Mémoires d’outre-télé
« Si je fais trop de télé au détriment d’activités plus nobles, c’est que je suis vénal, j’aime l’argent », Le JDD, 24/08/2023
Incarnation vivante du faste et des excès des années 80, l’animateur est devenu, au tournant de l’an 2000, le centre de gravité de l’espace médiatique français avec « Tout le monde en parle », émission qui posa les jalons durables du talk-show du samedi soir. Journaliste, écrivain, publicitaire et patron de presse, ce touche-à-tout s’est battu toute sa vie pour être, et surtout rester, en pleine lumière. Vulgaire et mondain pour les uns, créatif et insolent pour les autres, son style ne laisse pas indifférent et les patrons de chaîne s’arrachent ses concepts d’émission qui contribuent à modifier en profondeur le format télévisuel. Le nombre d’animateurs, de chroniqueurs et d’humoristes qu’il a découvert donne le tournis : Laurent Baffie, Christine Bravo, Laurent Ruquier, Maïtena Biraben, Frédéric Beigbeder, Kad et Olivier, Gaspard Proust. Son sens de la provocation et des affaires, mêlé à un art du slogan acquis dans la publicité, donnèrent forme à ce qu’il décrit comme une « œuvre audiovisuelle ». L’heure de la postérité a sonné.
La mélancolie aidant, suite à son départ de Canal+, l’INA lui édifie son mausolée audiovisuel tandis qu’il fait parler les célébrités décédées dans « Hôtel du Temps », sur France 3, arrêté après quelques émissions.
Niçois d’origine, (ses arrières grands-parents firent tomber le « e » du « Ardissone »), il passe une enfance solitaire dans un foyer modeste où la religion est omniprésente.
« Je vis dans cet univers catho invraisemblable où, déjà tout petit, on t’explique que c’est très bien de ne pas avoir de blé. Qu’être pauvre, c’est presque une qualité. Que le fric, c’est sûrement pas ce qui peut rendre un homme heureux. […] On t’inculque la résignation absolue. La soumission totale. Toutes les bonnes vieilles valeurs qui te donnent envie de te révolter et de foutre le camp… »
Formation
Le jeune Ardisson doit, à son grand dam, changer très souvent d’établissement scolaire au gré des chantiers de son père. Ce dernier, ouvrier puis ingénieur des travaux publics, est envoyé en Algérie pendant un an pour reconstruire le port de Mers-El Kébir en 1954. À la fin du chantier, la famille retourne en Savoie et il devient interne au collège Saint-Michel d’Annecy. Puis, les lycées s’enchaînent, dans différentes régions : celui du Fayet à Chamonix, le lycée François 1er de Fontainebleau, le lycée L’Empéri de Salon-de-Provence et enfin le lycée Frédéric Mistral d’Avignon. Il obtient son baccalauréat en 1966 à l’âge dix-sept ans. Il s’inscrit en licence d’anglais à la faculté des lettres de Montpellier mais. Peu passionné par ses études, il n’obtiendra pas son diplôme.
Parcours
Publicité
Il monte à Paris en 1969 pour faire carrière et débute en tant que concepteur-rédacteur dans des agences de publicité, d’abord chez BBDO, puis chez TBWA où il se forme à la publicité auprès de Bill Tragos. Grisé par le succès pécunier, car le secteur est particulièrement rémunérateur, il se rend plusieurs moins en Asie avec sa femme (Goa, Bali puis Vientiane) avec l’intention d’écrire un livre. Il y fera plutôt l’expérience des drogues dures et connaîtra un sevrage difficile. Il ne retourne à Paris qu’en 1974, où il retrouve rapidement du travail à l’agence Ted Bates. Quatre ans plus tard, il fonde l’agence de publicité « Business », avec Henri Baché et Eric Bousquet. « Étant patron et actionnaire, je n’avais pas besoin de me faire un dossier, un book. Donc j’ai accepté de faire des 8 secondes et j’ai réinventé la réclame. J’ai fait « Lapeyre, y’en a pas deux », « Vas‑y Wasa », « Ovomaltine, c’est de la dynamique », « Quand c’est trop, c’est Tropico ! », « Chaussée aux Moines… amen ! »… C’étaient des trucs qui cartonnaient à mort. Les années 70–80, c’étaient les années de l’insouciance, du pognon, où on pouvait faire à peu près toutes les conneries qu’on voulait ». Il se retire du capital de l’agence à la fin des années 80 lorsqu’il commence à investir plus sérieusement le petit écran.
