La défense, on pourrait dire la promotion, de la pédophilie par Libération remonte aux lendemains de la libération sexuelle. Depuis quelques années, le quotidien tente par à‑coups de modifier son image. Le sujet est d’autant plus important que le consentement est aujourd’hui une notion plus regardée qu’hier, et que l’on a établi qu’un enfant ne peut jamais consentir à une relation sexuelle avec un adulte. Check News, l’organe de Libération supposé faire du « fact-checking », mouille donc la chemise en répondant régulièrement aux questions des abonnés, qui s’offusquent à juste titre de ce qu’a pu défendre Libération. Il affirme notamment que le titre « a consacré plusieurs pages » à l’affaire Matzneff, « sans omettre d’aborder frontalement » les liens du média avec la pédophilie, dans une « salutaire introspection ». Pourtant, le mea culpa de Libération est loin d’être exhaustif, et suit en réalité les scandales qui éclatent les uns après les autres. Troisième partie.
Et si les victimes l’avaient cherché ?
Libération ne se contente pas de faire croire aux adultes qu’ils sont tous des pédocriminels en puissance parce qu’ils sont tous pédophiles. Le quotidien veille aussi à faire entrer dans les esprits que les enfants, au fond, n’attendent que cela.
C’était déjà ce que soutenait Daniel Cohn-Bendit, lorsqu’il affirmait que, s’il avait caressé de très jeunes enfants dans une crèche, il n’était pas pour autant pédophile puisque c’était ce qu’avaient demandé les enfants eux-mêmes. C’est aussi ce qui se trouvait en creux dans la pétition de 1977, où les signataires affirmaient que l’absence de violence valait consentement et rendait donc les sanctions disproportionnées.
C’est enfin ce qui est à l’œuvre dans les choix sémantiques de Serge Jully, directeur de publication de Libération pendant que Christian Hennion y exerce. Il définit ainsi Franck Demules comme « celui qui fut son amant pendant de nombreuses années. » Exit le concept de victime. Le même procédé est utilisé dans le portrait de Vanessa Springora, auteur du Consentement, qui raconte les viols commis par Gabriel Mazneff. Elle est présentée comme l’« ancienne “compagne” adolescente de Gabriel Matzneff » qui « détaille sa relation. » Libération raconte que « il va lui faire une cour assidue, clandestine et valorisante. » Ces mots datent du 21 décembre 2019, bien après MeToo qui a fait admettre, avec le concours de médias comme Libé, un regard appuyé comme une agression sexuelle.
Les choses changent néanmoins, quoique pas très vite. Le 29 décembre 2019, Laurent Joffrin, directeur de la rédaction, qualifie Vanessa Springora de « amante de 14 ans et victime de Gabriel Matzneff » avec un peu plus de lucidité.
Brouiller la frontière entre l’amour et le viol, l’arme de la pédophilie
Aujourd’hui, certains préfèrent le terme de « pédocriminalité » à celui de « pédophilie ». Et pour cause. Phileo signifie « j’aime » en grec, et le pédophile est donc étymologiquement celui qui aime les enfants. Or, tout le monde aime les enfants, ce qui permet à Libération de publier que « toute relation éducative, pédagogique, ou thérapeutique avec un enfant s’appuie sur des tendances pédophiliques sublimées. » Les enseignants qui consacrent leurs soirées à l’élaboration de leçons adaptées à leurs classes sont ainsi dans le même panier que les prédateurs sexuels.
Une fois le terme de « pédophilie » admis, il ne reste plus à la psychanalyste (et chargée d’enseignement à Paris7 !) Simone Korff-Sausse qu’à donner, ou plutôt imposer, sa vision de l’amour. Une tâche d’autant plus facile que « L’amour est un sentiment complexe. » « Dans l’amour, il y a la tendresse, mais aussi la passion. Il y a l’attirance qui comporte toujours une part d’érotisme. Il y a le respect de l’autre qui peut devenir de l’indifférence. L’amour peut être possessif, au point de vouloir détruire l’autre plutôt que de le voir s’échapper. Et puis surtout il y a ce point, le plus énigmatique et le plus choquant des relations humaines, c’est que l’amour peut conduire certains à trouver du plaisir à faire souffrir l’autre. » Le mélange des genres en fera sauter plus d’un au plafond. Les mères qui contemplent un nouveau-né fripé à l’œil interrogateur et à la moue ronchonne. Les enfants qui prennent soin de leurs parents âgés. Mais aussi les philosophes qui pourraient trouver que le sadisme, le narcissisme, l’indifférence, n’ont pas grand-chose à voir avec l’amour, sans oublier les hellénophones, qui savent qu’en grec ancien, φιλία, ou philia, n’a pas le même sens que ἔρως, ou éros, et qu’écrire que « dans l’amour, il y a l’attirance qui comporte toujours une part d’érotisme », relève au mieux de l’ignorance, au pire de la malhonnêteté.
Faire entrer les enfants dans le monde des adultes, un rêve de gauche
Aujourd’hui, les animations proposées par des drag-queens dans les établissements recevant des enfants choquent. Alors que la gauche clame l’importance de l’ouverture d’esprit, les parents invoquent le droit des enfants à avoir leur âge, et à ne pas être immergé précocement dans le monde des adultes qui contient, il est vrai, le sexe. Ce combat d’aujourd’hui se retrouve dans la défense que Libération faisait hier de la pédophilie. Ainsi, en 1979, Libération publiait une pétition affirmant que « nier sa sexualité à l’enfant, c’est nier qu’il est un être à part entière ».
Vingt ans plus tard, Simone Korff-Sausse affirmait que « l’enfant lui-même est habité et traversé par des flux pulsionnels et émotionnels. » Jusque-là, on souscrit, l’enfant ne sait pas se contrôler. « Pipi, caca, boudin, zizi, c’est le monde de l’enfance », continue-t-elle avant de conclure que « je t’attrape, je te flaire, je te mords, je te touche, j’enfonce mon doigt là où je peux, je te lèche, je te suce, c’est ainsi que les enfants échangent et aiment. » Le passage est révélateur. Simone Korff-Sausse tord la vérité pour la faire entrer dans le moule qui l’arrange. Le fait qu’un enfant découvre le monde par tous ses sens et mette donc des cailloux dans sa bouche lui permet de dire qu’il suce ou lèche. Parce qu’un enfant met les doigts dans les yeux de son petit frère, il enfonce son doigt où il peut, et on a compris que ce n’est pas l’œil que sous-entend Simone Korff-Sausse.
On décèle même un certain cercle plus que vicieux dans la pétition de 1977 publiée par Libération pour défendre trois hommes condamnés à la prison. Les signataires demandent : « si une fille de 13 ans a droit à la pilule, c’est pour quoi faire ? » Toute la duplicité de la gauche est là. Imposer un changement au nom du droit des individus et de leur liberté, en l’occurrence donner accès à la pilule contraceptive à de jeunes adolescentes. A ce moment-là, la plupart des Français ne voient pas le piège, et considèrent qu’en effet, puisque certaines filles ont une vie sexuelle précoce, elles doivent avoir droit à la pilule pour s’assurer qu’elles ne tombent pas enceintes. Il suffit ensuite à la gauche d’opérer une inversion des causes et des effets en affirmant que puisque les enfants de 13 ans ont droit à la pilule, alors elles doivent être libres de leur vie sexuelle, y compris avec des adultes.
À suivre.