Après l’embellie covidienne, la consommation du petit écran a connu une forte décrue. Une tendance qui n’implique pas une austérité numérique mais un bouleversement de l’usage des écrans.
Une décrue inédite !
En 2022, en moyenne, les français ont passé 3h36 devant la télévision selon le rapport Médiamétrie 2022. C’est beaucoup certes mais c’est surtout quinze minutes de moins qu’en 2021 et 32 de moins qu’en 2020 (année faste du fait du confinement). Si on regarde un peu plus loin dans le rétroviseur on peut constater une certaine stabilité au cours des exercices : 3h40 en 2019, 3h46 en 2018, 3h42 en 2017 et 3h43 en 2016.
La chute de 2022 peut laisser envisager à moyen terme un passage sous la barre des trois heures qui ramènerait au niveau d’avant les années 90 ! L’augmentation de la consommation avait pourtant été continuelle de 1987 à 2010, avec en tout 25 % de visionnage en plus pour les français selon l’Insee.
Les premières décrues des années 2010 sont attribuées à l’explosion du numérique.
Moins de télévision ne correspond donc pas à moins d’écran mais à une modification du rapport aux supports numériques.
Si la liseuse PDF ne s’affiche pas, vous pouvez télécharger directement le rapport sur le site de Médiamétrie.
2022 une année pourtant cathodique
La tendance pourrait être beaucoup plus forte dans les années à venir. En effet, 2022 aurait dû être une année riche en télévision. La guerre en Ukraine, l’élection présidentielle et la Coupe du monde de football ont dopé les audiences et sans ces trois « événements » on peut imaginer que le petit écran se serait effondré encore plus bas. La finale de la Coupe du monde de football a ainsi été regardée jusqu’à 30 millions de personnes en France alors que la finale de 1998 n’avait rassemblé « que » 20 millions de téléspectateurs.
On peut envisager que pour les grands événements sportifs, les réseaux sociaux, par leur viralité, poussent à la consommation télévisée. En dépit de ce record d’audience, TF1 a perdu 1 % de part d’audience nationale en 2022 par rapport à 2021 passant de 19,7 % à 18,7 % (loin devant France 2 qui progresse de 14,7 % à 14,8 %, France 3 complétant le podium en se maintenant à 9,4 %).
Des chaînes d’info pas si prisées
L’actualité ukrainienne aurait pu laisser penser à une explosion de la consommation des chaînes d’info en continu mais la tendance demeure assez douce. BFM TV marque une belle progression passant de 2,9 % à 3,3 %, CNews de 2 % à 2,1 % et LCI de 1,1 à 1,7 %. Toutes progressent donc mais restent à des niveaux très bas en comparaison au trio de tête.
En revanche, si ces chaînes ne sont pas parmi les plus regardées, il s’agit de tenir compte de deux éléments : d’une part, elles tournent en continu dans de nombreux cafés et restaurants, ce qui peut augmenter d’une certaine manière leur audience. D’autre part, et c’est le point le plus important, ces chaînes sont « créatrices » de contenus pour les réseaux sociaux. Ainsi, la chaîne CNews, qui apparaît étonnamment basse en termes d’audience, est très largement reprise sur les réseaux sociaux pour des propos polémiques. Une caractéristique qu’elle partage avec BFMTV, dont les entretiens d’Apolline de Malherbe sont souvent l’objet de nombreux échanges sur les réseaux.
Transformations et interdépendance
Les gros scores de la télévision sont aujourd’hui alimentés par les réseaux et inversement. L’émission de Cyril Hanouna « Touche pas à mon poste » est ainsi un format vivant deux fois. Une première fois sur le petit écran et une seconde fois sur les réseaux sociaux. Inversement, en « parlant » d’un sujet de manière récurrente, le réseau social va doper l’intérêt pour un événement (comme la finale du Mondial de football). La baisse de la consommation de télévision devrait donc se poursuivre sans tuer pour autant le petit écran. La production télévisée a ainsi besoin des réseaux sociaux et inversement. Ce qui bouleverse l’équilibre en place concerne plus la télévision comme outil pour regarder des films et des séries. L’apparition des plateformes a ainsi fait voler en éclat les téléfilms et les programmes cinémas « phares » du dimanche soir. Autres temps, autres mœurs.