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Afrique : le Journalisme culturel peu connu, coup de gueule

6 octobre 2024

Temps de lecture : 7 minutes
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Afrique : le Journalisme culturel peu connu, coup de gueule

Temps de lecture : 7 minutes

Le jour­nal­iste cul­turel est un pro­fes­sion­nel peu con­nu. Il a en charge la pro­duc­tion d’articles ou de doc­u­men­taires rel­e­vant de la cul­ture. Il inter­vient dans les pages dédiées d’un mag­a­zine, d’un jour­nal, d’une émis­sion radio ou télé ou de plus en plus fréquem­ment sur des sites de con­tenus. Aujourd’hui, dans les médias africains, la cul­ture n’occupe pas une place impor­tante, elle est reléguée au sec­ond plan. Elle a une place très réduite. L’engagement et l’implication du cri­tique dans les arènes publiques, con­stituent-ils un vecteur de péren­ni­sa­tion, de son util­ité en tant que pre­scrip­teur ? Les jour­nal­istes africains con­nais­sent-ils l’importance de la cul­ture ? Pourquoi le jour­nal­isme cul­turel africain est-il peu con­nu ? C’est à ces quelques ques­tions que ce coup de gueule tente de répondre

Nous sommes infor­més des faits sur les incendies, les meurtres, les acci­dents de la route, les nais­sances et les décès. Un jour­nal­iste cul­turel quant à lui, explore les événe­ments qui déroulent dans sa cul­ture. Il ou elle exam­ine le con­texte cul­turel, socié­tal, com­mu­nau­taire dans lequel un large éven­tail d’évènements se produisent.

Les qual­ités pour devenir jour­nal­iste culturel 

Un jour­nal­iste cul­turel doit être curieux pour rester au courant des actu­al­ités artis­tiques nationales, mais aus­si inter­na­tionales. Il doit pos­séder une large ouver­ture d’esprit pour suiv­re l’ensemble des secteurs liés à sa thé­ma­tique cul­turelle, mais aus­si faire preuve d’un esprit de syn­thèse pour relay­er une infor­ma­tion en un nom­bre min­i­mum de mots. Aus­si, il est tenu d’être poly­va­lent pour réus­sir à s’entretenir avec une mul­ti­tude d’interviewés et rap­porter des faits. Au-delà, le jour­nal­iste cul­turel doit maîtris­er les tech­niques du dessin, du ciné­ma, selon sa spécialité.

Qu’est-ce que le jour­nal­isme artis­tique et culturel ?

Le jour­nal­isme artis­tique con­siste à ren­dre compte et à analyser des événe­ments, des ten­dances et des per­son­nal­ités du monde des arts, notam­ment des arts visuels, des arts du spec­ta­cle, de la lit­téra­ture, du ciné­ma, de la musique etc… Il va au-delà du sim­ple reportage et s’intéresse à l’analyse cri­tique, à la nar­ra­tion et à la four­ni­ture d’informations au public

Quelles matières à étudi­er pour être jour­nal­iste culturel?

Les matières comme les let­tres et la philoso­phie sont déter­mi­nantes dans la for­ma­tion des futurs jour­nal­istes. La maîtrise de la langue française est essen­tielle dans ce domaine, et ces matières per­me­t­tent de dévelop­per des com­pé­tences en rédac­tion, en analyse cri­tique et en communication.