Presse écrite
En-dehors des chroniques et des éditos parus dans des publications comme L’Idiot International, Rock&Folk (où il publie avec Jean-Louis Maître la série d’interviews « Descente de Police » à partir de 1979), Paris Match ou Playboy (où il tenait la chronique nocturne), il lance aussi des revues plus confidentielles faisant la part belle à l’art et à la littérature comme Façade ou Rive Droite.
Il est patron de presse à trois reprises. La première fois, il est directeur adjoint des rédactions du groupe Hachette-Filipachi et rédacteur en chef de L’Écho des Savanes pendant six mois entre 1984 et 1985. L’expérience n’est pas concluante et il doit passer la main.
La deuxième fois, il crée le magazine Interview en 1992, rebaptisé Entrevue, publication sulfureuse qui entend révéler les potins et secrets peu avouables du PAF. En plus de passer « la moitié de [s]on temps à la 17e chambre correctionnelle de Paris » en raison de plaintes pour diffamation qui s’accumulent, on lui fait comprendre qu’il ne peut plus travailler à la télévision tant que son nom est lié à celui d’Entrevue. Il revend donc ses parts en 1995.
Enfin, il lance Frou-frou Mag en 1994, déclinaison en presse écrite du magazine féminin présentée par Catherine Bravo qu’il produisait sur France 2 à la même époque.
Télévision (émissions notables)
- 1985 : « Descente de police » (TF1), une déclinaison filmée de ses entretiens en forme de garde à vue parue dans Rock&Folk. L’émission est arrêtée par le CSA au bout de six numéros.
- 1985 — 1986 : « Scoop à la une » (TF1). Un jeu sur les médias produit par Catherine Barma.
- 1987 — 1988 : « Bains de Minuit » (La Cinq) tourné aux Bains Douches et produit par lui-même. C’est la première émission dont il est à la fois animateur et producteur, principe auquel il ne dérogera plus par la suite.
- 1988 — 1990 : « Lunettes noires pour nuits blanches » (Antenne 2) enregistrée dans un autre haut lieu de la nuit parisienne, le Palace. Il commence à poser les jalons de son style : tournages qui s’étirent en longueur, alcool à volonté pour les invités, interviews formatées pour aller chercher « la petite phrase », plateau éclectique qui rassemble des starlettes et des écrivains. Ses deux émissions suivantes sur le service public seront « Double Jeu », où il collabore pour la première fois avec Laurent Baffie, et « Ardimat », une mise en abyme de l’univers de la télévision, ne connaîtront pas le même succès et les pressions du CSA auront finalement raison d’elles. Poussé dehors par Jean-Pierre Elkabbach, il connaît une (relative) traversée du désert pendant deux ans.
- 1995 — 1996 : « Paris Dernière » (Paris Première)
- 1997 — 2003 : « Rive Droite/Rive Gauche » (Paris Première) sur une idée de Stéphane Simon et Alexis Kebabs, tous deux journalistes à Entrevue.
