Dans les milieux autorisés cela se sentait, afin d’essayer de maintenir une audience qui baisse comme pour tous les médias en général, Télérama reprendrait le sens de l’humour.
Un zeste d’humour, plutôt que de se demander pourquoi baisse l’audience des médias de gauche, qui furent de fait durant des décennies les seuls médias ou presque, en mettant à part Le Figaro et Valeurs Actuelles. D’où les cris d’orfraie devant la montée en puissance de CNews ou du Journal du Dimanche.
Lors des élections législatives, la forteresse dite républicaine a tenu, à coups d’articles de presse, d’émissions de télévision et de radio, elle respire. Sa presse peut envisager une chronique humoristique.
La poésie de Poesy à Télérama
Pour Télérama c’est ici et maintenant, la première salve humoristique a donc eu lieu le mardi 16 juillet 2024 avec un entretien dans la rubrique « Société », mené par Emma Poesy.
Emma Poesy n’est pas un pseudonyme, elle existe. Journaliste indépendante, Emma écrit pour Télérama, L’Obs, Slate, Usbek & Rica et a été stagiaire pour l’émission d’humour Le Grand Dimanche soir de France Inter. D’où le Poisson de juillet inventé par Télérama.
Les journalistes terrorisés par le « réseau libre »
Le poisson se présente sous la forme d’un entretien avec le responsable Europe de Reporters sans frontières (RSF) et commence par ces mots :
« Depuis plusieurs semaines, des journalistes dénoncent les attaques d’une rare violence dont ils font l’objet sur les réseaux sociaux, où ils reçoivent chaque jour des menaces de haine, et dont certains sont menacés de mort ».
L’ensemble s’intitule : Harcèlement des journalistes : « on sent bien qu’un sentiment de puissance est à l’œuvre à l’extrême droite ».
Le lecteur, conscient que les journalistes de droite ont été victimes de harcèlement durant les cinquante dernières années, et interdits de parole dans l’immense majorité des médias, le lecteur, donc, peut penser que c’est une blague.
En fait, non. C’est bel et bien ce qui est écrit et le Poisson de juillet déroule son fil sur l’hameçon de Pavol Szalai, responsable de RSF. Il est mentionné, passage obligé, que les menaces proviennent de sites honnis comme « Réseau libre », dont le présent rédacteur avoue ignorer l’impact et avoir appris l’existence grâce à Télérama, une plateforme qui existerait depuis 2015 et serait hébergée (forcément) en Russie. Le responsable de Reporters sans frontières « alerte sur la montée en puissance des violences venues de cette mouvance politique, en ligne et sur le terrain ».
Si les concepteurs de l’intéressante série La Fièvre (Canal +) lisent le poisson de juillet, ils auront matière à un ou deux épisodes pour la saison 2.
Attention le poisson est un piranha !
Au cours des six questions de l’entretien, l’on apprend ainsi qu’une douzaine de journalistes et de médias « ont été sérieusement menacés », mais qu’en fait on ne sait pas : les journalistes ont peur de dire qu’ils sont victimes car, grands enfants qu’ils sont, ils craignent d’être encore plus attaqués s’ils attirent l’attention ; que « Réseau libre » veut « mettre une balle dans la nuque » à 180 personnes ; que le droit à l’information est menacé ; que le Rassemblement national menace la presse en boycottant des débats ; qu’un journaliste a été insulté à Orléans, un autre à Montpellier ; que les journalistes « sont nombreux à nous dire qu’ils font de plus en plus attention à ce qu’ils écrivent », en particulier ceux de médias comme StreetPress alias le kebab des médias.
Le Poisson de juillet se termine par un appel à ce que l’Union Européenne impose (tout de même) « des obligations en matière de sécurité des journalistes ». La rubrique « humour » de Télérama est née. Avec l’aimable complicité de RSF, l’ONG devenue police de la pensée des journalistes.
Voir aussi : Un dossier sur RSF et un appel à nos lecteurs