Nichée au cœur des monts alpins, l’École de Journalisme de Grenoble présente la spécificité d’être portée par deux institutions locales, l’Université Grenoble-Alpes et Sciences Po Grenoble. Des référents prestigieux qui sont, selon la direction de l’école, les garants de « l’excellence scientifique » du cursus proposé, mais qui sont parallèlement tout autant la garantie d’une parfaite conformité avec la doxa dominante et les consensus idéologiques obligatoires du temps. Une parfaite soumission à l’air du temps confirmée par la rédaction (certes partielle, le webmaster ayant peut-être renoncé devant le caractère lourdement fastidieux de la tâche…) du site internet de l’établissement en « écriture inclusive » et l’affirmation — qui ne mange pas de pain — « de placer l’engagement sociétal et citoyen au cœur de son projet pédagogique ».
Une école à l’image de la municipalité
Par ailleurs, l’EjdG se félicite de son implantation dans « une métropole innovante socialement, politiquement et économiquement ». Il est vrai que Grenoble s’enorgueillit d’être, depuis de nombreuses années, à l’avant-garde du wokisme écolo-gauchiste. Une tendance lourde incarnée notamment par le maire de la ville (depuis 2014), Eric Piolle (Europe-Ecologie-Les Verts), grand promoteur des menus végétariens dans les cantines scolaires et farouche adversaire des sapins de Noël traditionnels. Eric Piolle s’est également distingué par sa défense des « hijabeuses », ces femmes musulmanes qui militent pour le droit de porter le voile dans le sport, et par l’autorisation du port du « burkini » dans les piscines municipales.
C’est donc à cet environnement « innovant » — que certains qualifient « d’islamo-gauchiste »- que l’EJdG est fière d’être intégrée. Un positionnement largement à gauche donc, confirmé par le profil des invités et autres « intervenants extérieurs », parmi lesquels on pourra noter Mathilde Goanec, journaliste à Mediapart, Laure Pollez, journaliste à Complément d’Enquête ou encore Ariane Lavrilleux.
Cette dernière, journaliste cofondatrice du collectif de femmes journalistes Prenons la Une, est notamment à l’origine des fausses accusations portées contre l’association humanitaire SOS Chrétiens d’Orient. En septembre 2023, elle a également été entendue par la DGSI dans le cadre d’une enquête pour « violation du secret de la défense nationale » suite à des révélations concernant la mission de renseignement française « Sirli », entamée en février 2016 au profit de l’Égypte dans le cadre de la lutte antiterroriste. À l’époque, elle avait été farouchement soutenue par le patron du Parti socialiste, Olivier Faure, ainsi que par les députés Julien Bayou (EELV) et Raquel Garrido (LFI).
Un enseignement bien-pensant qui n’évite pas les « dérapages »
Seule école de journalisme de la région Rhône-Alpes reconnue par la profession, l’EJdG propose à ses étudiants un double-diplôme. À la fin de leurs deux années d’études, ces derniers obtiennent en effet un Master de l’Université Grenoble Alpes et le diplôme de Sciences Po Grenoble. Le concours d’entrée (dont l’épreuve d’admissibilité se déroule en « distanciel ») est ouvert aux candidats titulaires, ou en cours d’acquisition, d’un diplôme de Licence ou équivalent. La formation comprend un tronc commun de journalisme et une spécialité que les élèves choisissent en seconde année (Presse écrite et agence, Radio ou Télévision). Durant ces deux années d’études, l’accent est mis particulièrement sur la convergence numérique des médias et le « contrôle des responsabilités politiques et sociales » de l’activité journalistique. En effet, l’école affirme ne pas considérer le journalisme « comme un exercice littéraire ou un art de l’influence » et être particulièrement attentive à « l’éthique » du métier. Les questions « de déontologie et d’éthique du journalisme » sont donc placées au cœur des enseignements. Une noble préoccupation qui ne semble pas toujours porter les fruits espérés, au regard notamment du scandale qui a secoué l’école en février 2019, dans la foulée de celui de la « Ligue du Lol » qui a touché d’autres établissements du même type. À cette époque, plusieurs anciennes élèves de l’EJdG se sont plaintes sur les réseaux sociaux des propos tenus dans le cadre d’un groupe Facebook animé par certains de leurs anciens condisciples. Céline Argento, journaliste et élève de l’école entre 2014 et 2016, a notamment évoqué sur Twitter « d’anciens membres de [sa] promo » qui « continuent aujourd’hui d’alimenter un groupe de haine, joliment appelé Ultim-hate » « Rien n’est illégal », a‑t-elle assuré, avant d’ajouter néanmoins : « il me semble honteux que des personnes ayant pour vocation d’informer puissent en être réduites à simplement critiquer pour le plaisir ». Des faits confirmés par d’autres anciennes étudiantes parlant de « railleries » et de « moqueries dégueulasses » visant principalement les femmes, élèves comme professeurs.
Rien de très grave en apparence mais toutefois largement suffisant — à l’heure des sensibilités exacerbées et des fragilités extrêmes — pour susciter la polémique et le scandale, et conduire l’école à publier un communiqué affirmant « condamner fermement » ce groupe Facebook et les propos qui y étaient tenus. La direction de l’établissement a également organisé des réunions avec ses étudiants pour « échanger sur ces dérives et sur les moyens d’éviter qu’elles se reproduisent dans l’avenir ». Il est vrai que lorsque l’on joue les oies blanches de la « bienveillance » et de « l’inclusivité », ce genre de comportements (qui, en des temps obscurs auraient sans doute été qualifiés de « potaches ») fait quelque peu désordre, démontrant par ailleurs que les discours lénifiants et le prêchi-prêcha moralisateur ne suffisent pas à éliminer les conflits, éteindre les jalousies et contraindre les divers bas instincts humains au sein d’un milieu ultra-concurrentiel où les « confrères » sont aussi des « concurrents » et où les sourires de façade ont bien du mal à masquer les crocs qui rayent le parquet.