Cette implication ne sera pas une surprise pour les lecteurs de l’Observatoire du journalisme. Nous avions recensé un ouvrage (inspiré par les services de renseignement turc) dès le 17 novembre 2020 où le récit circonstancié de la disparition du journalise était précisé quasiment à la minute et les responsabilités assez clairement établies.
Biden déclassifie un rapport de la CIA
Trump avait choisi de classifier le rapport secret de la CIA sur l’assassinat. Non pas tant sur les circonstances de la disparition que sur son donneur d’ordre. Les circonstances (accablantes) sont connues : Khashoggi personnalité saoudienne d’abord proche du pouvoir royal n’était plus en cour depuis la monté en puissance de « MBS » alias Mohamed Ben Salman, héritier du trône et vrai régent en l’absence intellectuelle de son père réputé gâteux. Khashoggi a été attiré dans un traquenard le 2 octobre 2018 au consulat turc d’Istanbul, tué, démembré et ses restes dispersés. Le tout par un commando saoudien fort peu discret plus proche des Pieds Nickelés que de James Bond.
La nouveauté du rapport c’est la responsabilité directe de MBS dans la décision de faire disparaître le journaliste désigné comme un ennemi à abattre. La responsabilité de MBS est claire comme de l’eau de roche dans le dossier, mais les autorités américaines ne réclament aucune sanction contre le prince héritier ; comme le déclare Anthony Blinken, nouveau Secrétaire d’État de Biden, « la relation avec l’Arabie Saoudite dépasse les questions de personne », voilà qui est dit avec élégance.
Pas de changement profond des relations américano-saoudiennes
Pourquoi cette déclassification du rapport par les équipes Biden ? Tout d’abord pour faire payer à MBS sa trop grande proximité avec les équipes Trump. La nouvelle administration avait envoyé déjà des signes en janvier en retirant les houtis (hostiles aux saoudiens dans la guerre que mènent ces derniers au Yémen) de la liste des organisations terroristes.
Les saoudiens avaient compris le message en levant quasi au même moment l’embargo qu’ils imposaient au Qatar depuis 2017 et sans aucune concession des qataris. Le pétrole n’est pas étranger au raidissement des autorités américaines, les États-Unis avec le gaz de schiste ont de moins en moins besoin du gaz et du pétrole saoudien. Pas de risque de rupture pour autant, plutôt un changement des rapports de force et un recalibrage. Les Saoudiens ont un besoin vital de la protection américaine contre l’Iran. Les Américains ont besoin de la compréhension intelligente des Saoudiens envers Israël qui demeure le pilier de la politique yankee dans la région. Une brouille passagère n’empêche pas les échanges entre amis.