- 1998 — 2005 : « Tout le monde en parle », (France 2)
- 2003 — 2005 : « 93, Faubourg Saint Honoré (Paris Première)
- 2006 — 2018 : « Salut Les Terriens » (Canal+ et C8 à partir de 2016). Il se range du côté de Vincent Bolloré lors de la grève d’i‑Télé (« Je comprends que Vincent Bolloré ait envie de faire des économies… Toute le monde à Canal réalise aujourd’hui que M. Bolloré est là juste pour que les actionnaires gagnent plus d’argent, ce qui est le principe du système capitaliste. Après, si on n’accepte pas ça, il faut aller faire de la télévision en Corée du Nord ») et doit, en échange, faire passer son émission sur C8, la nouvelle chaîne qui succède à Direct 8. Il trouve là l’occasion de rajeunir son public.
- 2018 — 2019 : « Les Terriens du samedi »/« Les Terriens du dimanche » (C8). La chaîne aurait grevé le budget et l’animateur ne souhaitait pas continuer au prix de faire de la télé « low-cost ». Un article de Capital donne les détails de la négociation : « les deux émissions d’Ardisson étaient les moins rentables de la chaîne, avec une marge négative de 77%, et représentaient 32% des pertes. A la recherche d’économies, C8 a donc demandé à Thierry Ardisson de diviser par deux ses prétentions, ce qu’il a refusé, conduisant à son départ mi-2019. Quatre ans plus tard dans Les Grandes Gueules, il laisse entendre, avec une certaine mauvaise foi, que la vraie raison de son départ résidait le virage idéologique du groupe Canal+ ne lui convenait plus : « Au-delà de ce qu’il faut faire, il y a la ligne politique de la chaîne, et moi je n’ai pas envie d’être assimilé à l’extrême droite. Le ressenti de la chaîne, c’est l’extrême droite. CNews a défendu Zemmour et aujourd’hui fait campagne pour l’extrême droite ».
Littérature
- Cinémoi, Le Seuil, 1972.
- La Bilbe, Le Seuil, 1975.
- Rive Droite, Albin Michel, 1983.
- Descentes de Police, LTM, 1985.
- Louis XX, Olivier Orban, 1986.
- Dix ans pour rien ? Les Années 80, Le Rocher,1990.
- Rive droite, Magazine de Littérature, Albin Michel/Le Rocher, 1990–1992
- Pondichéry, Albin Michel, 1993.
- Les années Provoc, Flammarion, 1998.
- Confessions d’un baby-boomer, entretiens avec Philippe Kiefer, Flammarion, 2005.
- Les Fantômes des Tuileries, Flammarion, 2017.
Producteur de cinéma
D’abord producteur de télévision via sa société Ardisson&Lumières, dirigée en sous-main par Catherine Barma et Béatrice Ardisson et sa participation dans Télé-Paris, dirigée par l’acolyte Stéphane Simon, il tente des incursions dans le cinéma à partir de son arrivée sur Canal+ en 2006, une chaîne connue pour financer amplement le cinéma français. Aussi, pour le convaincre de rester le giron de Canal+ en 2016 , le groupe s’engage à financer trois de ses films.
Côté cinéma, il fonde Ardimages, sa propre société de production de films, en 2005. En entrant au capital de Nolita Cinema, il produit et co-produit des longs-métrages qui connaissent un certain succès comme « Max » où figurent Mathilde Seigner et Joey Starr ; une adaptation de Foenkinos par l’acteur Jean-Paul Rouve ou « Comment c’est loin », l’autobiographie romancée du rappeur Orelsan.
Parcours militant
Il fréquente les cercles de soutien à Giscard à partir de 1981. C’est à cette période qu’il fait notamment la rencontre d’Anne Méaux, future papesse de la communication politique, et de Vincent Bolloré. Lorsque la gauche arrive au pouvoir, il affirme n’avoir d’autres principes politiques que le suivant : « être libertaire, antitotalitaire. Donc, à l’époque, anticommuniste ».
Aussi, fort de ces convictions, il milite à l’Internationale de la Résistance (1983 — 1988), fondée par des dissidents communistes, aux côtés de Simone Weil, Jean-François Revel et Bernard-Henri Lévy.
Même s’il confesse n’avoir jamais eu « un respect monumental pour les politiques », il admet avoir voté pour Jacques Chirac au second tour des élections de 2002.
