Nous poursuivons notre voyage dans la campagne électorale américaine dans le regard des médias.
Quid de la vacance présidentielle ?
Nancy Pelosi recadre le discours politique sur le 25e amendement (ce dernier établit les règles en cas de vacance présidentielle NDR, voir infra) à trois semaines de l’élection présidentielle. Mais pourquoi? Car il apparaissait pourtant plausible que toute l’énergie tactique des trumpophobes avait été consacrée au pourrissement d’une élection présidentielle sans résultat clair, terreau de multiples contestations, ce qui aurait rendu impossible l’intronisation du président le 21 janvier prochain, auquel cas le Speaker, 3e personnage de l’État, aurait fini par assumer la présidence intérimaire du pays.
Le traitement médiatique de la maladie
Mais, avec sa maladie, Trump a brouillé les cartes et fait sortir les loups du bois. Avant son hospitalisation, la planète entière était médiatiquement convaincue que c’est aux États-Unis que la maladie du SARS-Cov2 a fait les pires dégâts. Mais aujourd’hui, l’idée se développe peu à peu que le pays dispose maintenant des traitements qui marchent, en particulier sur une personne à risque, telle qu’un obèse présidentiel de 74 ans, nourri toute sa vie au hamburger.
Les médias se sont subitement trouvés dans le brouillard hésitant entre plusieurs stratégies narratives. Steve Malzberg, journaliste pro-Trump qui travaille maintenant chez RT, reprend toute l’histoire au début de sa chronique du 9 octobre.
Les médias, solennels, ont commencé par présenter le président comme gravement malade, ayant en tête de voir tomber le couperet du 25e amendement, qui le priverait du pouvoir et surtout le rendrait inéligible de 3 novembre prochain.
Afin de comprendre ce scénario, les cinéphiles pourront se référer au film Air Force One qui en décrit la mécanique : le cabinet d’un Président, introuvable et présumé captif de mercenaires slavomaniaques, entame la procédure de son remplacement pour incapacité afin de remettre le pouvoir à la Vice-présidente, qui dans le film résistera cependant à la tentation.
Retour du 25ème, Pelosi en pointe
Le 25e amendement détermine l’ordre de succession en cas d’incapacité du Président : Vice-président, puis Speaker de la Chambre, etc. Il avait été adopté en 1967 pour assurer la continuité non pas tant du pouvoir civil, mais du pouvoir militaire : le Président est le général en chef, et dispose de l’usage de l’arme nucléaire. Les législateurs rejetant ainsi l’idée que cette dernière puisse tomber sous la coupe d’un directeur de cabinet ou tout autre cacique de la Maison-Blanche non élu. La procédure est initiée par la branche exécutive du pouvoir, à savoir le Vice-président et les ministres, pour être soumise à la signature les leaders de chaque chambre.
Si une leçon doit être retenue des trois dernières années, c’est bien celle de l’immense créativité constitutionnelle du Speaker de la Chambre Nancy Pelosi, restée fidèle au plan de reconquête discuté le 13 novembre 2016 avec un aréopage d’investisseurs, Soros en tête, dans les salons de l’hôtel Mandarin, à Washington. Tout un symbole. Non sans culot, et prétendant œuvrer au sein d’un régime parlementaire plutôt que de séparation des pouvoirs, Pelosi avait décidé d’elle-même et sans vote d’initier l’an dernier une procédure d’impeachment (destitution), contrairement à 250 ans de tradition juridique. L’Ukrainegate devait consacrer l’apothéose de trois années de sabotage de l’administration Trump. Ça n’a pas marché. La constitution a résisté.
En octobre, Trump est atteint par la COVID-19 et les médias lancent leur machine à ahurir, cependant que ses partisans se rassemblent aux portes de l’hôpital pour exprimer leur soutien et prier pour lui.
Au troisième jour, après sa mise en bière médiatique, Trump ressuscite. Il diffuse plusieurs vidéos pour inciter les gens à ne plus avoir peur, à ne pas se laisser contrôler par la maladie. Il les informe que les solutions thérapeutiques existent désormais. Il suggère que si lui, à 74 ans, a pu survivre avec les nouveaux traitements, n’importe quel américain a des chances d’en faire de même. Le Président ira par la suite jusqu’à dire que son traitement qui fait des miracles (et qui coûte une fortune) sera mis gratuitement à la disposition de tous les malades de la Covid. Ce qui enrage tout l’establishment, y compris les républicains, non consultés.
