Elle a été nommée à la surprise générale, le 11 janvier 2024, ministre de la Culture : Rachida Dati a pris ses fonctions à la tête du ministère de la Culture, laissant Rima Abdul Malak avec un maigre bilan. Retour sur les résultats du ministre sortant et les réactions des professionnels des médias à l’occasion de l’arrivée de Rachida Dati.
La malédiction de la rue de Valois et le bilan famélique de Rima Abdul Malak
C’est une valse courte, qui se danse rue de Valois : les ministres de la culture d’Emmanuel Macron sont-ils frappés de malédiction, pour ne pas parvenir à conserver leur siège au-delà de deux ans ? Après dix-neuf mois d’exercice, Rima Abdul Malak a donc fait un peu mieux que Françoise Nyssen (17 mois) mais part sans avoir porté de projets de loi significatifs au Parlement. Pendant plus d’un an et demi, elle n’a fait que participer à l’examen des propositions de lois et non des textes émanant de son propre cabinet.
Positionnée sur le sujet de la concentration dans les médias, dont elle a indiqué qu’ils étaient moins concentré qu’il y a quarante ans, Abdul-Malak a pris des positions offensives contre les médias détenus par Vincent Bolloré : déplorant qu’il y ait déjà eu « une vingtaine d’interventions de l’ARCOM depuis 2019 pour C8 et CNews », elle s’est aussi élevée contre le changement de direction du JDD et indiqué refuser de répondre aux entretiens du JDD.
Fausse suppression de la redevance
L’ancienne conseillère d’Emmanuel Macron en culture et communication a néanmoins apporté sa petite contribution aux projets de loi de finance, en y immisçant la suppression de la redevance télévisuelle. Une mesure éphémère, permise par un contrebalancement sur une fraction de TVA ; aucune mesure d’anticipation ne semble avoir été prise sur ce sujet.
Le ministre avait également soutenu les mesures d’aides exceptionnelles relatives à la hausse du coût du papier (destinées aux éditeurs de presse d’information de politique générale), obtenant une enveloppe de 30 millions d’euros pour l’ensemble des éditeurs les plus touchés.
En porte-à-faux avec le président de la République sur la loi immigration ou sur « l’affaire Depardieu », Rima Abdul Malak n’a pas été reconduite à la rue de Valois et s’est félicité d’être toujours « restée libre ».
Rachida Dati : un ministre qui « n’y connaît rien »
« Elle n’y connaît rien, mais ce n’est pas grave ». L’ancien ministre de la Culture, Frédéric Mitterrand, aura eu le mérite de l’honnêteté. Estimant que Rachida n’avait pas de qualités particulières pour diriger son portefeuille, il a indiqué à l’antenne de RTL qu’elle devrait bénéficier d’un « très bon directeur de cabinet et une équipe très forte » pour accomplir sa mission. L’ancien socialiste Julien Dray s’est lui mué en défenseur du nouveau ministre sur CNews en affirmant : « C’est mieux d’avoir de vrais responsables politiques à la tête de ces ministères-là, que d’avoir simplement des professionnels », faisant valoir son expérience comme vice-président à la culture de la région Île-de-France.
Des professionnels mitigés
De leur côté, les professionnels du secteur se sont montrés plus mitigés : la SACEM a souligné que la combativité du ministre pourrait être un atout, notamment pour clôturer le règlement européen sur l’IA. Le Syndicat national de l’édition phonographique a quant à lui salué le dynamisme, l’engagement et l’indépendance d’esprit du ministre. Le secrétaire général du SNJ-CGT a quant à lui fait part de son « étonnement et effarement » relatif à la nomination d’un ministre mis en examen pour « corruption » et « trafic d’influence passif ». D’autres, sous couvert d’anonymat, ont déploré le marchepied pour la mairie de Paris que représenterait un tel poste.
Nombre de ces acteurs, à l’image du Syndicat des entreprises artistiques et culturelles (SYNDEAC) ou la Société civile des auteurs multimédia (SCAM) ont quoiqu’il en soit déploré l’instabilité de ce poste prestigieux. Pour autant, la Fédération nationale des syndicats du spectacle, du cinéma, de l’audiovisuel et de l’action culturelle (FENSAC-CGT) indique qu’elle pourrait devenir un « poids lourd du gouvernement ». Une assertion qui reste à prouver : rendez-vous dans deux ans. Ou avant en cas de nouveau changement de titulaire si la turbulente Rachida fait des siennes.