Ne faisant pas mystère de ses convictions monarchistes, plutôt originales pour un membre du PAF, il défend que « la monarchie constitutionnelle est le meilleur système de gouvernement ».
Ces convictions monarchistes auraient pu lui coûter cher, comme il l’admet à la revue Charles : « Si je n’ai pas bossé sur Canal + à l’époque, c’est parce qu’Alain de Greef pensait que j’étais d’extrême droite. Et ça a bien failli se reproduire sur France 2 avec Jean-Pierre Cottet. Mais là, j’ai acheté une bonne bouteille de pinard et je suis allé m’expliquer avec lui tout un après‑midi, ce qui m’a permis de faire Tout le monde en parle ! ».
Il crée l’association de défense des arcades Rivoli (ADAR) pour protester contre la prolifération anarchique des étals de souvenirs et des sandwicheries qui dénaturent cette portion de l’avenue de Rivoli, où vit l’animateur. Dans une vidéo diffusée sur le site du Parisien, il se fend de la phrase suivante : « J’adore les kebabs, mais les kebabs c’est mieux à Barbès ».
Vie privée
Il a un frère cadet, Patrick, qui vit en Allemagne, à Hambourg.
Il se marie une première fois avec Christiane Bergognon en 1970 à l’âge de 21 ans. Suite à un divorce, il reste un certain temps célibataire avant de faire la rencontre de Béatrice Loustalan, musicienne en 1983. Ils se marient en 1988.
Avec Béatrice Loustalan, il est père de deux filles et d’un garçon et grand-père depuis 2019. Manon Ardisson, née en 1989, est diplômée d’histoire à l’University College de Londres. Productrice, elle fait ses débuts dans le métier et dirigeant notamment la branche britannique d’Ardimages. En 2015, elle fonde sa propre société de production, Magic Bear. Mariée au scénariste et réalisateur franco-américain Samuel de Ceccatty, ils dirigent ensemble une autre société de production, Cat&Bear Pictures. La seconde fille, Ninon, née en 1991, est une artiste diplômée de la SaintMartins School de Londres. Gaston Ardisson, né en 1997, vit à Londres avec sa mère où il a lancé une marque de casquettes, Nasaseasons.
Tombant un jour sous le charme d’Audrey Crespo-Mara en zappant sur LCI, ils finissent par divorcer « l’un pour l’autre » et se marient en 2014. Comme lui, la journaliste était mariée et avait deux enfants.
Résidant dans le Ier arrondissement de Paris au 214 rue de Rivoli, il est également propriétaire d’un haras en Normandie, dans la commune de Sai près d’Argentan, acquis grâce aux indemnités perçues suite à son renvoi de France 2 en 1993
Ce qu’il gagne
À Voici, il confiait gagner l’équivalant de 30 000 francs par mois lorsqu’il travaillait dans la publicité à vingt-cinq ans.
Dans les colonnes de Capital, il admet des dépenses personnelles s’élevant à 20 000 euros par mois.
En 2021, Capital, qui a accès aux comptes des sociétés de l’animateur-producteur, fait état des chiffres suivants :
« Au total, depuis que l’animateur producteur a conclu son contrat avec Canal Plus en 2006, il a empoché 7,9 millions d’euros de dividendes, soit 600.000 euros par an en moyenne (avant impôts) ».
Distinctions
- prix Philippe Caloni du meilleur intervieweur en 2016.
- nommé au grade de chevalier de la Légion d’Honneur le 1er janvier 2024.
Sa nébuleuse
Au sujet de Vincent Bolloré, son ancien patron, le Journal du Dimanche révélait en 2017 (et donc, avant son procès intenté à C8 pour rupture abusive de contrat) que « sans être intimes, ils s’apprécient ».
Bill Tragos, publicitaire gréco-américain qui fonde l’agence TBWA en 1970, auprès de qui il se forme à l’art de la publicité.
