Internet détermine la vie quotidienne des enfants et des jeunes en Allemagne. Ils regardent YouTube, des séries et des films en streaming, jouent à des jeux informatiques ou écrivent des messages sur WhatsApp. Selon une étude du Groupement de recherche sur la pédagogie des médias du sud-ouest allemand, 89 % des 12 à 19 ans auraient utilisé Internet tous les jours avant la pandémie – la tendance étant à la hausse en raison du Corona.
Protéger la jeunesse
En sus des adolescents, les élèves du primaire et même les enfants à la maternelle sont en contact avec les médias numériques. D’innombrables dangers guettent la jeunesse sur Internet ; sa protection fait partie des objectifs du gouvernement fédéral et de ceux de l’Union européenne. Les jeunes doivent être protégés de la pornographie et de la cyberintimidation, mais aussi de la haine et des informations présumées fausses (fake news). Selon le directeur de l’Institut d’études sur la communication et les médias de Leipzig, Markus Beiler, le manque de « compétences en matière de médias » des jeunes citoyens, qui utilisent souvent des médias alternatifs, met en danger la démocratie et la cohésion sociale.
Afin de former les jeunes à l’utilisation d’Internet et du « journalisme de qualité », il existe en Allemagne des initiatives spécifiques s’adressant à différents groupes et tranches d’âge. L’un d’eux est Bien Grandir avec les médias. L’objectif est simple : « Vous (enfants et jeunes) devez être en sécurité sur Internet, les réseaux sociaux, l’enseignement à domicile, les jeux et le streaming. »
Voir aussi : En Allemagne la protection des médias pour la jeunesse passe par une plus grande « diversité »
Campagnes et sites Internet à foison
Ce comité d’action propose tout particulièrement un travail d’accompagnement dans la constitution de réseaux locaux : les institutions et établissements éducatifs, tels que les clubs de jeunes, les jardins d’enfants ou les bibliothèques, devraient se regrouper au niveau local et mettre en œuvre des projets pédagogiques communs pour former les jeunes à faire face au monde numérique. À cette fin, l’organisme propose « une sélection d’informations sur l’utilisation des médias par les enfants et l’éducation aux médias » tout comme des formations sur son site Internet. « Dans nos conférences en ligne, des experts donnent des informations pratiques sur des sujets pertinents en matière d’éducation aux médias et de promotion des compétences nécessaires pour les enfants et les jeunes. Par exemple : des conseils et des informations sur les applications et les sites adaptés aux enfants, sur l’utilisation sécurisée des médias et sur la conception d’offres d’éducation aux médias », indique le site Internet…
Gamme unilatérale et orientée de sujets
L’un d’eux est Seitenstark, qui sert de réseau à une soixantaine de sites pour enfants. « Ensemble, nous présentons un paysage diversifié plein de sujets colorés et d’opportunités d’apprentissage et de participation passionnantes. Des textes, des vidéos et des jeux adaptés instruisent et sensibilisent les enfants aux problèmes sociaux, culturels ou environnementaux et promeuvent leurs compétences sociales et médiatiques », comme Seitenstark décrit son offre pour les petits internautes.
En fait, un mélange de jeux et d’« opportunités éducatives » loin d’être neutre. Sur Jippietube, par exemple, de manière comique et conditionnellement neutre — le méchant est bien sûr le blanc européen‑, l’attention est attirée sur la destruction de la forêt tropicale de Sumatra.
D’autres sites sont plus directs. Le magazine environnemental en ligne ÖkoLeo, ciblant les 9 à 14 ans, reprend le jargon des Fridays for Future et similaires : “Pour arrêter la crise climatique, tous les pays doivent aider et intensifier leurs efforts”. Ce qui ne surprendra personne, quelques clics plus loin, le site promeut la grève « Tout pour le climat » des militants écologistes. Bien entendu, cela ne s’arrête pas au climat ; il y a le genre aussi. Sur la page « Questions sur la paix » les 10–15 ans peuvent apprendre ce que signifie être transgenre dans la catégorie « Vivre dans la diversité ». Les enseignants sont par ailleurs eux aussi vivement encouragés à utiliser ce matériel en classe…
L’Union européenne veut inculquer des compétences numériques de base
Du côté européen, un projet beaucoup plus vaste est dédié à la protection des adolescents et des jeunes sur Internet. Diverses initiatives, telles que Nummer gegen Kummer, Jugendschutz.net et Klicksafe.de ont reçu un financement de 6,28 millions d’euros de 2015 à 2019 via le Safer Internet Center de l’Union européenne.
L’Union Européenne voit grand : d’ici 2030, 80 % de tous les citoyens européens devraient avoir acquis les compétences numériques de base. Une commission d’experts de 25 personnes — dont des représentants de l’UNICEF et du Conseil de l’Europe — doit élaborer les lignes directrices du projet sous la devise « Penser d’abord, cliquer ensuite. »
En réseau avec des ONG de gauche
Klicksafe a des priorités similaires à celles des autres initiatives allemandes : former à une utilisation compétente et critique des nouveaux médias. « Compétent » et « critique » signifient ici souvent : orienter en évitant les offres et contenus de médias et profils conservateurs de droite. Klicksafe prend les utilisateurs par la main jusque dans les moindres détails et répond à des questions telles que : « Qu’est-ce qu’Instagram ? Quels problèmes et risques sont connus ? » donnant également des conseils aux parents et aux jeunes. Les textes d’information traitent de contenus spécifiques tels que l’utilisation des médias sociaux, les questions juridiques ou le « discours de haine ».
Source : Junge Freiheit, 21/12/2021. Traduction : AC
N’oublions pas que, comme Facebook, Instagram a une limite d’âge (13 ans), celle de WhatsApp étant de 16 ans. Pour qui souhaite se tourner vers les médias sociaux de manière encore plus critique que Klicksafe, l’initiative propose aux familles une liste de contrôle, afin qu’elles puissent « traquer ensemble les fausses informations ». Klicksafe n’est pas tout seul, se trouvant parfaitement connecté à un réseau d’ONG et de projets. Outre les projets soutenus par la Fondation Chances numériques, bon nombre d’acteurs libéraux de gauche, issus de diverses organisations anti-discours de haine, sont censés expliquer aux citoyens les dangers de droite sur Internet. Ensemble, ils forment une sorte de réseau pédagogique ; un réseau certes soutenu par des millions d’euros, mais qui ne soutient certainement pas, lui, l’indépendance des fournisseurs de contenu sur Internet.