Pré­car­ité et expertise

Rares sont les jour­nal­istes cul­turels qui béné­fi­cient d’un poste sta­ble au sein d’une rédac­tion. Pour nom­bre d’entre eux, l’activité cri­tique implique soit la rédac­tion pour plusieurs titres simul­tanés, soit l’adjonction de l’activité cri­tique à une autre (artis­tique ou uni­ver­si­taire). Le béné­fice qu’ils tirent de leur activ­ité est donc prin­ci­pale­ment d’ordre sym­bol­ique et per­met de faire accepter par­tielle­ment la pré­car­ité. C’est l’un des résul­tats mis en avant par Pierre Michel Menger (2009) qui con­state que le tra­vail artis­tique est « mod­elé par l’incertitude » qui per­met l’originalité et l’innovation, la sat­is­fac­tion que pren­nent les artistes à créer. Au regard de cette étude, il sem­ble que l’incertitude et la grat­i­fi­ca­tion sym­bol­ique sont des traits struc­turants. C’est juste­ment l’un des prin­ci­paux résul­tats de l’enquête sym­bol­ique menée par Pierre François et Valerie Char­train (2009) qui soulig­nent deux prin­ci­pales car­ac­téris­tiques de la pro­fes­sion cri­tique : « une incer­ti­tude économique sou­vent appréhendée en amont et un néces­saire recours à une diver­si­fi­ca­tion des activ­ités com­plé­men­taires. Aus­si, il faut remar­quer que la spé­cial­ité pro­fes­sion­nelle du jour­nal­iste cul­turel est aus­si celle d’un tiraille­ment, entre le jour­nal­isme et la cul­ture deux secteurs dans lesquels ils sont sub­or­don­nés, se retrou­vant « dou­ble­ment dom­inés » pour repren­dre les ter­mes de Jan Fredik Hov­alen et Karl Knap­skog (cité par Kris­tensen et Fram 2017 ; 161–162). Sou­vent porté par des jeunes cri­tiques désireux de pass­er du statut de pas­sion­né à celui d’expert d’amateur à pro­fes­sion­nel, le jour­nal­isme cul­turel est une pro­fes­sion par­fois sac­ri­fi­cielle, où à la pré­car­ité s’ajoutent encore une très forte com­péti­tiv­ité, une légitim­ité dif­fi­cile à acquérir et surtout à impos­er face à celle des jour­nal­istes des hard news, poli­tique, inter­na­tion­al etc

 

Un méti­er pré­caire et pas tou­jours reconnu

Selon l’art cou­vert, la sit­u­a­tion est d’au­tant plus dif­fi­cile. Prenons l’exemple de la danse. “Aux Pays-Bas, le cri­tique est cer­taine­ment un peu plus pro­tégé. Bien que les cri­tiques ne soient pas très bien payés par rap­port à d’autres domaines ou même aux pra­tiques jour­nal­is­tiques, et que les prin­ci­paux médias aient égale­ment réduit les cri­tiques au min­i­mum, cette idée de ‘presse libre’ est encore très présente, et les plate­formes dédiées à l’écri­t­ure cri­tique des spec­ta­cles ont de l’ar­gent et sont financées afin de pay­er leurs auteurs”, explique Jor­di Ribot Thun­nis­sen, his­pano-néer­landais basé aux Pays-Bas, qui est cri­tique de danse pour Spring­Back Mag­a­zine, mais aus­si enseignant en his­toire de la danse, théorie de la danse et improvisation.

