La pseudo affaire Obono-Valeurs actuelles, née d’une politique fiction publiée par l’hebdomadaire à la fin de l’été 2020, poursuit son chemin. L’heure est maintenant aux tribunaux.
Alors que sort en librairie la seconde édition de la brochure de Bertrand Delcassis consacrée aux décoloniaux, à la repentance, aux indigénistes et à l’affaire Obono-Valeurs actuelles, une brochure éditée sous l’égide de l’Ojim et de La Nouvelle Librairie, les protagonistes de l’affaire étaient appelés devant les tribunaux. Pour les médias qui ont évoqué ce temps des tribunaux, la question de la présomption d’innocence ne se pose pas. À leurs yeux, Valeurs actuelles est coupable par nature. Une culpabilité qui sera reconnue ou infirmée lors du jugement en délibéré le 29 septembre.
Le Monde se penche sur la question
Le 24 juin 2021, Le Monde consacre un long article à cette affaire, sous la plume de Samuel Laurent. Le titre et l’accroche : « Accusée de « racisme », la « politique-fiction » de « Valeurs actuelles » sur Danièle Obono en procès à Paris.
Trois responsables de l’hebdomadaire conservateur ont dû s’expliquer mercredi devant la 17e chambre du tribunal correctionnel, après la publication en août 2020 d’un récit très critiqué mettant en scène la députée La France insoumise en esclave. »
Outre un rappel succinct et orienté des faits, il en ressort :
- Un climat loin d’être serein : « Un rassemblement organisé par La France insoumise (LFI) sur le parvis du tribunal ; une salle d’audience comble avec une demi-douzaine de députés dans le public ; une dizaine d’avocats ; l’ancien responsable de Charlie Hebdo et un ex-champion du monde de football venus témoigner : on était loin, mercredi 23 juin, de l’ordinaire de la 17e chambre correctionnelle du tribunal de grande instance de Paris, spécialisée dans les affaires de presse. Mais le procès qui a opposé durant plus de dix heures la députée (LFI) Danièle Obono à trois responsables de l’hebdomadaire Valeurs actuelles était tout sauf banal. »
- Une audition dans le cadre d’une plainte et d’une enquête ouvertes pour « injure publique à caractère raciste ».
- La convocation de trois prévenus : l’auteur de l’article, Laurent Dandrieu, responsable des pages « culture » de Valeurs actuelles ; le directeur de la publication, Erik Monjaloux ; le directeur de la rédaction, Geoffroy Lejeune. Comme d’autres médias, Le Monde est heureux de jeter en pâture le pseudonyme de l’auteur de l’article, on le connaît plus frileux pour révéler les noms des agresseurs dans les cas de terrorisme.
Laurent Dandrieu a rappelé que la politique fiction avait justement pour but de parodier les prises de position de Danièle Obono, un texte en forme de pastiche. Si Obono se retrouve plongée dans l’Afrique du XVIIIe siècle, c’est justement pour que le thème de « l’africanité » cesse d’être un mythe et que des faits historiques soient rappelés, comme le rôle des africains dans l’esclavage. Son argumentation a été soutenue par le témoignage de Philippe Val, ancien directeur de Charlie Hebdo, pour qui il s’agit d’un « procès politique ». Par ailleurs « Geoffroy Lejeune, directeur de la rédaction de Valeurs actuelles, a renchéri en tentant de rappeler que le texte faisait partie d’une série qui a mis en scène plusieurs autres personnalités dans divers contextes historiques. Fustigeant une volonté « d’attaquer un journal dans son ensemble », il a assuré n’avoir jamais voulu « faire de mal » à Mme Obono personnellement. »
D’après Le Monde cette ligne de défense a été « mise à mal » par les sept avocats des parties civiles. Le texte serait un « viol symbolique » (sic).
Pour défendre Danièle Obono, l’ancien footballeur reconverti en anti-raciste professionnel, Lilian Thuram était de la partie. Il a demandé au tribunal de « taper au portefeuille ».
L’intervention de Danièle Obono s’est faite sous le signe de l’émotion. Elle s’est dite « humiliée », a contesté s’être revendiquée de « l’indigénisme ». Le texte l’aurait ramenée à être « moins qu’un animal ». Le parquet s’est affirmé en accord avec Danièle Obono, ne voyant que « clichés, stéréotypes et préjugés » dans ce texte.
Médiapart s’engage pour Obono
Médiapart s’engage entièrement en faveur de Danièle Obono. Le média d’Edwy Plenel titre sur une phrase du député : « Je ne cherche pas des excuses, j’attends la justice ». Là aussi, outre un rappel succinct et orienté des faits, il ressort de l’article :
- Valeurs actuelles défend une « satire politique », réalité que Médiapart balaie d’un revers du clavier.
- Médiapart va plus loin que Le Monde en ne se contentant pas de donner le pseudonyme de l’auteur de l’article, mais également son nom civil.
- Arguments et « caution morale » ne suffisent pas pour un média qui rappelle qui sont les parties civiles, outre Obono : La France insoumise, SOS Racisme, le Mrap, la Ligue des droits de l’homme, l’association Mémoires et Partages et la Maison des potes. Lilian Thuram est par ailleurs présent en tant que témoin. De quoi parle-t-on ? D’un texte raciste, « sexiste », d’un « torchon », de « l’humiliation » infligée à Obono.
Les demandes ? 75 000 euros de dommages et intérêt, plus 10 000 euros par partie civile. Ainsi qu’une publication judiciaire dans le magazine.
L’audience devant le tribunal a été relayée par d’autres médias, Le Figaro, le Huffpost ou France bleue. Partout règne une quasi identique analyse des faits : Valeurs actuelles est par avance coupable et l’audience du 29 septembre ne sera qu’un épiphénomène, les dés étant déjà jetés. Coupable médiatiquement avant d’être jugé en droit, ainsi va la justice en France. Le tribunal de l’opinion publique façonnée par les médias de grand chemin.
🔴 Le procès de Valeurs actuelles — @ChdOrnellas & @GeoffroyLejeune
➡️ Censure, outrances, instrumentalisation : Valeurs actuelles retrace, minute par minute, le procès Obono. Douze heures de débats très politiques ⤵️
🗞️ Lire le numéro : https://t.co/hE41yYleFJ pic.twitter.com/5CFxCugS1n— Valeurs actuelles ن (@Valeurs) July 1, 2021