Daniel Filipacchi, son mentor dans l’édition et son modèle dans l’existence. Comme tous les gens de sa génération, il ne jure dans sa jeunesse que par « Salut les Copains », l’émission d’Europe1 qui fit la part belle à la culture américaine pour cette jeunesse française des années 60 biberonnée à l’ORTF.
Fillipachi lui confiera L’Écho des Savanes, où il fait long feu. Peu rancunier, le même Fillipachi lui apportera un soutien financier pour lancer « Entrevue ». En hommage à « Salut les Copains », il intitule son dernier talk-show, « Salut les Terriens ».
Daisy de Galard, célèbre journaliste et productrice, membre du CSA, qui fut la marraine d’une de ses filles.
Didier Quillot, président du directoire de Lagardère Active, qu’il a conseillé pendant 4 ans.
Parmi les amis issus du milieu littéraire, les auteurs des « Nouveaux Hussards » : Eric Neuhoff, Patrick Besson ou le regretté Denis Tilinac.
Parmi les amis, peu nombreux, issus du show-business, on retrouve Yvan Attal, Alain Chabat et, évidemment, Laurent Baffie.
Jean Ennochi, son avocat, qui représente aussi Karine Le Marchand.
Ses producteurs Stéphane Simon et Jacques Sanchez.
Il l’a dit
« Avant, on était fiers de créer, mais personne ne veut plus prendre de risques. On est à l’époque du « pas de vagues », du puritanisme et du wokisme… Je suis content d’avoir fait ma carrière avant, parce qu’un producteur de 35 ans, aujourd’hui, n’a plus grand-chose à espérer », Le Point, 03/05/2022.
« Delphine Ernotte Cunci a raison et je ne me sens pas visé. J’ai toujours eu dans mes émissions des plateaux qui ressemblaient à la rue. Des Noirs, des Blancs, des Arabes… Je suis partisan d’une télé plus métissée », Capital, 22/01/2021.
« La forme n’intéresse personne en télévision ! Moi, si ! Je me suis fait chier à faire des génériques, des habillages, des lumières et ça me passionnait. Aujourd’hui, on fait de plus en plus de la radio filmée parce que plus personne n’a l’ambition ou les moyens de faire autrement. Mon credo, c’était que la télévision a une dimension artistique », Valeurs Actuelles, 04/07/2019.
« De toute façon, ouais, j’assume : un bon talk-show, c’est un talk-show avec des invités bourrés. Entre nous, qu’est-ce qui est jouissif dans les dîners de famille ? Bah qu’à la fin, les gens aient un coup dans le pif et disent enfin ce qu’ils pensent… Si un jour j’ai une école de télé, ce qui m’étonnerait, j’expliquerai ceci à mes élèves. Règle n°1: torcher l’invité. Règle n°2: mettre des jolies filles au premier plan. La télévision, c’est autant de fond que de fun » , Society, 2018.
Sur « Quotidien » : « C’est un peu bobo. Le ton, c’est un peu « l’eau ça mouille, les cheveux ça pousse, la guerre c’est mal », c’est un peu bisounours mais ils font un très bon travail sur l’info. C’est très nouveau. Souvent bluffant » Le jeu de l’ego, 2018.
« Je suis un enfant de l’ORTF. Pas un enfant de la télé », Le Soir, 20/06/2015.
« Après Jean-Paul II, un pape indien ou noir aurait donné plus de crédit à l’universalisme de l’Église », Médias, 2012.