Un Jour­nal­isme au car­refour du cul­turel, du marc­hand et du politique

Dans le con­texte con­tem­po­rain, les indus­tries cul­turelles se car­ac­térisent par une struc­ture bipo­laire entre le cul­turel et le marc­hand. Par exem­ple, Stephane Debenedette rap­pelle que « la con­cep­tion dual­iste du champ cul­turel élaborée par Pierre Bour­dieu (1932) oppose le pôle com­mer­cial de la grande pro­duc­tion restreinte. Par effet de synec­doque, le jour­nal­isme cul­turel est, lui, aus­si, pris dans un bal­ance­ment et des jeux de fric­tion entre le marc­hand et ce qui relève de sa « pro­duc­tion restreinte », à savoir ici, l’engagement poli­tique et le posi­tion­nement de ses auteurs. A la ques­tion le jour­nal­isme cul­turel est-il un jour­nal­isme comme les autres ? La réponse est évidem­ment non, puisque ce dont il traite, la cul­ture et les pro­duc­tions cul­turelles se dis­tinguent par leur dou­ble nature, à la fois marchande et créa­tive. La ques­tion n’est donc pas tant « le jour­nal­isme est-il dif­férent » mais plutôt où se loge sa spé­ci­fi­ca­tion ? ». Le dossier entend pré­cisé­ment se struc­tur­er autour des dif­férentes échelles et des dif­férentes logiques de sin­gu­lar­ité et de dif­féren­ci­a­tion des pra­tiques édi­to­ri­ales du jour­nal­isme cul­turel qui influ­ent cer­taines pra­tiques pro­fes­sion­nelles et nous enga­gent à ques­tion­ner sa dimen­sion socio-économique. En dépit des dif­férentes con­traintes qui struc­turent le champ médi­a­tique, celui-ci demeure d’une remar­quable vital­ité et con­stitue un pôle attrac­t­if qui sus­cite des voca­tions, ain­si que le mon­trent les for­ma­tions français­es dédiées au jour­nal­isme cul­turel. C’est pour dire l’importance de la cul­ture. Les africains ont-ils le com­plexe d’évoquer leur cul­ture ? Il est clair que le but prin­ci­pal du jour­nal­iste est d’informer le pub­lic sur le fonc­tion­nement de l’environnement afin que celui-ci se fasse sa pro­pre opin­ion du pro­duit ou du ser­vice pro­posé par l’Etat. Pour réus­sir ce défi, la spé­cial­i­sa­tion du jour­nal­iste dans un domaine par­ti­c­uli­er comme celui de la cul­ture et des medias qui fait l’objet de notre objec­tiv­ité s’impose. Mal­heureuse­ment en Afrique, en Côte d’Ivoire et au Séné­gal en par­ti­c­uli­er, les medias man­quent de pro­duc­tions de valeur pour mieux légitimer et con­cep­tu­alis­er la cul­ture et les arts. Pour Char­ly Gabriel Mbock, « les arts et la cul­ture presse con­tribuent à la pro­mo­tion des arts et de la cul­ture ». Les jour­nal­istes cul­turels et les cri­tiques de la presse ont la respon­s­abil­ité d’aider le pub­lic dans son choix de con­som­ma­tion cul­turelle alors que les cri­tiques de presse en Côte d’Ivoire ou au Séné­gal n’ont pas d’impact sur le choix de con­som­ma­tion du pub­lic. En regar­dant les colonnes des pages cul­ture, elles sont très sou­vent zap­pées au prof­it des infor­ma­tions non cul­turelles. Les pages cul­turelles sont zap­pées, pire les com­pé­tences des jour­nal­istes sont zap­pées égale­ment. Pour plusieurs chefs de rédac­tion, la cul­ture n’est pas rentable pour la sim­ple rai­son que le pub­lic ne s’y intéresse pas ou peu. On préfère évo­quer la poli­tique, les faits divers ou même des infor­ma­tions non fondées. Intel­lectuel, poète, Léopold Sen­g­hor pre­mier prési­dent de la République du Séné­gal en 1960 con­nais­sait la valeur de la cul­ture. L’humanisme de feu Sen­g­hor affir­mait la com­plé­men­tar­ité des cul­tures et des civil­i­sa­tions. Puis­sant au fond de l’âme noire-africaine, Sen­g­hor est à la recherche, mal­gré une his­toire pleine de souf­frances, de cette Afrique for­mée à l’esprit européen. Il vise à la réc­on­cil­i­a­tion sur les fonde­ments d’une cul­ture uni­verselle et l’attention mutuelle de la dig­nité des hommes.

Pourquoi la cul­ture d’un pays est-elle importante ?

La cul­ture est le cœur d’une nation. A mesure que s’accroît l’intégration économique des pays, ceux-ci ont besoin d’une cul­ture nationale et de modes d’expression cul­turelle vigoureux pour préserv­er leur sou­veraineté et leur iden­tité propre.

Mapote Gaye Cor­re­spon­dant Afrique OJIM

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