Tandis que se profilent les dangers de “l’intelligence artificielle” concernant la liberté d’expression et celle des médias, il est de notoriété publique que l’indépendance des médias laisse à désirer.
L’affaire « Story Killers », qui fait ressortir le poids d’agences israéliennes (« place forte de la désinformation », selon France Info le 16 février 2023) fournissant des dossiers clés en mains à divers médias, ou encore la convocation secrète, à la veille des premières manifestations contre les retraites, de journalistes français afin de leur fournir les éléments de langage à diffuser dans leurs journaux et autres médias, tout cela montre à quel point les élites politiques, économiques et médiatiques sont imbriquées. Il devient difficile d’accuser quiconque ose l’écrire de théoriser un complot.
Allemagne aussi
Le phénomène est international et l’Allemagne n’y échappe pas. Des exemples récents, rapportés par l’hebdomadaire Junge Freiheit, le montrent.
Dans un article daté du 2 février 2023, l’hebdomadaire montrait que l’AfD (Alternative für Deutschland) a été systématiquement bannie des grandes émissions politiques, du moins « invitée » mais de manière très en-deçà de ce qu’elle représente réellement dans le pays. Y compris en termes de résultats électoraux. Parallèlement, les Verts, en chute libre en Allemagne (au même titre que la vente des produits bio — moins 12 % en 2022), ont été amplement sur-représentés. Globalement, la part de l’AfD sur la ZDF et l’ARD, les deux principales chaînes de télévision et de radio publiques, n’est que de… 0,4 %. Un tel chiffre s’appelle censure. Or, l’AfD représente actuellement environ 15 % des intentions de vote dans tous les sondages et pour tous les types d’élections. Comparativement, les Verts (100 invitations) ne sont pas les seuls à être sur-représentés, c’est aussi le cas du SPD (129 invitations) et de Die Linke (34 invitations). La CDU/CSU chrétienne-démocrate, au programme provoquant de fortes tensions en interne actuellement, avec exclusions à la clé, tant il est proche de celui de la gauche du SPD, a été invitée 125 fois.
Concrètement, les médias publics allemands donnent environ 150 fois plus la parole aux idées de gauche ou aux idées sociales-démocrates qu’aux idées alternatives, pourtant populaires et ancrées dans le pays. Pour justifier ses « choix », la ZDF a indiqué qu’« il n’est pas toujours possible de représenter toutes les positions imaginables dans un programme ». Résultat des courses : lors des débats télévisés, les téléspectateurs écoutent des représentants politiques qui sont tous d’accord. Ce fut le cas au sujet du coronavirus, c’est maintenant pareil au sujet de la guerre en Ukraine ou de la crise énergétique.
Les grandes chaînes de télévision en mode partisan
Un autre exemple ? Le 16 février 2023, le même hebdomadaire Junge Freiheit notait que l’indépendance de la ZDF et de l’ARD devait être d’autant plus remise en question après une étude de l’entreprise suisse Tenor. Selon cette étude, les deux médias publics auraient pu influencer la campagne électorale fédérale de septembre 2021. En effet, l’ARD et la ZDF ont fait de nombreux reportages dans des Länder alors touchés par de fortes inondations (180 morts). Il s’avère que les dirigeants de ces Länder n’ont pas tous été présentés de la même manière (pendant le processus électoral, rappelons-le). Ainsi, des dirigeants de la CDU étaient à 75 % présentés de manière neutre ou favorable tandis que d’autres, du SPD, ne l’étaient qu’à 25 %. Concernant le gouvernement de la Rhénanie-Palatinat, une défaillance clairement reconnue a conduit à la démission de la ministre de l’environnement (Verts) — avant de devenir… ministre fédérale de la famille — mais l’ARD et la ZDF n’ont proposé aucun reportage négatif. Notons que Malu Dreyer, chef du gouvernement de Rhénanie-Palatinat est aussi… Présidente du conseil d’administration de la ZDF, chaîne de télévision publique donc. Ceci expliquerait-il cela ?
Dans l’ensemble, l’institut de recherche suisse Tenor considère que les médias publics allemands « sont de gauche ». Les partis qui obtiennent le plus de reportages positifs ou très positifs sont les Verts et le SPD. Qui « bénéficie » des reportages les pires ? Vous avez deviné c’est Alternative für Deutschland, le Rhin n’est plus une frontière pour les médias de grand chemin.