À l’école, les cancres cherchent souvent à dissimuler leurs bulletins de notes pour tenter d’échapper au jugement parental. L’ancien ministre de la Santé, Olivier Véran, a tenté la même brillante stratégie pour essayer de cacher au grand public le rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) faisant le (cruel) bilan de la gestion des débuts de la crise du Covid 19.
Un rapport mis sous le boisseau
Mais c’était sans compter sur la persévérance du quotidien Le Parisien-Aujourd’hui en France qui a dû faire appel à la justice administrative pour obtenir la communication de ce fameux rapport. En Février 2021, le journal s’était en effet vu opposer un refus ferme de la part du ministère arguant du caractère « confidentiel » du rapport pour justifier son absence de publication.
Après deux ans de procédure, le Tribunal administratif de Paris a finalement estimé que cette prétendue confidentialité n’était pas justifiée et a condamné l’État à verser 2.000 euros au journal pour couvrir les frais de justice.
Le ministère de la Santé a donc publié, mercredi 5 avril, le résultat de l’audit qu’il avait commandé sur sa gestion du Covid-19, à la sortie du premier confinement. Un document de 205 pages à la lecture desquelles on comprend fort bien les tentatives désespérées de l’exécutif pour l’étouffer.
Amateurisme, incohérence et désorganisation
En effet, le rapport d’audit, intitulé « Retour d’expérience du pilotage de la réponse à l’épidémie de Covid-19 par le ministère des solidarités et de la santé », remis à Olivier Véran en novembre 2020, met en évidence une série de manquements et de dysfonctionnements particulièrement lourds et même inquiétants, faisant naître de légitimes interrogations sur les compétences des gestionnaires de cette crise sans précédent qui a entraîné la mise sous cloche de tout un pays.
375 témoins pour une organisation « incompréhensible »
Décortiquant minutieusement l’organisation des services de l’avenue de Ségur (Paris XVe) et du centre de crise sanitaire entre janvier 2020 et le début de l’été, soit la période critique de la première vague du Covid-19, le rapport pointe du doigt les nombreux ratés de ces structures en s’appuyant sur les témoignages de pas moins de 375 personnes (Hauts-fonctionnaires, directeurs d’agences régionales de santé (ARS), d’hôpitaux ou d’Ehpad, personnels soignants, élus, etc). Des récits qui révèlent une organisation « peu lisible » voire « incompréhensible » dénuée de véritable « processus de décision » et très rapidement « submergée » et « dépassée ».
Les Ehpad « oubliés »
Exemple le plus frappant, et le plus tragique, de ce fiasco : l’oubli durant les premières semaines de la crise des 611 000 personnes âgées résidentes dans les maisons de retraite (Ehpad). Rien que ça…
On ne peut donc que saluer le travail des journalistes et la direction du Parisien et se réjouir de l’indépendance (devenue rare) de la justice qui ont permis de faire échouer la tentative de dissimulation du gouvernement sur un sujet aussi sensible qui a lourdement pesé sur la vie de tous les Français.
Lire le rapport : igas.gouv.fr