À l’occasion de la remise de son rapport L’audiovisuel public français est-il pluraliste ?, l’Institut Thomas More revient sur l’orientation politique et idéologique des participants et thématiques dans les médias français.
Première diffusion le 30 mai 2024
L’OJIM prend ses quartiers d’été : du dimanche 28 juillet au dimanche 25 août nous republions les articles les plus significatifs du premier semestre.
C’est pour répondre à l’injonction fait à l’ARCOM par le Conseil d’État d’évaluer le respect des obligations de la chaîne CNews en matière de pluralisme, que l’Institut Thomas More a souhaité évaluer le pluralisme dans l’audiovisuel public. « S’il y a un acteur médiatique auquel incombe l’obligation de pluralisme en premier lieu, c’est l’audiovisuel public, qui est financé par l’impôt de tous les Français », remarquent les deux rapporteurs Jean-Thomas Lesueur et Aymeric de Lamotte. Proposant une analyse de l’orientation politique et idéologique des 587 participants intervenus sur différentes chaînes durant la période témoin du 19 au 24 février 2024, ils se sont ensuite appliqués à observer l’orientation politique et idéologique des thématiques traitées.
Quelles orientations politiques représentées dans l’audiovisuel public ?
S’appuyant sur une classification visant à préférer aux étiquettes politiques classiques (droite, extrême droite, gauche, extrême-gauche…) des qualifications relevant de mouvements de pensée (« Neutre », « socialistes et progressiste », « libéral et progressiste » et « libéral et conservateur »), le rapport a souligné que, sur la période témoin, 50 % des personnes (294 participants) intervenant sur les chaînes visées (France 2, France 5, France Info TV, France info radio, France Culture et France Inter) pouvaient être qualifiés de « neutres ». 25 % sont affiliés au rang de socialiste et progressiste, contre 21 % de libéral et progressiste et 4 % de libéral et conservateur.
France Culture apparaît la radio où le rang libéral et conservateur est le moins représenté (1 %) alors que France Inter est celle recevant le plus de participants issus de la classe socialiste et progressiste (32 %). Cette dernière accueille aussi « significativement plus de participants qualifiés de « Libéral et conservateur » que la moyenne (7%) ».
Sur l’ensemble des médias, le rapport constate « qu’il y a donc six fois plus de participants qualifiés de « Socialiste et progressiste » et cinq fois plus de participants qualifiés de « Libéral et progressiste » que de participants qualifiés de « Libéral et conservateur ».
Quelles acceptions des thématiques « écologie », « multiculturalisme » et « perception des personnalités libérales conservatrices » ?
C’est pour mettre à l’épreuve cet état des lieux que les rapporteurs se sont penchés sur le traitement de trois thématiques choisies : l’« écologie » (premier sujet de préoccupation des Français), le « multiculturalisme » et la « perception des personnalités libérales conservatrices ».
En matière d’écologie, le rapport note que « 65,5 % des avis exprimés [sur l’échantillon de médias et temporelle] relèvent d’une écologie que l’on peut qualifier de « décroissante », contre « 17 % » pour ce qu’il dénomme comme « l’écologie des solutions ».
En ce qui concerne le multiculturalisme, le rapport évoque un « éloge systématique de la diversité ». Sur la période témoin du 19 au 23 février, les douze fois où le multiculturalisme a été abordé l’ont été de manière favorable. Pour les rapporteurs, ces évocations proposent « un éloge de la diversité, présentée comme une chance pour le pays d’accueil et une condition pour le développement d’une société plus harmonieuse. La fierté de sa culture ou de ses racines est considérée avec scepticisme quand ladite culture est française, mais fortement valorisée quand elle est étrangère ».
Soulignant la plus grande rareté des personnalités appartenant au rang « libéral et conservateur » que ses corollaires dans l’audiovisuel public, le rapport s’interroge sur leur perception dans les médias. Selon le laboratoire d’idées, 57 % des personnes ayant fait une déclaration à leur propos expriment une opinion défavorable à leur égard, 8% une opinion favorable et 35% une opinion neutre (sur 72 avis recensés).
Des « déséquilibres patents » dans la représentation des invités politiques dans l’audiovisuel public
S’appuyant sur des chiffres de France Info, l’étude a aussi envisagé de mettre en regard le temps de parole des courants politiques sur les chaînes publiques France 2, France 5, France Info TV et France 3. « On observe d’abord que l’ensemble des gauches est systématiquement surreprésenté par rapport à son point électoral », expliquent les rapporteurs. Au même titre, le centre serait bien représenté, à l’inverse de la droite et la droite radicale, dont les représentants seraient « sous-représentés sur les quatre chaînes ».
En s’appuyant sur les chiffres de l’ARCOM, le rapport observe ensuite le temps de parole des courants politiques sur les chaînes d’information continue BFMTV, CNews, France Info TV et LCI le 2 mai et le 3 juin 2022 (mois précédant le premier tour des élections législatives). Là, les « gauches sont largement surreprésentées (sauf sur CNews, ‑19%) : de manière limitée sur LCI (+11,5%) mais fortement sur France Info TV (+38,5%) et BFM TV (+41,5%) » tandis que la droite radicale est « mieux représentée sur CNews (+20,5%) et BFMTV (+12%), elle est fortement sous-représentée sur France Info TV (-46%). »
Partialité de France Inter, parti-pris de Compléments d’enquête, surreprésentation des opinions favorables (65 %) sur le projet de loi fin de vie, prédominance des programmes dits « progressistes » (56 %) par rapport aux programmes dits conservateurs (0 %),… : la troisième partie du rapport, elle, propose une analyse au cas par cas de l’orientation partisane de différentes plateformes médiatiques.
L’OJIM a saisi l’ARCOM sur le même sujet début avril, nous y reviendrons.
Retrouvez le rapport complet en cliquant ici.
Voir aussi : L’Instant M de Sonia Devillers sur France Inter, l’entre soi idéologique