Nouvelles censures des réseaux sociaux et maladie mentale
Les médias présentent Trump comme le contaminateur en chef, une bombe à virus vivante, qui met en danger son personnel et ses équipes, et qui nie la gravité des dangers résultant du virus. Facebook et Twitter vont jusqu’à le censurer une nouvelle fois, pour un commentaire imprécis, comme à son habitude.
Et comme Trump a l’air en pleine forme, il est difficile de considérer sa mise à l’écart pour des raisons de santé. À moins que? Subtilement, par petites touches, sont invoquées les possibles séquelles neurologiques du traitement administré à Trump. La campagne de presse des derniers jours vise ainsi à « psychiatriser » le Président, en s’appuyant sur une série d’arguments démontrant que Trump est gavé de stéroïdes ainsi que d’autres médicaments qui tous peuvent causer des troubles de l’humeur incompatibles avec les responsabilités présidentielles.
Ainsi, le 7 octobre Madame Pelosi insiste lourdement, parlant de Trump : « je ne fais plus confiance à son jugement. Il est sous stéroïdes ». Donc, de malade physique, Trump devient malade mental.
Tentative de coup de force de Pelosi
Et Nancy Pelosi de dramatiser encore les 8 et 9 octobre 2020, lorsqu’elle annonce vouloir déposer un projet de loi qui « innove » en renforçant le rôle du Congrès dans l’initiation de la procédure du 25e amendement : le Congrès pourrait constituer une commission d’experts « bipartisans » non-élus pour déterminer l’état de santé mentale du président afin de déclencher automatiquement les dispositions du 25e amendement. Virage biopolitique… et fin de la séparation des pouvoirs?
Ce chaos programmé par Pelosi semble apparemment viser Trump. Les médias rappellent régulièrement qu’elle est le 3e personnage de l’État, et que, 25e ou pas, si l’élection du 3 novembre ne produit aucun résultat du fait de contentieux massifs qui semblent inévitables, du fait du vote par correspondance lui aussi modifié, le Speaker pourrait devenir Présidente temporaire. Adieu Trump, et adieu Biden!
Biden s’émancipe
Malgré sa toute-puissance, Madame Pelosi a bien des problèmes: non seulement les « révolutionnaires » du parti démocrate ont déjà tenté de lui chiper son poste de Speaker et pourraient bien y parvenir après le 3 novembre, mais surtout voici maintenant que Joe Biden, grisé par les sondages, a des velléités d’indépendance. Sentant le succès proche, il s’est distancé, lors du dernier débat présidentiel, du programme commun de transformation du pays, pourtant signé avec Bernie Sanders avec la bénédiction de la bande des quatre (« the Squad ») : Ilhan Omar, Ayanna Presley, Rachida Tlaib, et la charismatique Alexandra Ocasio-Cortez. Ces dernières ont une grande influence sur Kamala Harris, qui avait raté sa campagne des primaires et qui semble aujourd’hui mal passer auprès des indépendants et des indécis.
Biden avait affirmé avec force et sans équivoque : le parti démocrate, c’est moi! D’autant qu’il répète à qui veut l’entendre qu’il est un politicien bipartisan, et que c’est bien lui « qui a battu le socialiste (Sanders) » Voici de quoi énerver Barak, Michèle, ainsi que tous leurs amis philanthropes ou hygiénistes.
Dans les heures qui ont suivi l’annonce du projet Pelosi, et prenant en compte la « petite phrase » de cette dernière, Trump et l’ancien Speaker de la Chambre, Newt Gingrich ont chacun émis l’hypothèse que Biden était en fait la vraie cible. Si ce dernier gagne l’élection, un « coup de palais » pourrait le forcer à laisser la place à Madame Kamala Harris, la protégée de Barak Obama, et symbole de la nouvelle Amérique intersectionnelle promue par l’aile révolutionnaire du parti.
Nancy Pelosi a‑t-elle commis sa première gaffe politique? D’une part en ouvrant une brèche dans l’unité du parti démocrate, entre les mondialistes « révolutionnaires » déconstructeurs (les lobbies technétroniques et bancaires), et les traditionnels socialistes-redistributifs (les syndicats). D’autre part en révélant à ceux qui n’avaient pas compris le film que Joe Biden n’est après tout qu’un prête-nom dans cette élection, chargé de récupérer les modérés et les personnes âgées, ainsi que le vote ouvrier blanc des États-pivot que Trump avait confisqué en 2016. À suivre…