Le lancement d’un nouveau média alternatif est toujours une plaisante nouvelle. Nous nous sommes entretenus avec Virginie Joly, rédactrice en chef du Miroir du Nord (lemiroirdunord.fr), qui s’adresse aux flamands de France du Nord/Pas-de-Calais.
Pourquoi ce titre et quelle est votre ambition ?
Le nom « le Miroir du Nord » n’a pas été choisi par hasard. Il fait référence au personnage de Till l’espiègle, personnage de fiction populaire en Allemagne. Till Eulenspiegel en allemand renvoie à 2 objets fétiches du personnage : la chouette et le miroir. En 1867, l’écrivain belge Charles de Coster reprend les aventures de Till l’espiègle avec l’ouvrage « La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au pays des Flandres » où Till devient le symbole flamand de la résistance face aux espagnols. Il devient alors une figure de lutte contre l’oppression pour la défense des libertés.
Notre périmètre se limite à l’actualité de l’ex région du Nord-Pas-de-Calais » ou pour être plus précis historiquement « aux Pays-Bas Français », soit les 3 territoires qui les composent : la Flandre, l’Artois et le Hainaut. Plusieurs raisons animent ce choix : l’actualité y très riche et ce territoire a ses propres caractéristiques, sa propre histoire qui n’ont pas de rapport avec la Picardie. Outre d’autres considérations notamment d’ordre financier, la fusion des grandes régions a été une erreur majeure quant au respect à avoir vis-à-vis de ses habitants.
Notre ambition est d’être une alternative aux médias en place, d’apporter un autre regard sur l’actualité. Un traitement différent, qui n’est pas lisse, qui dérange parfois.
Quelle est votre équipe ?
Nous sommes une petite équipe de contributeurs réguliers et spontanés. D’autres sont là pour « débusquer » l’information.
Notre point commun : montrer un autre visage de l’information dans le Nord-Pas-de-Calais. Plusieurs choses ont inspiré la démarche :
- Un réel goût pour le décorticage de l’actualité couplé à l’écriture
- Un constat alarmant du fonctionnement de la presse subventionnée qui s’illustre de manière encore plus flagrante en période de campagne électorale. Toute personne qui sort de cette ligne est vue comme un complotiste.
- Les initiatives inspirantes de médias alternatifs comme Breizh info ou Paris Vox qui contrecarrent cette bien-pensance constante
Tout en ligne uniquement ? Le marché n’est-il pas encombré ?
C’est la ligne souhaitée de rester uniquement sur le web. C’est aujourd’hui effectivement le moyen le plus utilisé par les sites comme le nôtre. Certes, il y a beaucoup de médias en ligne mais le marché semble encombré du côté des médias subventionnés. Beaucoup d’entre eux ont d’ailleurs créé leur « jumeau » présent uniquement sur internet comme le Huffington post du groupe Le Monde.
Ce qui est à observer sont les médias régionaux existants. Le marché est pauvre. Tous les journaux sous format papier (une dizaine) appartiennent au groupe belge Rossel-la Voix. Ils s’échangent les articles, répartis entre les titres, une uniformité certaine et regrettable. Du côté de l’audiovisuel, la chaîne locale Weo fait aussi partie de ce groupe. BFM Grand Lille et France 3 Nord-Pas-de-Calais complètent ce tableau de médias subventionnés.
Deux médias en ligne se distinguent : Médiacités a une antenne à Lille, leurs investigations sont de qualité et éclectiques sur les personnalités publiques concernées. Daily Nord amène aussi un souffle différent et n’hésite à dénoncer certains agissements. Le marché nous semble donc ouvert.
Nous avions aussi envie de faire prendre conscience du fonctionnement des médias. Nous consacrons quelques articles sur la question par une rubrique « vie et l’actualité des médias ». Nous y parlerons de leurs financements, prises de position partiales, lutte contre les fake news. Il pourra nous arriver de partager des articles de l’OJIM.
Quelle place donnez-vous au micro-localisme ?
Le Miroir du Nord entend assurer la promotion du local, de l’activité économique qui en dépend. Le localisme est un enjeu du troisième millénaire.
La gestion de la crise sanitaire, si pitoyable fut elle par les dirigeants politiques français aura eu un mérite. Elle aura fait prendre conscience à une partie de la population des méfaits de la mondialisation : pas de masques, confinement obligé.
Mais au-delà, nous souhaitons faire comprendre que la région ne signifie plus rien. Déjà par son nom « Hauts De France », à quoi cela fait il référence ? Où est notre histoire ?
Le localisme politique, ce n’est pas se localiser en plus petit, mais de bien se localiser. La région est devenue un cul de sac bordée par une frontière meuble et un mur psychologique et une barrière linguistique. Cela nous a éloigné de l’ère politique et économique originelle.
Les élites politiques de la région mènent au mieux des politiques régionales mais non régionalistes. Nous avons affaire à des préfets qui déploient un plan national sans prendre en compte nos spécificités.
Culturellement, ces mêmes élites sont parvenues à ancrer dans la tête des gens que notre culture était « le chti ». On préfère des habitants incultes que plongés dans leur véritable histoire culturelle. Adieu notre culture flamande. Tout est fait pour la faire disparaître. Même l’enseignement du néerlandais n’est pas acquis. Il est pourtant un outil précieux pour les jeunes qui trouvent du travail plus rapidement par son apprentissage. Toutes ces manœuvres ont abouti à des résultats catastrophiques. Les indicateurs démontrent que la région est constamment dernière dans tous les domaines : illettrisme, santé, chômage…
Quel est votre modèle économique ?
Le modèle économique va être celui emprunté à d’autres sites d’informations alternatifs. Le principe essentiel est de ne pas recourir aux subventions publiques. Nous avons commencé à faire un appel aux dons de manière officieuse auprès de soutiens de la première heure. Appel qui a reçu quelques retours positifs. Nous voulons d’abord faire nos preuves avant de faire un appel plus large à la générosité de nos lecteurs et autres soutiens. L’objectif est de salarier au moins 1 personne pour assurer une production quotidienne sur le long terme.
C’est un véritable défi qui souvent a fait défaut pour des initiatives passées similaires. Il faut par conséquent être entouré au départ d’une véritable équipe pouvant produire au moins hebdomadairement des articles de qualité.
Comment s’abonner ?
Il n’y a pas d’abonnement ; l’objectif est que l’information reste accessible de manière gratuite. Cependant, le journalisme d’investigation pourrait devenir un objectif à moyen terme. C’est un travail d’enquête long à réaliser et qui par conséquent coûte cher. Il pourrait alors être envisagé, pour ce type de publications, un accès payant à l’article.
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