La révision de la Constitution votée à une large majorité, la presse s’en félicite en majorité alors qu’une minorité en souligne l’aspect symbolique.
L’Humanité crie victoire
« Quelle victoire ! Quel bonheur ! Quelle fierté ! »
Les effusions de joie sont de mise chez l’Humanité [https://www.humanite.fr/politique/avortement/quelle-victoire-quel-bonheur-quelle-fierte-le-droit-a-livg-inscrit-dans-la-constitution], au point qu’il semblerait que la France vive un temps de fête suite à la constitutionnalisation de l’Interruption Volontaire de Grossesse.
Combattant contre « l’obscurantisme », pour « la liberté des femmes », le journal se fait porte-parole des représentants socialistes et écologistes jusqu’à rapporter les emportements exaltés de ces derniers : « “Vous avez définitivement perdu. Plus jamais nous ne reviendrons sur le droit à l’IVG, jamais !” a […] martelé […] Mélanie Vogel, autrice d’une proposition de loi au Sénat, déposée en 2023, visant à introduire ce droit dans la Loi fondamentale. » ; « “À ceux […] qui ont comparé l’avortement à un meurtre, sachez que vous avez décuplé la force des féministes. Sachez que vous avez perdu !” leur a rétorqué Elsa Faucillon, députée communiste. »
Le Figaro relativise
Plus pragmatique, Le Figaro se penche sur les faits et s’interroge sur l’utilité réelle et concrète de l’ajout de l’IVG dans la constitution. Interrogée par Le Figaro dans une interview en vidéo, Anne-Marie Le Pourhiet, professeur de droit émérite, « dénonce son inutilité : “C’est un symbole pour les féministes et un coup de communication pour le gouvernement”, assure-t-elle. »
Pour l’experte, « ce projet de loi constitutionnelle ne sert strictement à rien. C’est un copié-collé du droit positif existant. »« On voit bien d’ailleurs la gêne de l’exposé des motifs de ce projet de loi qui ne sait pas comment expliquer qu’il ne sert à rien. Quand on en arrive à citer la Cour suprême américaine dans l’exposé des motifs d’une révision constitutionnelle française… Qu’est-ce que ça vient faire là ? » se demande-t-elle.
Perplexe, le journal relate également dans d’autres publications les réticences de la part de la majorité sénatoriale et d’une partie des Français. Effectivement, « c’est la formule de “liberté garantie” de la femme à avoir recours à l’IVG qui heurte. “Garantir ce droit, c’est remettre en cause la clause de conscience des soignants.” » pour Gérard Larcher, président du Sénat. De plus, Le Figaro relaie les inquiétudes de la conférence des évêques de France alors qu’une grande partie des médias progressistes n’ont pas jugé pertinente la pluralité des opinions parmi leurs lignes. Le fait est que la conférence des évêques se montre particulièrement inquiète :
« Il n’est pas question, affirment-ils, pour l’Église catholique “d’affaiblir la force du repère biblique tu ne tueras pas”. »
« Ils expriment leur “ inquiétude devant ce que signifierait cette inscription” alors que “toute vie est un don pour ce monde, un don fragile et précieux, infiniment digne, à accueillir et à servir depuis son commencement jusqu’à sa fin naturelle”. Les évêques évoquent un “ triste record” de “234.000 avortements” en 2022 qui conduit à une “baisse prévisible de la population”, soit un “ échec”. » Le quotidien relève également le « vote conformiste » qui s’est répandu à l’Assemblée nationale.
Libération moque les opposants
Pour sa part, Libération tourne en dérision les revendications pro-vie qui font « pression jusqu’au bout sur les parlementaires » et qui « multiplient les envolées lyriques et les comparaisons les plus grossières les unes que les autres. » ; « J’ai l’impression d’être chez les fous. »
Le journal s’oppose également dans un autre article à la « partition de trolling quasi trumpesque » qui désigne l’intervention devant les députés de Vincent Bolloré. Ce dernier a réaffirmé ses positions : avec l’IVG, « pour ce catholique pratiquant, deux “libertés” se “heurtent”, dont celle “des enfants à vivre” ». Libération semble même y préférer la modification douteuse de la Marseillaise par Catherine Ringer, la chanteuse des Rita Mitsuko, « une adaptation ovationnée. » « Elle a notamment remplacé le “sang impur” qui, dans l’hymne national, “abreuve nos sillons” par “une loi pure dans la Constitution”. “Citoyens, citoyennes”, a aussi ajouté la star ».
En somme, la constitutionnalisation de l’IVG s’impose comme une loi inutile mais symboliquement très forte, qui ne manque pas de cliver encore davantage les Français. Néanmoins sur un plan politique électoral quelques mois avant les élections européennes, c’est l’occasion pour Emmanuel Macron de séduire la frange gauche sociétale de ses partisans peu à la fête sur d’autres sujets.