Frédéric Fromet, le deux poids deux mesures des indig­na­tions médi­a­tiques.

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