Après sept mois d’enquête, ils ont déposé un rapport sur l’avenir de l’audiovisuel publique : les députés LR et Renaissance, Jean-Jacques Gaultier et Quentin Bataillon, présentaient mercredi 7 juin leur rapport en leur qualité respective de président et de rapporteur. En question notamment : la suppression de la publicité.
« Il y a une exception en France sur l’organisation de notre audiovisuel public […] sur la publicité. Beaucoup d’audiovisuels publics européens ont banni la publicité des antennes des services publiques européens ; c’est le cas de la BBC, […] en Allemagne (pas de publicité après 20h, pas le dimanche et les jours fériés), […] en Espagne, […] dans les pays scandinaves […] ».
Alors qu’il présente son rapport en Commission des affaires culturelles, Jean-Jacques Gaultier est limpide : l’audiovisuel français est à part dans le paysage similaire européen, notamment en matière de publicités. Quinze minutes après le début de la commission, le président du rapport d’information soulevait la question qui fâche : la suppression de la publicité – dont le montant avoisinait pour l’année 2022 les 456,8 millions d’euros.
Pourquoi supprimer la publicité ?
C’est pour répondre à « la promesse faite aux Français [ndlr. lors de l’examen de la LOI n° 2009-258 du 5 mars 2009] de l’arrêt de la publicité entre 20h et 6h », rappelle le rapporteur Renaissance de la mission. Une « attente très forte de nos compatriotes, souligne Quentin Bataillon, signe distinctif de notre service public [ainsi que le] modèle choisi par de nombreux voisins européens, […] vers lequel nous devons tendre ». À la suite de l’audition du journaliste Florence Hartmann, qui considérait « qu’il était dangereux pour les médias de service public qu’une partie de leur financement repose sur une ressource aussi volatile que la publicité », les rapporteurs ont estimé qu’il était nécessaire de diversifier les ressources des antennes publiques et ont félicité le modèle d’Arte, qui s’interdit les ressources publicitaires.
Pour les deux rapporteurs, il est nécessaire de diminuer progressivement la publicité, dans la logique de « conforter la logique de service public échappant aux logiques commerciales, mais également de ne pas déséquilibrer un marché publicitaire dont il a été rappelé qu’il voyait ses principaux annonceurs migrer progressivement vers les supports numériques. » Une suppression de toute présence des annonceurs sur les plateformes publiques qui s’adresserait aussi bien à la publicité numérique qu’aux parrainages.
Comment supprimer la publicité sur le service public ?
Pour le député Gaultier, la suppression des annonces publicitaires entre 20h et 6h est une nécessité ; mais le manque à gagner pour France Télévisions, trop abyssal, devrait nécessairement être compensé pour pouvoir assurer sa pérennité. « Il faut le compenser, explique le président du rapport, en taxant les services numériques, notamment les services de streaming (Google, Amazon, Meta, Facebook…) ». Une « taxe très dynamique » et des « recettes publicitaires destinées à compenser [celles] en diminution sur notre service public. » C’est à cette seule condition que pourra être bannie la publicité sur tous les supports, y compris numériques. Les rapporteurs refusent néanmoins le plafonnement financier des publicités chez France Télévisions et appellent à garder le même plafonnement financier qu’actuellement pour Radio France, par mesure de prise en compte les limites du marché de la publicité et la situation des radios privées qui en dépendent.
Une proposition en pleine bataille avec le privé
La proposition tombe en plein contexte de guerre ouverte entre les antennes privées et publiques, alors même que l’Association des chaînes privées juge que France Télévisions commet des entorses à la concurrence en bénéficiant des subsides publics. Le secteur privé, qui regrettait la part, réalisée après vingt heures en dépit d’une interdiction, du chiffre d’affaires de nature publicitaire de certaines chaînes publiques, devrait donc se montrer satisfait d’une telle proposition. Les deux députés déposeront quoiqu’il en soit bientôt une proposition de loi organique de manière à « pérenniser le financement de l’audiovisuel public par une fraction de TVA ».