« La famille sens traditionnel, c’est fini ! Dans l’avenir, les gens vivront seuls, à deux, à trois, à cinq ou huit si ça leur fait plaisir. Quel que soit leur sexe. Cette idée qu’on vivra à deux, un homme et une femme, pour l’éternité, c’est aberrant », Confessions d’un baby boomer, p.216
Ils l’ont dit
« En 2013, dans une interview fleuve pour Les Inrocks, Ardisson est dithyrambique sur son jeune collègue, il le trouve phénoménal et estime que c’est une personnalité exceptionnelle pour de l’entertainment pur. Neuf ans plus tard, le ton n’est plus le même. Désormais, Bolloré est devenu l’ennemi de l’animateur, oubliant au passage qu’il a aidé à ouvrir la voie à cette télé là. Mais non, Ardisson n’en démord pas, Hanouna est devenu vulgaire », David Carzon, Binge Audio, 01/01/2024.
« Un type torturé, exigeant, animé de la peur du lendemain et bosseur comme peu dans ce métier. Chez qui rien n’est jamais acquis. On s’est bien trouvés », Stéphane Simon, Le JDD, 02/09/2017.
« Complètement hystérique, il met une pression maximale sur chacun de nous. Il faut toujours qu’il désigne un pauvre bougre comme souffre-douleur pour évacuer son angoisse, qui se traduit par une terrible agressivité permanente. « Où est-ce qu’il est l’assistant de merde ! Toi, oui toi, viens-là, j’te dis ! Va me chercher de l’eau ! « S’il te plaît », « merci », n’existent pas dans son vocabulaire. Pas un mot gentil, jamais. » Michel Malausséna, Les Animatueurs, 2008, pp 86–87.
« Thierry Ardisson aurait pu être l’invité de sa propre émission ‘Ça s’en va & ça revient´, diffusée la saison dernière sur France 2. Il serait venu y raconter comment il dégringola du statut de cabot du microcosme médiatique français qu’il occupait à la fin des années 80 (époque des émissions ‘Ardimat´, ‘Double jeu´ et surtout de l’emblématique ‘Lunettes noires pour nuits blanches´ sur Antenne 2), quand son costume d’inquisiteur mégalo et lubrique faisait fureur dans un paysage cultivant l’outrance, à celui de paria, au milieu de la décennie suivante, lorsque ses délires narcotiques et sarcastiques commencèrent à faire tâche dans le climat de crise économique. Son entêtement à jouer les insolents et les flambeurs décadents finit par lasser. À tel point que ses minauderies de petit bourgeois arrogant et frustré n’impressionnèrent plus guère que quelques rares minets dans les boîtes de nuit branchées de la capitale qu’il continuait à écumer, le nez toujours chargé de poudre », La Libre Belgique, 20/07/2002.
« Aussi pernicieuse est sa trouble obsession des Juifs. Certes, il n’est pas question d’antisémitisme, d’hostilité déclarée. Mais ces citations antisémites répétées à l’antenne, sous couvert de les dénoncer ; cet acharnement à mettre en avant, gentiment, en vieux copain, l’origine juive de ses invités, qui s’y prêtent complaisamment ; cette insistance sur la judaïté de François Truffaut ou… du tango argentin : la compilation de Jean Robin est implacable. Et amène une question : cette insistance d’Ardisson à souffler sur les braises de la compétition communautaire, de la lutte des mémoires, à organiser semaine après semaine des matchs judéo-musulmans ou israélo-palestiniens, ne contribue-t-elle pas à entretenir en France les crispations communautaires ? », Daniel Schneidermann, Libération, 28/04/2006
« Nul n’ignore que tu as inventé, avec Bains de Minuit et Lunettes Noies, la télévision des Années 80. Ta modernité fut d’introduire la transgression dans un univers où la loi était encore la norme. La perversion devint avec toi la forme la plus chic de l’amour et du désir, et la provocation, une espèce de publicité intellectuelle, du « benettonisme » avant l’heure. Tu fis aussi passer l’le dandysme pour une manière d’ennui argenté et brillant. L’imposture satisfaisante et la décadence satisfaite étaient ton mode régulier de communication, ta vulgarité finit par devenir un comble, ou un surcroît de parisianisme », Arnaud Viviant, Libération, 25/04/1994 (reproduit dans les Confessions d’un Baby-Boomer, Flammarion, p.257).