En 1991, la dissolution de l’Union soviétique ouvrait, pour beaucoup d’acteurs de la scène géopolitique, de nouvelles perspectives. Certains comme Francis Fukuyama, se sont même hasardés à pronostiquer que la mort de l’ennemi des États-Unis marquerait la fin de l’histoire et la domination sans partage de l’american way of life et de l’ american way of thinking.sur l’ensemble du globe. Une occasion manquée pour la fin de l’histoire mais un moment de grâce pour George Soros. Seconde partie.
Voir aussi : George Soros et l’Open Society en Roumanie. Première partie
De l’art d’exploiter un incendie
Le cas roumain illustre la manière dont une foule savamment manipulée peut servir le crédo sorossien. Nous sommes en 2015, un groupe de rock très populaire se produit dans une boîte de nuit de Bucarest. En temps normal, la capacité d’accueil du club ne dépasse pas 80 personnes. Mais ce soir-là, événement spécial oblige, plus de 400 personnes sont réunies dans cet endroit. Un feu se déclare, en dix-neuf minutes l’ensemble de la structure brûle et cause 64 morts. Très vite, l’émotion pousse à s’interroger sur les raisons du drame. Tout aussi vite, la municipalité est pointée du doigt pour avoir donné l’autorisation d’ouverture au club malgré des normes anti-incendie non respectées. Des manifestations ont lieu avec pour revendication principale la démission du maire de la ville. Le 3 novembre, Plusieurs dizaines de milliers de jeunes érigent cette affaire en symbole de la corruption du pays et exigent la démission du Premier ministre Victor Ponta – considéré comme hostile à Soros — ainsi que de son cabinet. La requête est acceptée dès le lendemain. Il confie a posteriori : « J’espérais que ma démission satisferait les manifestants […] Je ne vise personne en particulier, mais d’expérience, ceux qui manipulent la souffrance des gens en paient le prix tôt ou tard »[1].
Son opposant, Klaus Iohannis, a déclaré que la démission du gouvernement précédent était la première étape vers des politiques plus transparentes, concluant que « des gens ont dû mourir pour cela ». Deux jours après cette nomination, un sondage montre que seuls 7% des manifestants considéraient le gouvernement responsable de l’incendie de la boîte de nuit. Un élément qui confirme le constat de Gustave le Bon sur la manipulation des foules.
Pseudo-révolutions de couleur
La lutte contre la corruption fait partie des éléments nécessaires à une révolution colorée. Le dossier cite quatre points qui permettent de qualifier les révolutions de couleur : le leader visé doit être impopulaire ; les forces de la révolution doivent être soutenues par les médias et certaines puissances étrangères ; elles doivent apparaître dénuées de toute idéologie et porter des valeurs consensuelles comme la démocratie, la liberté ou le développement économique ; enfin, le gouvernement doit apparaître comme étant soutenu par des puissances étrangères. L’influence sur les médias est un sujet cher à George Soros. Nombre de médias reçoivent des subventions directes ou indirectes afin de soutenir la grille idéologique du philanthrope. Il est donc largement en mesure de médiatiser les forces anti-régime.
Un terrain de jeu mondial
Déstabiliser les États est dans les moyens de George Soros. Il a ainsi bâti sa fortune en spéculant contre la livre anglais, mettant la Banque centrale britannique à genoux. Pour citer des exemples plus récents, en 2020, Soros déploie des fonds pour attaquer le gouvernement de Viktor Orbán, il investit 33 millions de dollars pour financer Black Lives Matter dont les émeutes ont perturbé la fin du mandat de Trump. Notons aussi qu’il soutient la Turquie lorsqu’elle menace de déverser des hordes migratoires sur l’Europe et qu’il a influencé Angela Merkel avec de vigoureuses recommandations lors de la crise des migrants[2].
Dans le cas de la Roumanie, la lutte contre la corruption a été le catalyseur de la colère, comme il est récurrent de le voir dans l’histoire. L’image des gouvernants se gavant sur le dos du peuple opprimé est presque une image d’Épinal, tout comme l’est la pseudo-réplique de la reine Marie-Antoinette au peuple manquant de pain : « qu’ils mangent de la brioche »…
Dans la suite de l’accession de Ihoannis au pouvoir, Marina Macovei, une autre créature modelée par Soros, est nommée ministre de la Justice. Elle met en place de larges programmes anti-corruption. Ceux-ci sont à double usage puisqu’ils créent des dispositions qui peuvent aussi protéger le nouveau gouvernement en place. Là encore, il ne s’agissait que d’une raison factice afin de faire vaciller le gouvernement de Victor Ponta, membre du parti social-démocrate, assez réticent au projet de Soros.
Soft power et hard power
Ces ingérences dans les élections de certains pays ne sont pas seulement l’apanage de Soros, qui est parfois soutenu dans cette tâche par l’administration américaine. Si les méthodes diffèrent, Soros usant plutôt d’un soft power quand les Américains n’hésitent pas à faire usage de la force, les objectifs sont les mêmes. Les deux parties visent l’instauration d’une « démocratie libérale » dans le plus grand nombre de pays possible. Le dossier se penche sur le rôle de l’administration Obama, notamment. Notons que Soros a donné près de 25 millions de dollars à la campagne d’Hillary Clinton en 2016[3].
Soros a investi dans des programmes de lutte contre la xénophobie, le racisme, le chauvinisme. Dans ce cadre, nous observons que tenir les médias est primordial. Les fact-checkers sont chargés de désamorcer les éventuelles critiques sur les modèles politique et économique libéraux libertaires. Nous comprenons mieux pourquoi les GAFAM tiennent à les tenir en main et à les former eux-mêmes.
Malgré cela, certains en Roumanie essaient de résister au phénomène Soros. En novembre 2017, une loi portée par un sénateur social-démocrate force les ONG à publier la liste de leurs financements. Un moyen de mettre en lumière les différentes têtes de l’hydre Soros. Le patron du parti social-démocrate déclare que depuis les années 1990, la nébuleuse mise en place par le milliardaire a instillé le « démon » dans le pays[4].
Soros n’est qu’un membre d’une autre nébuleuse : celle des philanthropes idéologues. Parmi eux, Bill Gates ou Rockfeller ont les mêmes objectifs que Soros et les mêmes champs de bataille : les médias, l’éducation, la culture.
Notes
[1] Capital Research, 30 janvier 2018
[2] youtube.com/watch?v=baC9bQw5zB4
[3] Capital Research, 21 décembre 2017
[4] Capital Research, 8 janvier 2018