Alors que le quotidien vogue sur l’esquif d’une Fondation pour la presse, financée et contrôlée par Patrick Drahi, Laurent Joffrin parti pour les délices de la politique électorale est remplacé par un franco-israélien ancien membre des services de renseignement de l’armée, l’unité d’élite 8200.
L’unité 8200
« Unité 8200 » cela évoque un roman d’espionnage, ça tombe bien c’est le sujet. Reportons-nous à The Times of Israël (en français) du 16 juin 2019 :
« L’unité 8200 – ou unité Shmoneh-Matayim en hébreu – est considérée par la majorité des analystes des renseignements comme l’une des unités d’espionnage les plus sophistiquées – et quelque peu controversées – de toute la planète. Une enquête parue en 2014 dans le Guardian avait par exemple révélé qu’elle était chargée d’espionner les civils palestiniens en Cisjordanie. »
De la même source à la même date, plus loin
« Il est de notoriété publique que le journaliste, éditeur et auteur Dov Alfon, 58 ans, a participé à la collecte de renseignements en vue de l’opération israélienne Opéra, un raid aérien surprise mené au mois de juin 1981 qui avait détruit un réacteur nucléaire iranien situé aux abords de Bagdad.
Mais lorsqu’on lui demande de citer des exemples spécifiques d’opérations auxquelles il a participé quand, jeune homme, il appartenait à l’unité 8200 de l’armée israélienne, Dov Alfon fait une pause, marquant une hésitation.
« Je ne peux pas parler des choses que j’ai pu faire ou ne pas faire dans les rangs de l’unité 8200 », explique-t-il au Times of Israël avec un détachement que ne renierait pas James Bond, lors d’une interview réalisée à Paris, dans un lieu qui ne sera pas divulgué. »
Toujours de la même source mais du 25 juin 2020, on précise que cette unité (à laquelle Dov Alfon n’appartient plus depuis la fin de son service militaire selon les sources officielles) a été récemment décorée pour services rendus, comme le dit le général Hayman, son responsable :
« L’excellence par un besoin clair, l’excellence par la soif de succès, l’excellence par le fait de ne pas transiger sur les petits détails – c’est l’esprit du renseignement militaire et cela s’exprime également lors de cet événement », a déclaré Hayman. « Les activités opérationnelles ont été menées de manière clandestine, avec créativité et un fort désir de réussite. »
« Les capacités opérationnelles, la collaboration et les réalisations uniques qui se sont reflétées dans vos actions ne peuvent pas être prises à la légère », a‑t-il déclaré. « Cette opération est une première et la plus importante étape d’un long chemin qui nous attend. »
Et ensuite ?
Dov Alfon fait donc son service militaire au sein de la 8200, il y restera deux ou trois ans suivant les sources. Ensuite l’ami Dov s’est fait une virginité du côté de l’édition, a effectué un long parcours au quotidien israélien progressiste Haaretz à différentes fonctions, de responsable des suppléments (avec succès) jusqu’à la rédaction en chef pendant trois ans où il développera le digital sa spécialité. Dans ce dernier poste il sera accusé d’une véritable chasse aux sorcières contre les journalistes classés trop à droite.
Né sous le protectorat français en Tunisie il bénéficie de la nationalité française mais sa mère ayant émigré, il choisira de faire son service militaire en Israël où il sera remarqué pour ses talents en devenant chef de section de la célèbre unité 8200 (voir supra) dont il tirera un livre Unité 8200 (Liana Levi) qui recevra le prix Marianne. Après ses missions au sein d’Haaretz, il deviendra ensuite correspondant en France pour le quotidien tout en collaborant épisodiquement avec Fabrice Arfi à Médiapart. Il deviendra vice-président de l’Association de la presse étrangère en France.
Il aurait été remarqué par Denis Olivennes, le nouvel homme fort d’Altice média et de la fondation qui chapeaute Libération. Au départ chargé d’une simple mission sur le numérique par Olivennes celui-ci aurait vu dans sa promotion l’occasion de mettre fin à l’ère Joffrin avec lequel ses relations sont notoirement fraîches.
Le nouveau rédacteur en chef s’est fendu d’une déclaration digne du Tour de France (je suis heureux d’avoir gagné l’étape et j’espère faire mieux la prochaine fois) :
« Je suis heureux et fier de cette extraordinaire confiance qui m’honore. Libération c’est un titre fort, unique, avec des valeurs d’indépendance et d’humanisme auxquelles je suis profondément attaché. C’est surtout une rédaction talentueuse qui travaille chaque jour pour publier une information éclairée. Nous allons renforcer les liens avec nos lecteurs et en convaincre bien d’autres. »
Ses très nombreuses relations internationales et ses talents éprouvés dans le digital et en cyber sécurité (défensive et offensive) lui serviront pour tenter de sortir de l’ornière un quotidien en voie de marginalisation. Sa nomination a été approuvée à plus de 90% par la rédaction du journal.
Sur le même sujet
- Voir notre article sur le fonds de dotation pour une presse indépendante créé par Patrick Drahi pour chapeauter Libération.
- Voir notre infographie sur Patrick Drahi.
- Voir notre portrait de Denis Olivennes (avant son départ de CMI)
- Voir notre portrait de Laurent Joffrin