Le NYT est une institution du clergé médiatique libéral libertaire. Un vrai succès économique, le journal woke par excellence qui met une majuscule à Black, mais pas à white. Le même qui voit dans la décapitation de Samuel Paty une bavure policière. Mais dont certains employés se mettent en grève pour des histoires de gros sous.
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Des sous, des sous !
C’est ce que scandaient imaginons-nous les 1100 employés (sur 1700 au total) du NYT, faisant grève le 8 décembre, alors que l’inflation est repartie aux Etats-Unis et à New-York en particulier. La première grève depuis 40 ans sur fond de négociation de convention collective. Le journal a su prendre le virage du numérique et est largement bénéficiaire alors que le nombre de quotidiens diminue aux Etats-Unis. La direction proposait bien une hausse de quasi 12% des salaires… mais répartie sur trois ans. Les employés le voient autrement, souhaitant que la manne des huit millions d’abonnés soit mieux répartie entre direction, actionnaires et collaborateurs. On a beau être libertaire, le fond libéral revient vite quand il s’agit d’argent.
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« La société ne traite pas très bien les employés syndiqués. Nous sommes sans convention collective depuis 20 mois, nous avons tous travaillé sans arrêt pendant le Covid, 20 heures par jour, y compris les week-ends, et sans aucune augmentation», a protesté auprès de l’AFP Albert Sun, infographiste de 34 ans qui travaille au NYT depuis 11 ans. Pour sa collègue Phoebe Lett, il faut se battre pour «obtenir un salaire minimum de 65.000 dollars par an (brut et avant impôts)». «C’est important parce que l’entreprise veut que l’on travaille dans une ville où la vie quotidienne est très chère. J’ai des collègues qui ont un deuxième emploi pour garder celui-là, qui est un job de rêve», a souligné auprès de l’AFP cette productrice de podcasts de 31 ans.
Sur une tribune improvisée devant l’immeuble du New York Times, des représentants des salariés ont revendiqué avec force, parfois en chanson, le fait de «faire le journal» et donc d’être à l’origine des bénéfices de l’entreprise, et ont réclamé d’être «payés à (leur) juste valeur». La New York Times Company a publié en novembre un chiffre d’affaires pour le 3e trimestre 2022 de 547 millions de dollars contre 509 millions pour la même période de 2021, en hausse de 7,6% sur un an. Mais le bénéfice net trimestriel est en chute de 33% sur un an (36 millions de dollars cette année contre 54 millions en 2021).
« Décevant »
Dans un communiqué, la direction a rappelé que les négociations salariales n’avaient pas échoué et qu’il était «décevant que (les employés) en viennent à des actions extrêmes alors que nous ne sommes pas dans une impasse». Elle a affirmé avoir proposé une augmentation générale des salaires de «11,5%» sur trois ans à compter de la signature d’une nouvelle convention collective. Tout en menaçant: «La proposition de la NewsGuild, qui ajouterait plus de 100 millions de dollars de coûts, rendrait difficile le maintien de nos investissements dans le journalisme».
Avec ses 1700 salariés, huit millions d’abonnés et quelque 150 millions de lecteurs par mois, le NYT, monument de la presse écrite plutôt classé à gauche, s’est parfaitement redressé et adapté à l’ère numérique avec son site internet, ses vidéos, ses podcasts… Le mouvement ne devrait pas empêcher la parution du quotidien vendredi: «Pendant le débrayage, les employés non syndiqués de la salle de rédaction seront en grande partie responsables de la production des informations», selon un article du journal.
Des manifestants n’ont pas exclu de poursuivre le mouvement au-delà de vendredi et une porte-parole du journal a précisé qu’une nouvelle session de négociations était prévue mardi prochain.