Dans le conflit russo-ukrainien, les victimes collatérales sont nombreuses, du côté des pertes civiles (impossibles à chiffrer comme il est impossible à cette heure d’en déterminer les responsables à moins de croire n’importe quelle nouvelle de propagande de guerre). Et aussi du côté, comme nous l’avons déjà dit, de la vérité, une autre victime collatérale immédiate. Et on pourrait ajouter le bon sens, quand on voit Le Monde – il est vrai abondamment pourvu en éditorialistes proches du Département d’État américain et en Young Leaders de la French American Foundation – déclarer la guerre à la Russie le 19 avril 2022.
Un éditorial guerrier
Plus rien ne doit étonner en période de propagande de guerre. Surtout pas les déclarations martiales au moment où la plupart des médias dominants ont oublié toute déontologie, toute distance, toute retenue. C’est ainsi que dans un éditorial engageant la rédaction, le quotidien libéral libertaire déclare la guerre à la Russie.
Sous le titre « les Européens face à des décisions majeures », considérant « l’agression russe de l’Ukraine comme une attaque contre l’ordre mondial qui régit les relations entre États », le quotidien recommande la guerre totale contre la Russie. Soulignons au passage que « l’ordre mondial » est un ordre américain qui pourrait aussi bien être qualifié de « désordre mondial » après la guerre d’Irak, la guerre d’Afghanistan, la guerre en Libye, les 78 jours de bombardements sur la Serbie et quelques autres babioles, mais passons.
Combattre les Russes jusqu’au dernier Européen
Remarquons également que le conflit se déroule sur le sol européen, que les États-Unis sont très loin et n’en pâtiront pas un instant. Au contraire les allemands, les polonais et autres suédois vont acheter des F16 américains et nous allons tous nous chauffer au gaz de schiste américain à un prix multiplié par un facteur X qui reste à déterminer. Renchérissant sur les propositions atlantistes de Bruno Le Maire (il faut mettre à genoux l’économie russe), l’éditorial recommande successivement :
- D’augmenter les sanctions en particulier sur le plan financier.
- D’arrêter les achats de gaz et de pétrole russes.
- D’armer toujours plus l’Ukraine de manière offensive.
Citant avec amour Mario Draghi (ancien employé de Goldman Sachs) l’éditorial conclut, que ne pas le faire :
« reviendrait à dire aux Ukrainiens : acceptez l’esclavage et la soumission. Un message contraire à nos valeurs européennes ».
On pourrait aisément paraphraser et inverser les termes, le faire « reviendrait à dire aux Européens : acceptez l’esclavage et la soumission américaine. Un message contraire aux intérêts des Européens ».
Pour les « valeurs », relisons Orwell, la liberté c’est l’esclavage, la paix c’est la guerre. Une leçon parfaitement assimilée par cet éditorial qui demeurera un cas d’école.
Voir aussi : Le programme Young Leaders, agent de l’influence américaine dans les médias français